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GeoGeny menace la sphère privée

GeoGeny permet de localiser les employés à tout moment. Keystone

Sunrise est prête à commercialiser un service de géolocalisation à partir de téléphones mobiles.

Comme toute innovation technologique, ce service offre des avantages mais n’est pas exempt de risques, en particulier pour la protection des données.

Testé durant le Festival de Jazz de Montreux pour localiser les agents de sécurité et l’opération Nez rouge, pour aider les conducteurs bénévoles à se diriger, un service de géolocalisation va faire son apparition en Suisse.

Grâce à un récepteur GPS (Global Positioning System) satellite inséré dans un téléphone portable, les utilisateurs pourront en tout temps être localisés avec une précision oscillant entre 3 et 10 mètres.

L’opérateur de téléphonie Sunrise s’apprête en effet commercialiser ce service, peut-on lire dans les colonnes du quotidien Le Matin. Baptisé GeoGeny. Il permettra, par exemple, à une entreprise de localiser ses employés par le biais de leur téléphone portable.

Les premières applications qui viennent à l’esprit concernent l’aide aux employés actifs sur le terrain. Ils pourront ainsi gagner du temps en demandant à la centrale de les aider à trouver tel ou tel bâtiment, car la signalisation routière n’est pas toujours des plus simples.

Des abus à redouter

«Pour un agent qui se déplace à pied, le portable permet par exemple d’envoyer des signaux d’alarme en cas de problème et la centrale le localise immédiatement», explique Christophe Privet, collaborateur de CPR Groupe, la société qui développe GeoGeny.

Mais derrière ce type d’applications, entièrement justifiées, peuvent se cacher d’autres possibilités moins avouables. En effet, grâce à GeoGeny, les entreprises ont désormais la possibilité de suivre les moindres faits et gestes de leurs employés.

On imagine aisément que des parents pourraient suivre leurs enfants à la trace, où même un conjoint soupçonneux, sa tendre moitié. Des comportements qui contreviennent à la législation suisse en matière de protection des données et de respect de la sphère privée.

«Le droit du travail suisse interdit toute surveillance électronique permanente sur le lieu de travail», explique Kosmas Tsiraktsopoulos, porte-parole du préposé fédéral à la protection des données.

Vive controverse juridique

Et compte-tenu du lien de dépendance des employés vis-à-vis de leur patron, des abus pourraient apparaître. «Un employé pourrait être contraint d’accepter un tel empiètement sur sa sphère privée pour conserver son poste de travail, poursuit le porte-parole, et les entreprises devraient étudier d’autres moyens d’optimiser leur processus», poursuit le porte-parole.

«Nous avons établi une charte éthique. Quand on met en route le système, la personne est informée par un signal sonore et visuel. Elle peut couper la liaison quand elle le veut», se défend Christophe Privet.

Sunrise affirme pour sa part que toutes les précautions ont été prises. «On ne peut pas géolocaliser les gens sans leur accord. Au cas où cet impératif ne serait pas respecté, le service n’est pas délivré», explique Mathieu Janin, porte-parole de l’opérateur.

Néanmoins, la lutte qui se prépare devant les tribunaux risque d’être intéressante. D’après le quotidien Le Matin, le tribunal administratif de Genève a condamné en mars dernier une entreprise qui avait installé un système de localisation GPS sur ses véhicules dans le but précis de surveiller ses collaborateurs.

Toujours est-il que certains pays sont moins regardants que la Suisse. En Angleterre, par exemple, plusieurs entreprises offrent un service similaire à celui de GeoGeny. Le débat risque donc d’être chaud.

swissinfo

– Née de la fusion des technologies de la téléphonie mobile et de géolocalisation, GeoGeny est une interface qui permet l’échange de sons et de données par le biais d’un centre de contrôle externe.

– Destiné prioritairement aux services d’urgences, aux transports publics ou aux agents de sécurité, ce système permet à une centrale, en plus du contact audio, de connaître avec précision (3à 10 mètres), la position géographique de l’interlocuteur.

– Ce contact en temps réel permet d’améliorer la sécurité des personnels sur le terrain, de réduire les coûts grâce à une meilleure rationalisation des opérations et d’améliorer la qualité du service.

– Dans le même temps, des voix s’élèvent pour contester une surveillance permanente qui porterait atteinte au respect de la sphère privée garanti par la législation suisse.

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