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Election au gouvernement: pas de révolution de Palais

Le nouveau gouvernement au complet. Keystone

Comme les analystes le pensaient, le Parti socialiste et le Parti libéral-radical (PLR / droite) ont maintenu leur siège au gouvernement. Un exécutif désormais majoritairement féminin. A un an des élections fédérales, les partis n’ont pas voulu une redistribution des cartes.

L’Assemblée fédérale, c’est-à-dire les deux Chambres du Parlement réunies, ont élu mercredi les successeurs des deux ministres démissionnaires Moritz Leuenberger et Hans-Rudolf Merz. Les deux nouveaux élus sont la socialiste Simonetta Sommaruga et le libéral-radical Johann Schneider-Ammann.

Choix de la stabilité

On ne s’attendait pas vraiment à une «révolution» de Palais lors de cette élection complémentaire au gouvernement. Et effectivement, elle n’a pas eu lieu. Socialistes et libéraux-radicaux, qui représentent respectivement les 2e et 3e forces politiques du pays, ont assez facilement maintenu leur siège.

Les Verts et l’Union démocratique du centre (UDC / droite conservatrice) ont bien essayé de brouiller les cartes, mais sans succès. L’échec des écologistes est patent. Encore peu connue sous la Coupole fédérale, leur candidate n’a pas fait illusion très longtemps.

Le candidat de l’UDC a en revanche enregistré un beau succès d’estime. Evidemment, l’idée que les parlementaires acceptent d’attribuer un 3e siège à la droite conservatrice – car pour les élus, la ministre Eveline Widmer-Schlumpf reste bel et bien apparentée à cette mouvance malgré son éviction du parti – était totalement irréaliste.

Le candidat UDC est cependant parvenu à attirer des voix hors de son propre camp et à réaliser de bons scores. Il a ainsi empêché un mano a mano final entre les deux candidates socialistes et les deux candidats libéraux-radicaux.

Des sièges bétonnés

Avec cette double élection, socialistes et libéraux-radicaux «bétonnent» leur second siège gouvernemental et se mettent ainsi à l’abri des conséquences d’une mauvaise surprise lors des élections fédérales de l’automne 2011.

En effet, dans le système politique suisse, sauf scandale, les ministres décident eux-mêmes du moment de leur retrait. Et cela peut durer longtemps, comme l’a montré le socialiste Moritz Leuenberger qui aura passé plus de 15 ans au pouvoir.

Sinon, l’unique possibilité de modifier la composition du gouvernement se présente lors de la première session parlementaire suivant les élections, lorsque les ministres doivent être reconfirmés à leur poste. Mais ces changements sont rarissimes. Au cours des dernières décennies, le cas ne s’est présenté qu’une seule fois, lorsque le Parti démocrate-chrétien (PDC / centre droit) a dû céder un siège à l’UDC.

Sur les ondes des radios et des télévisions, quelques parlementaires ont déploré cette manière de faire, préférant un système ou toute l’équipe gouvernementale serait désignée à l’issue des résultats des élections et accomplirait son mandat durant l’entier de la législature.

La victoire des femmes

Si elle constitue une continuité par rapport à la représentation des partis, cette élection de mercredi marque cependant une page d’Histoire. En effet, pour la toute première fois, les femmes deviennent majoritaires dans le gouvernement. Dans le monde, les gouvernements à majorité féminine se comptent sur les doigts d’une seule main.

Que la Suisse fasse désormais partie de ces pays est donc à souligner, d’autant qu’elle fut la dernière démocratie occidentale à accorder le droit de vote et d’éligibilité aux femmes (1971).

Une page semble donc bel et bien tournée. Si des années durant, la question de la représentation des femmes fut au centre de plusieurs élections au gouvernement, le «tabou» de la majorité féminine est tombé, ce qui clôt une lente évolution des mœurs initiée en 1971.

Mort de la clause cantonale

Au début des années 1990 déjà, les citoyens avaient accepté d’abroger la clause constitutionnelle interdisant à un canton de disposer de deux ministres en même temps. Cette règle restait toutefois dans les têtes.

L’élection de mercredi montre que, là aussi, une page s’est tournée. Les parlementaires n’ont en effet pas été rebutés à l’idée d’élire deux ministres issus du canton de Berne.

Certes, par deux fois déjà, le gouvernement avait compris deux ministres zurichois dans ses rangs. Mais restait à voir si ce qui avait été accordé au canton le plus peuplé et le plus économiquement développé du pays pouvait l’être également à un autre canton. La réponse est désormais tombée.

Des personnes compétentes

Enfin, reste la question de la personnalité des candidats eux-mêmes. Analystes et politiciens ont à plusieurs reprises souligné le fait que socialistes et libéraux-radicaux ont présenté à cette élection des personnes compétentes qui ont déjà fait leurs preuves tant au niveau cantonal que fédéral.

Peut-être un peu plus discret sur le plan politique, le nouveau ministre radical a quant à lui fait ses preuves comme capitaine d’industrie, une qualité généralement très appréciée en Suisse.

Contacté par swissinfo.ch, le politologue Mark Balsiger confirme cette impression. «Le Parti socialiste et le Parti libéral-radical ont mené pendant plusieurs mois un processus de sélection très professionnel et très transparent. Ils ont pu confirmer qu’ils comptent quelques très bonnes personnalités dans leurs rangs.»

Dont acte: les deux nouveaux élus débuteront leurs fonctions avec un capital de confiance élevé. Reste à voir maintenant ce qu’ils en feront dans les faits et, surtout, si cette addition de compétences personnelles suffira à créer un esprit d’équipe au sein du collège gouvernemental, une qualité qui lui a parfois cruellement fait défaut au cours des derniers mois.

Mark Balsiger pense que ce sera le cas. «Je suis optimiste, déclare le politologue. Les deux nouveaux ministres ont le potentiel pour renforcer la collégialité du gouvernement. Ils sont reconnus pour être des figures intégratives qui ne mettent pas leur personnalité au premier plan.»

Depuis 1848, l’Exécutif de la Confédération suisse se nomme Conseil fédéral.

Le Conseil fédéral se compose de sept membres.

Le Conseil fédéral est élu par le Parlement.

Le Parlement ne peut pas démettre le Conseil fédéral tout comme ce dernier ne peut pas dissoudre le Parlement.

Les sept membres du gouvernement prennent leurs décisions en commun.

Les fonctions de président de l’Etat ou de chef du gouvernement n’existent pas en Suisse. Le président de la Confédération, toujours élu pour une période d’un an, préside les séances du Conseil fédéral et assume une fonction protocolaire. Il n’a pas davantage de pouvoir que les six autres membres du gouvernement.

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