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Du veau suisse testé positif

Tous les veaux ne sont pas toujours et uniquement nourris au lait maternel... Keystone Archive

En Suisse, un veau sur cinq contient des antibiotiques. Consommateurs et professionnels exigent des contrôles plus transparents et plus indépendants.

L’information émane du laboratoire de contrôle de qualité de la viande de Migros (SQTS). Son responsable, Roland Dousse, a du reste écrit aux autorités concernées pour leur exprimer sa préoccupation.

«Les contrôles effectués dans les abattoirs suisses montrent beaucoup de résidus d’antibiotiques, souligne Roland Dousse. Comme ils ne dépassent pas les valeurs limite fixées par la loi, les autorités ne font rien.»

Les stimulateurs de croissance sont interdits

C’est pourquoi les bouchers et l’économie de la viande demandent une amélioration des contrôles et des normes. Ils souhaitent réduire encore la quantité de médicaments avant l’abattage et revoir les méthodes d’engraissement.

De leur côté, les Laboratoires cantonaux des deux Bâle ont trouvé des traces de chloramphenicol, une substance pourtant interdite depuis 1999. Et cela dans un échantillon d’urine de veaux et de porcs sur quatre.

Or, depuis trois ans, l’usage d’antibiotiques dans les fourrages est formellement interdit en Suisse comme dans l’Union européenne. Motif: il augmente la résistance aux médicaments.

Une distribution aléatoire et mal contrôlée

Selon l’Organisation mondiale de la santé, 50% des antibiotiques produits dans le monde sont utilisés par le secteur agroalimentaire. En Suisse, selon l’Office vétérinaire fédéral (OVF), l’utilisation d’antibiotiques a baissé de 80 à 39 tonnes en 2000.

A première vue, cette diminution est rassurante. Mais l’OVF indique par ailleurs une augmentation de l’usage d’antibiotiques à but thérapeutique: de 15 à 22 tonnes, toujours pour 2000.

Ceci n’étonne pas la conseillère nationale socialiste Simonetta Sommaruga, présidente de la Fondation des consommateurs suisses: «La distribution d’antibiotiques au bétail est aléatoire et mal contrôlée». Elle n’exclut pas, comme d’autres, que certains éleveurs utilisent ces produits en vue d’engraisser le bétail.

«Ce n’est pas normal qu’un animal sur quatre ou cinq soit malade.» Simonetta Sommaruga dénonce «le manque de transparence et d’indépendance» des contrôles. «Dans certains petits cantons, le vétérinaire qui soigne les animaux est le même qui effectue les contrôles, il faut que la surveillance soit renforcée.»

Pas d’affolement

Il serait exagéré de parler d’un nouveau scandale alimentaire. Mais, ajoutées aux affaires de vache folle, de peste porcine, de fièvre aphteuse et autres épizooties, le consommateur ne saura bientôt plus à quel saint se vouer.

Car il n’y a pas que la viande. Récemment, on a également trouvé des traces de médicaments dans les poissons, dans le miel… Ces résidus ne sont absolument pas toxiques pour l’être humain, tous les spécialistes consultés le précisent.

Mais Roland Dousse souhaite plus de vigilance: «On ignore comment se développe le processus de résistance des micro-organismes aux médicaments. Et c’est ça qui pourrait s’avérer dangereux pour l’homme».

Revoir la politique agricole

Simonetta Sommaruga repose le problème de la politique agricole en général. «On a toujours dit aux consommateurs que les produits suisses sont plus chers mais plus sûrs. Et on a largement subventionné l’agriculture. Si, au bout du compte, les produits suisses ne sont pas meilleurs que les autres, à quoi ça sert de subventionner l’agriculture?»

La Fédération romande des consommateurs est également attentive. Sa présidente, Isabelle Eichenberger, s’interroge sur les méthodes d’élevage, la résistance naturelle des races sélectionnées. «Je me demande si les normes légales ne sont pas trop élevées.»

C’est l’avis de Roland Dousse: «Ces normes ont été fixées en 1995, sur des données des années précédentes. On n’obtiendra jamais un ‘taux zéro’ mais on pourrait diminuer ces valeurs-limites.»

En conclusion, la présidente de la Fédération romande des consommateurs estime que «ce n’est pas un problème de santé publique pour l’instant. Mais il pourrait bien le devenir».

Isabelle Eichenberger

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