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L’arme culinaire de l’ambassadeur de Suisse à Washington

Filets de sole à la General Sherman. Paul Morigi Photography

Une soupe Guillaume Tell, ça vous tente? Ou un Pudding à la Ulysses S. Grant? Ces recettes figurent dans un ouvrage historico-culinaire de Martin Dahinden, l’ambassadeur de Suisse à Washington. De quoi mettre de la saveur dans les relations diplomatiques entre les deux «républiques sœurs».

«Avant d’aller aux États-Unis, je me demandais comment présenter la Suisse en termes culinaires», raconte l’ambassadeur Martin DahindenLien externe, lors d’une visite récente au bureau zurichois de swissinfo.ch.

Le fruit de cette interrogation fait l’objet d’un livre publié en juillet intitulé «Schweizer Küchengeheimnisse: Gesichter und Geschichten hinter bekannten Gerichten», que l’on peut traduire par Secrets de la cuisine suisse: visages et histoires derrière des plats célèbres.

Martin Dahinden, né à Zurich le 8 janvier 1955, est un haut-fonctionnaire et diplomate suisse. Depuis octobre 2014, il est ambassadeur de la Suisse aux États-Unis. Il a été directeur de la Direction du développement et de la coopération (DDC) de 2008 à 2014. Il a dirigé le Geneva International Centre for Humanitarian Demining de 2000 à 2004. asicophoto/Joy Asico

En poste à Washington depuis 2014, Martin Dahinden était convaincu qu’il y avait plus à dire sur le sujet que le chocolat, le fromage et la fondue.

Son livre est un mélange fascinant de recettes – testées par ses invités à l’ambassade – et d’épisodes historiques, agrémenté d’anecdotes épicées racontées par ce diplomate passionné par la cuisine suisse.

Mais comment, avec un poste aussi chargé, a-t-il trouvé le temps d’écrire le livre? «Je me suis toujours intéressé aux questions culinaires. J’avais déjà une collection de recettes avant de commencer le livre qui a ainsi pu être achevé en peu de temps.»

Un Tessinois pionnier

Les recettes figurant dans son ouvrage font partie des menus servis à l’ambassade, fruits d’une collaboration entre Martin Dahinden et son chef cuisinier. «Certains de nos invités ont eu la chance de découvrir ces plats. Ils n’étaient pas des cobayes», relève l’ambassadeur en souriant.

Certains plats étaient faciles à concocter. Mais les anciennes recettes consistent souvent en une simple description, sans les ingrédients et les méthodes de préparation. Ce fut le grand cuisinier suisse Martino RossiLien externe, dit Maestro Martino, qui introduisit à la Renaissance les temps de cuisson dans ses recettes. «C’est fascinant que ce soit un ressortissant de la Suisse, aujourd’hui connue pour son industrie horlogère, qui ait fait cela», commente Martin Dahinden.

Et comme il n’y avait pas de montres à l’époque du Maestro qui fut le cuisinier de deux papes, le temps était calculé en égrainant des Pater Noster.

Héros méconnus

L’ambassadeur a trouvé bien d’autres Suisses ayant marqué l’histoire de la gastronomie, comme Dunand, le chef de Napoléon Bonaparte, et son célèbre Poulet Marengo, (une des recettes préférées de l’ambassadeur) ou les frères DelmonicoLien externe, venus du Tessin, qui ouvrirent à New York en 1827 le premier restaurant gastronomique du pays. 

Le Poulet Marengo. Photo by Scott Suchman

Plus récemment, Henry Haller fut le chef cuisinier de cinq présidents américains, de Johnson à Reagan, combinant habilement des plats suisses avec les goûts des différents présidents et de leur famille.

Beaucoup de ces graoques restent pourtant méconnues. Raison pour laquelle l’ambassadeur parle des secrets de la cuisine suisse.

Ces grands cuisiniers font souvent preuve de compétences typiquement suisses comme la précision et l’organisation, parfois même de manière obsessionnelle. Cela se reflète dans la triste histoire du chef suisse de Louis XIV, François Vatel, dont on dit qu’il s’est tué après le retard d’une commande de poisson frais pour les fêtes de la cour.

Cuisine et diplomatie

Cela dit, rappelle Martin Dahinden, il n’y a pas de cuisine nationale suisse, contrairement à la France ou l’Italie. Car la Suisse n’a pas connu de cour royale, comme Versailles. Par contre, la Suisse connaît un grand nombre de cuisines régionales influencées par les pays voisins.

Mais les plats suisses n’en font pas moins une excellente diplomatie culinaire. Martin Dahinden «aime faire des plats qui peuvent être un point de départ pour la discussion.»

L’ambassade de Suisse à Washington a les portraits des généraux vainqueurs de la guerre civile américaine, tel William T. Sherman et le général Robert E. Lee, peints par l’artiste suisse Frank Buchser. Martin Dahinden a également été heureux de découvrir que les Delmonico avaient utilisé ces personnalités pour nommer certains de leurs plats, comme le Filet de Sole à la General Sherman.

Ce qui a permis à l’ambassade d’organiser un événementLien externe pour évoquer les points communs entre les États-Unis et la Suisse, souvent qualifiés de républiques sœur en raison de la similitude de leurs institutions fédérales.

Pudding à la U.S Grant Paul Morigi Photography

Une autre spécialité culinaire de l’ambassade, créée également par les Delmonico, est le Pudding à l’Ulysses S. Grant, du nom du 18e président des Etats-Unis.

Des recettes mettant en vedette le chocolat ou le birchermuesli (mélange de céréales, de fruits secs et de lait ou yaourt) figurent également dans le livre qui devrait être traduit en anglais et en français, espère le diplomate.

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Traduit de l’anglais par Frédéric Burnand

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