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La hausse du pétrole va-t-elle freiner la conjoncture?

Les prix du pétrole augmentent avec la violence au Proche-Orient. Keystone

En raison de l'escalade de la violence au Proche-Orient, le cours du pétrole est reparti à la hausse et a dépassé les 78 dollars le baril. Et ce n'est pas fini, selon les experts.

Du coup, le prix de l’essence a déjà augmenté en Suisse. Mais les experts sont partagés quant aux conséquences de cette hausse sur la croissance de l’économie nationale.

Le cours du pétrole est reparti à la hausse en raison de l’escalade de la violence au Proche-Orient et l’offensive de l’armée israélienne en cours au Liban.

Vendredi à New York, le baril de brut de référence affichait 78 dollars, contre 76,70 dollars jeudi, a souligné vendredi la porte-parole de BP à Londres. Et tout porte à croire que la barre des 80 dollars sera bientôt franchie.

A Vienne, l’Organisation des pays producteurs de pétrole (OPEP) se dit «préoccupée» par ces records. Vendredi, le secrétariat du cartel a fait savoir que ses membres feraient tout leur possible pour stabiliser les prix et préserver ainsi «l’ordre et la stabilité».

Le porte-parole de l’OPEP a précisé que la hausse ne correspondait pas à la réalité du marché, puisque l’offre dépasse largement la demande et que les réserves n’ont jamais été aussi importantes depuis cinq ans dans les pays de l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE). La production des 11 pays membres de l’OPEP a en effet atteint un record absolu.

Et pourtant, les craintes d’embrasement au Proche-Orient alourdissent sur les
marchés un climat déjà chargé par le conflit autour des ambitions nucléaires de Téhéran, qui vient d’être renvoyé devant le Conseil de sécurité de l’ONU.

Hausse de l’essence en Suisse

En Suisse, cette hausse a immédiatement fait sentir ses effets douloureux sur le prix de l’essence à la colonne.

Les compagnies pétrolières Shell, BP et Esso ont emboîté le pas à Migrol, qui avait augmenté ses prix jeudi, en augmentant les leurs de 2 centimes avec effet immédiat. Pour l’heure, seul Esso renchérit également le prix du diesel de 2 centimes, mais ses concurrents suivent de près l’évolution du marché.

Il faut désormais débourser en moyenne 1,76 francs par litre de sans plomb 95 dans les stations-service de Suisse, 1,80 francs par litre de sans plomb 98 et 1,77 par litre de diesel, a déclaré Erich Schwizer, du Touring Club Suisse (TCS). Les prix du carburant frôlent ainsi le record de 1,77 franc par litre de sans plomb 95 atteint en septembre dernier.

Et la conjoncture?

Cette nouvelle escalade de la violence au Proche-Orient ne devrait pas avoir de conséquence sur l’économie suisse, selon certains experts.

Le conflit au Proche-Orient existe depuis des années, a relevé Hanspeter Hausherr. L’économiste de l’UBS estime que même si la tension s’est ravivée avec les bombardements de l’armée israélienne au Liban, celle-ci ne devrait pas s’accompagner d’effets tangibles sur les économies de l’Europe, de l’Asie et des Etats-Unis.

L’influence de cette spirale de la violence sur les entreprises et les consommateurs reste limitée. En revanche, si le conflit devait encore se durcir, avec par exemple une intervention de la Syrie et de l’Iran, les conséquences pourraient être plus dommageables.

De manière indirecte, une forte hausse du prix du pétrole pourrait freiner l’actuelle dynamique de la conjoncture, a poursuivi M. Hausherr. Mais un tel effet est difficile à quantifier. Jusqu’à présent, le renchérissement du baril de brut à de 20 dollars à 78 dollars n’a pas pesé sur l’évolution conjoncturelle.

Les experts pas unanimes

Mais les économistes ne sont pas unanimes. Certes, des études empiriques montrent qu’un baril de brut coûtant 10 dollars de plus freine la croissance des pays de l’OCDE d’environ 0,5% dans les deux années qui suivent la hausse.

Mais la réalité des dernières années présente une toute autre image. Il serait erroné d’en conclure qu’une hausse du prix du pétrole n’est pas dommageable pour l’évolution conjoncturelle, écrivait ainsi le Secrétariat d’Etat à l’économie (seco) à fin juin.

Malgré des prix du pétrole à un haut niveau, les conditions cadre favorables, une faible inflation et des taux d’intérêt bas ont été déterminantes. La facture pétrolière constitue toujours un risque. Mais le contexte général s’avère bien plus décisif qu’un seuil de prix de 80 ou 100 dollars pour un baril de brut.

La durée sur laquelle s’étend une hausse du prix de l’or noir joue à ce titre un rôle plus important, explique Willy Roth, économiste au Centre de recherches conjoncturelles (KOF) de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ). Et si la flambée du brut devait se poursuivre, cela pourrait avoir un impact sur la conjoncture.

Prochaines prévisions

Quoi qu’il en soit, le KOF dévoilera le 6 octobre ses prévisions de croissance. Le SECO a pour sa part révisé les siennes en nette hausse à fin juin, annonçant une expansion du produit intérieur brut (PIB) de 2,7% pour cette année, la plus haute depuis 2000.

En 2007, elle devrait se tasser à 1,5%.

swissinfo et les agences

– Environ 80% des importations suisses de brut proviennent des pays d’Afrique du Nord et de l’Ouest.

– En 2004, la part des produits pétroliers a atteint 57% de la consommation d’énergie en Suisse.

– Les importations en Suisse comptent deux tiers de produits pétroliers finis et un tiers sous forme brute.

– En conséquence de la crise pétrolière des années 70 en Suisse, la part des produits pétroliers de la consommation globale d’énergie à diminué de 80& (1973) à 57% (2004).

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