Les boursiers de la Maison rouge
New York reste l'une des plus prestigieuses destinations pour les artistes au bénéfice d'une bourse. Une option offerte par une bonne dizaine de cantons suisses. Parmi les boursiers helvétiques qui logent à la Maison rouge, propriété de la comédienne Linda Geiser, figurent Eléonore Dubulluit et Marie-Eve Jetzer.
Concentré de l’imagerie new-yorkaise avec ses briques ocres et ses escaliers en façade, la «Red House» de Linda GeiserLien externe est située dans le Lower East Side, un ancien quartier ouvrier devenu par la suite un des haut-lieux de la contre-culture américaine. C’est durant cette époque rugissante, les années 60, que la comédienne bernoise y a débarqué, avant d’en devenir la propriétaire quelques années plus tard.
Aujourd’hui, l’actrice loue une partie des appartements à ses compatriotes au bénéfice d’une bourse artistiqueLien externe et joue un peu la mère et la conseillère pour ces jeunes Helvètes plongés dans le chaudron new-yorkais. Le quartier, lui, s’embourgeoise à grands pas; une «gentrification» à l’œuvre dans une bonne partie des quartiers pauvres de la ville. Dans son appartement submergé d’objets et de souvenirs collectés depuis près d’un demi-siècle, Linda Geiser accueille volontiers les jeunes artistes suisses, comme la Valaisanne Eléonore Dubulluit, 32 ans, active dans la mise en scène et la création de décors de théâtre et bénéficiaire d’une bourse du canton du Valais.
Tout converge
«A New York, tout est possible et les gens sont très faciles d’accès», s’émerveille la jeune valaisanne, frappée par la différence avec Paris, «une ville où il faut avoir ses entrées et être déjà quelqu’un».
«Ici, les idées et les projets s’affinent et se concrétisent», poursuit Eléonore Dubulluit fascinée par le foisonnement artistique de New York, que se soit dans le domaine théâtral, musical ou dans les arts visuels.
Cette richesse est une nécessité pour la scénographe: «D’ailleurs, l’art contemporain puise dans toutes les formes d’expression. Tout s’y rejoint.»
Une démarche évidente à New York. «Mais cette approche transversale peine à s’imposer en Suisse, précise Eléonore Dubulluit. Les clivages restent importants entre les différentes formes artistiques.»
Cette étape new-yorkaise représente donc un moment décisif dans le parcours de la jeune femme: «Avec ce séjour, je me révèle à moi-même. Et vu le rythme effréné de la ville, c’est difficile de construire des relations durables. On apprend à fonctionner seul.»
Art et business
De fait, il n’est pas facile de s’implanter et vivre durablement à New York. Pour autant, la plasticienne Marie-Eve Jetzer n’envisage pas de rentrer en Suisse: «Plus j’habite à l’étranger, plus la Suisse me semble étrangère.»
Sa bourse du canton de Zoug lui a permis d’y vivre 4 mois avec 7400 francs. Du haut de ses 29 ans, Marie-Eve Jetzer cherche maintenant le moyen de rester le plus longtemps possible à New York. Une ville où elle a déjà séjourné quatre fois et qu’elle préfère à Berlin, haut lieu de la culture en Europe.
«Ici, tout me stimule. Sur le plan culturel, il y a tellement de choses à explorer.» La jeune artiste cherche avant tout à vivre des expériences et voir toutes sortes de travaux. «Je cherche aussi à comprendre comment concilier art et commerce, à quel genre de compromis on peut aboutir», ajoute Marie-Eve Jetzer.
Ce qui n’empêche pas la jeune Suissesse de créer. Pratiquant habituellement la photo, l’installation et la performance, elle a participé à des expositions de groupe, comme à la Flux Factory située dans le Queens, l’un des quartiers qui bordent l’ile de Manhattan, pour une exposition centrée sur l’architecte et peintre Vladimir Tatlin, l’une des grandes figures du constructivisme russe.
Actuellement, Marie-Eve Jetzer travaille à partir de portraits tirés de vieux numéros du célèbre National Geographic et fait reproduire leurs expressions par un modèle qu’elle photographie. «Je cherche à provoquer une émotion chez le spectateur, explique la plasticienne. Cet accès direct à l’œuvre permet ensuite la réflexion.» Une démarche qu’elle oppose à l’art conceptuel trop froid à son goût.
Résidences artistiquesLien externe En Suisse, les cantons sont les premiers pourvoyeurs de bourses pour les artistes. Une quinzaine de cantons offrent la possibilité d’un séjour à New York. Ce stage dure de 4 mois à une année,. Sur le plan fédéral, Pro HelvetiaLien externe permet également des séjours en atelier.
L’Office fédéral de la culture permet également aux artistes de séjourner à New York, notamment dans le cadre d’un projet de collaboration avec la Chine: The artist network.Lien externe
Quelques 20’000 Suisses résident dans les 7 Etats couverts par le consulat suisse Lien externede New York. La plupart vivent dans la mégapole de la côte est. La communauté suisse compte plusieurs centaines d’artistes. La Suisse les soutient via son consulat de New York et son attaché culturel qui fournit conseils, contacts et rencontre.
Fondé en 1986, le Swiss InstituteLien externe permet à des Suisses d’exposer avec des artistes venus d’ailleurs, à commencer par New York. Son nouveau directeur, Gianni Jetzer, facilite également les contacts entre les Suisses et le milieu de l’art new-yorkais.
En 2003, le festival «Swiss peaks» a permis aux New-Yorkais de découvrir un large éventail d’artistes suisses.
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