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Génocide arménien: Perinçek persiste et signe

Doğu Perinçek à Lausanne le week-end dernier. Keystone

Le politicien turc Doğu Perinçek, sous le coup de deux enquêtes pour avoir nié le génocide arménien, compare la loi suisse à celles de l’Inquisition.

Dans une interview à un journal alémanique du dimanche, Perinçek exige la suppression de cette loi. Et répète qu’il n’y a «jamais eu de génocide».

La loi suisse contre le racisme est comparable à une «loi médiévale de l’Inquisition». Elle doit être supprimée, clame Doğu Perinçek dans une interview accordée au SonntagsBlick, édition dominicale du quotidien de boulevard alémanique.

Doğu Perinçek est le leader du Parti des travailleurs turcs, minuscule formation d’extrême-gauche nationaliste, qui a obtenu 0,51% des voix aux dernières élections législatives (novembre 2002), soit très loin du quorum, fixé à 10%. Le parti n’a donc aucun député à la Grande Assemblée Nationale de Turquie.

Ce qui n’empêche pas son chef de juger que la loi suisse contre le racisme «va à l’encontre des droits fondamentaux et de la liberté d’expression». Selon lui, elle fait perdre à la Suisse l’amitié de la Turquie et le respect du monde.

«Il n’y a pas eu de génocide» arménien, répète le politicien dans son interview. Dimanche dernier dans la capitale vaudoise, il avait déjà parlé de «soi-disant génocide arménien» lors de l’anniversaire du Traité de Lausanne, à l’origine de la création de la Turquie moderne en 1923.

«La Suisse est pire que la Turquie»

Doğu Perinçek savait certes que la Suisse avait une norme pénale contre le racisme mais il affirme ne pas avoir vu ses interventions comme une provocation. Il se sent juste tenu par le «devoir de vérité».

Le politicien a comparé la menace d’une condamnation en Suisse avec ses expériences dans les prisons turques. «La Suisse est pire que la Turquie», estime-t-il.

Doğu Perinçek fait l’objet de deux enquêtes en Suisse pour violation de la norme pénale contre le racisme. Une instruction a également été ouverte pour la même raison contre une autre personnalité turque, l’historien Yusuf Halaçoğlu. Ankara a vivement dénoncé ces enquêtes.

L’ambassadeur de Suisse à Ankara, Walter Gyger, a été convoqué mercredi au ministère turc des Affaires étrangères. De son côté, Alev Kiliç ambassadeur turc à Berne a été reçu jeudi, sur sa demande, par le chef de la division politique I du Département fédéral (ministère) des Affaires étrangères (DFAE).

Commission mixte


Dimanche, Alev Kilic s’exprime également dans la presse suisse. Dans une interview à la NZZ am Sonntag, il met en garde contre une limitation de la liberté d’opinion.

«Le fait que les autorités suisses ouvrent de telles enquêtes est un signal grave à l’attention des Turcs qui vivent ou viennent en Suisse. Cela signifie qu’ils doivent se taire», juge l’ambassadeur.

Jeudi, le DFAE a rappelé dans un communiqué que le gouvernement suisse avait toujours déploré et condamné «les tragiques déportations et les massacres» qui ont eu lieu en Arménie à la fin de l’Empire ottoman.

Berne a également salué la proposition d’Ankara de créer une commission mixte d’historiens turcs et arméniens pour étudier cette question. Parmi les institutions fédérales, seule la Chambre basse du parlement a jusqu’ici reconnu officiellement le génocide arménien.

swissinfo et les agences

Entre 1915 et 1918, l’armée turque a déporté ou tué entre 800’000 et 1,8 millions d’Arméniens.
Ces massacres sont survenus dans les dernières années de l’Empire ottoman, qui a cédé en 1923 sa place à la Turquie moderne.
La Turquie n’a jamais reconnu le génocide arménien.
En Suisse, il a été reconnu jusqu’ici uniquement par la Chambre basse du parlement fédéral, par les parlements des cantons de Vaud et de Genève, ainsi que par le gouvernement genevois.

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