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Genève soigne les victimes de tortures

La torture frappe sans distinction de race, de sexe, d'âge. Ici un jeune homme de 16 ans de Papouasie-Nouvelle-Guinée victime de graves sévices en 2004. Keystone

Les hôpitaux universitaires de Genève et la Croix-Rouge suisse proposent une consultation pour les victimes de tortures.

Il s’agit non seulement de les soigner physiquement mais aussi de les suivre psychologiquement pour que les réfugiés puissent se réinsérer dans la société.

A la question: «Avez-vous été torturé?», un réfugié sur cinq actuellement en Suisse répond affirmativement. C’est le cas de Clark, 31 ans, originaire de la République démocratique du Congo, l’ex-Zaïre, arrivé en novembre 2004 dans la Confédération.

Pendant quatre ans, il a été régulièrement torturé dans sa prison, notamment à l’électricité. Les gardiens le piétinaient, lui jetaient des produits toxiques dans les yeux. Résultat, il ne souffre pas seulement de douleurs dans le dos, il se plaint de violents maux de tête et d’hypertension.

«Souvent, les réfugiés souffrent davantage de séquelles de violence que de maladies tropicales», constate le docteur Laurent Subilia, à l’origine de la consultation organisée depuis quelques semaines au Centre Santé Migrants à Genève.

«Cette consultation ne se contente pas de soigner les corps, des psychologues aident aussi les requérants, brisés par la violence, à retrouver des compétences sociales», ajoute ce médecin, membre du Conseil de l’International Rehabilitation Council for Torture Victims (IRCT), dont le siège est à Copenhague.

Des sévices pratiqués en Irak

Le Danemark est pionnier dans cette médecine qui ne consiste pas seulement à dépister la tuberculose et à vacciner contre l’hépatite B, elle propose des traitements coordonnés: somatique, psychologique, psychosocial.

La consultation, menée par deux médecins et deux psychologues, est financée à la fois par les Hôpitaux universitaires de Genève, la Croix-Rouge suisse, et par un Fonds des Nations Unies contre la torture.

«Il y a dix ans, tout le monde condamnait la torture. Aujourd’hui, ce n’est pas aussi net. Les images prises en Irak montrent que même des pays démocratiques comme les Etats-Unis ont recours à ce genre de violence», déplore le docteur Subilia.

«Ils ont tué ma femme, battu ma mère»

Sa consultation, donnée au Centre de Santé Migrants à Genève, accueille déjà une centaine de patients. Pas seulement des requérants et des réfugiés. Il traite aussi des membres d’ONG qui ont besoin d’un soutien psychologique après des missions particulièrement éprouvantes.

Comme au Sierra Leone où certains combattants n’hésitaient pas à couper les bras des enfants et même des nouveaux-nés.

Clark, le requérant congolais, était assistant médical à Kinshasa. Son seul tort était d’être marié à une Rwandaise. Le régime de Kabila donnait la chasse à tous les Rwandais.

«Les policiers ont tué ma femme, ma mère est morte d’une crise cardiaque après avoir été sauvagement battue, le reste de ma famille a été contraint à l’exil, et je n’ai plus revu ma fille, cachée par des religieuses, depuis des années», raconte Clark.

swissinfo, Ian Hamel

18 % des réfugiés en Suisse ont été torturés dans leurs pays
61 % d’entre eux ont des antécédents traumatiques (guerre, famine)

Laurent Subilia: Docteur en médecin, spécialiste en médecine tropicale

– 1988 : Chef de clinique, unité de médecine des voyages et des migrations

– 1998 : Consultation interdisciplinaire de médecine et de prévention de la violence

– 2005 : Consultation pour victimes de torture et de guerre

Centre Santé Migrants, 89, rue de Lyon à Genève.

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