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Politique monétaire: la BNS maintient le cap

Il faut de moins en moins de francs pour obtenir des euros. swissinfo.ch

La Banque nationale suisse (BNS) annonce jeudi qu’elle ne modifiera pas la politique monétaire poursuivie depuis plusieurs mois. Elle conserve son taux de référence inchangé face à un franc qui s’envole et à une économie mondiale qui s’essouffle.

La BNS poursuit donc sa politique monétaire expansionniste. La banque centrale maintient, comme attendu, la marge de fluctuation de son taux directeur autour du Libor à trois mois, dans une fourchette comprise entre 0,0% et 0,75%, avec un taux cible fixé à 0,25%, a-t-elle annoncé jeudi.

Cette marge est restée inchangée depuis mars 2009, date à laquelle la BNS avait relâché ses conditions monétaires pour empêcher une trop forte appréciation du franc face à l’euro, alors que la situation économique s’était fortement dégradée.

L’institut d’émission a encore relevé jeudi ses prévisions de croissance pour l’économie suisse cette année, à l’image d’autres institutions. La BNS s’attend désormais à une hausse du produit intérieur brut (PIB) réel de 2,5% alors qu’elle tablait sur +2% en juin.

Cherté du franc

Mais cet élan est en train de retomber. La BNS «prévoit pour le second semestre 2010 et début 2011 un net fléchissement de la croissance du PIB en termes réels, dû à la forte revalorisation du franc et à la perte de dynamisme de l’économie mondiale», avertit-elle, sans articuler cependant de prévision pour l’an prochain.

Elle rejoint en cela le constat du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO), qui lui aussi a revu à la hausse jeudi ses estimations pour cette année et abaissé celles pour l’an prochain. Le SECO s’attend à une progression du PIB réel de 2,7% (contre +1,8% en juin) en 2010, mais à un ralentissement à +1,2%, contre +1,6% précédemment.

Menace de déflation

Pour ces mêmes raisons, la banque centrale revoit en baisse ses estimations d’inflation. Elle table sur un taux de renchérissement de 0,7% en 2010, de 0,3% en 2011 et de 1,2% en 2012. En juin, l’institut d’émission s’attendait à un renchérissement de 0,9% pour cette année, de 1% en 2011 et de 2,2% en 2012.

La prévision d’inflation conforte la politique monétaire de la BNS. Mais si celle-ci est «actuellement appropriée», «elle recèle à long terme des risques pour la stabilité des prix». Si ces risques devaient se concrétiser et conduire à une nouvelle menace de déflation, la BNS «prendrait des mesures nécessaires pour sauvegarder la stabilité des prix», prévient-elle.

Dans le sillage des déclarations de la banque centrale, le franc lâchait du lest, perdant plus d’un centime face à l’euro et au dollar.

La BNS continue par ailleurs à surveiller «avec la plus grande vigilance» l’évolution du marché hypothécaire. L’institut, qui s’est déjà inquiété des dérives du secteur, constate néanmoins que si les activités de crédit restent intenses, « la croissance des prêts hypothécaires et des prix de l’immobilier a légèrement décéléré» par rapport à fin 2009.

Syndicats inquiets

La maintien de la politique monétaire actuelle ne répond en tout cas pas aux préoccupation des syndicats. Mercredi, l’Union syndicale suisse (USS) a demandé que la BNS «prenne le taureau par les cornes» pour combattre un franc trop fort.

En effet, la cherté du franc pénalise l’industrie suisse d’exportation, ce qui inquiète d’ailleurs non seulement les syndicats, mais également plusieurs acteurs du monde économique.

Conséquence, les délocalisations de sociétés suisses dans l’Union européenne se multiplient, dénonce l’USS. Ce à quoi s’ajoutent des abus de plus en plus fréquents. Comme par exemple des entreprises qui veulent rémunérer leur personnel en euros ou engager des frontaliers à des salaires inférieurs.

Si la cherté du franc persiste face à l’euro – mais aussi face aux autres devises comme le dollar ou la livre – c’est toute l’économie qui en pâtira. Avec à la clef de très nombreuses pertes d’emplois, voire la menace d’une déflation, a averti l’USS.

Parmi les acteurs économiques, le franc fort inquiète tout particulièrement le secteur du tourisme.

Le directeur de Suisse Tourisme – l’organe faîtier de la branche – Jürg Schmid a déclaré dans la presse craindre un recul des réservations pour la fin de l’automne et pour l’hiver.

En raison de la faiblesse de l’euro, la Suisse est devenue environ 15% plus chère pour les touristes étrangers. Les entreprises actives dans le tourisme ne peuvent pourtant pas se permettre de baisser leurs prix, car toute la branche calcule avec des marges très minces, selon Jürg Schmid.

Jusqu’à la fin juillet, le tourisme suisse a crû de 2,5% par rapport à la même période de l’an dernier, qui était toutefois faible. Le franc fort se ressent sur les réservations avec un décalage de quatre à six mois, selon le directeur de Suisse Tourisme.

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