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Gottardo 2020, un événement tourné vers l’avenir

«Gottardo 2020 - au cœur des Alpes» est le nom du rapport qu'un groupe d'experts chargés de définir les contours de la prochaine exposition nationale viennent de présenter à Bellinzone. Ouverture, développement durable et avenir sont les maîtres mots de l'événement.

«Depuis le refus essuyé par le Tessin en 1998 [voir ci-contre «expositions nationales»], je n’ai jamais cessé de penser à un tel événement», souligne Marco Solari, président du Comité stratégique de la manifestation. Ce qui explique son plaisir non dissimulé au moment de présenter les grandes lignes de l’événement devant le Conseil d’Etat (gouvernement) tessinois

«Il ne s’agit pas d’un regard tourné vers le passé, empreint de nostalgie. Ce n’est pas non plus une autocélébration – insiste le président – mais bien une fenêtre ouverte sur l’avenir, destinée avant tout à la nouvelle génération, qui sera européenne».

De fait, ce projet couvé au cœur des Alpes, profondément helvétique, respire néanmoins l’air du large par son caractère international. A cela s’ajoute que le massif rocheux du Gothard, berceau de mythes et d’idéaux patriotiques, symbolise aussi le trait d’union entre le Nord et le Sud de l’Europe.

«Gottardo 2020», ajoute Marco Solari, «veut mettre en évidence la dimension européenne d’AlpTransit, qui rapprochera considérablement le Nord de l’Europe du bassin méditerranéen». L’événement veut aussi être un projet dont le développement doit partir du bas vers le haut, à l’écoute des citoyens. C’est la raison pour laquelle les acteurs publics régionaux sont invités à y prendre une part active.

A la fois global et local

Le groupe d’experts, coordonné par Jean-Daniel Mudry, a défini trois objectifs. En premier lieu, Gottardo 2020 – qui implique les cantons du Tessin, du Valais, des Grisons et d’Uri dans cette première phase – doit être un événement ancré dans le territoire et utile à la relance économique des régions de montagne. Il doit s’agir d’une manifestation helvétique, qui contribue à redéfinir la cohésion nationale, en revisitant par exemple l’histoire et les mythes de la patrie.

Grâce à AlpTransit, qui incarne la mobilité du futur à l’échelle continentale, l’événement prend une envergure internationale et permettra aux régions et aux métropoles européennes de se réunir pour célébrer un nouveau rapprochement géographique et poser de nouveaux jalons communs.

«A la base de tout, souligne Jean-Daniel Mudry, il y a un principe fondamental qui doit servir à calibrer toutes les initiatives individuelles, petites ou grandes, qui est celui du développement durable dans la région du Gothard. Un développement décliné en termes économiques, environnementaux et socioculturels», selon le Valaisan.

Pour le président du Conseil d’Etat tessinois, Gabriele Gendotti, «le projet Gottardo 2020, vise à valoriser les spécificités culturelles, sociales, économiques et le paysage de la région alpine qui a joué un rôle historique fondamental pour tout le canton et pas seulement en Léventine».

Un losange, quatre portes ouvertes

Pour atteindre ces objectifs ambitieux, le rapport Gottardo 2020 présente un projet articulé autour d’une structure originale: quatre portes d’entrée sur un espace géographique commun; un point de départ à la découverte de la montagne; le village d’exposition et enfin, le cœur de la montagne.

Les quatre portes d’entrée de l’événement sont incarnées par autant de villes, avec une thématique centrale pour chacune d’elle, soit la culture qui va au chef-lieu tessinois de Bellinzone; l’énergie à Brigue en Valais; la mobilité illustrée par Lucerne et la nature par la capitale grisonne de Coire. Quant à Flüelen, dans le canton d’Uri, la bourgade représente le point de départ à la découverte de la montagne et souligne aussi le point central de la manifestation qu’est le massif du Gothard.

Le village de l’exposition doit être érigé aux points des deux portails de la galerie ferroviaire d’AlpTransit, à Erstfeld (Uri) et à Biasca (Tessin). Et c’est dans ce dernier village que les visiteurs auront l’occasion de vivre l’ensemble de cet événement, en partie de manière virtuelle. Le cœur de la montagne (qui s’étire entre Airolo et Andermatt), traditionnel berceau du Réduit Alpin, sera quant à lui attribué à l’armée – dont les infrastructures ne sont plus en service. Elle y dévoilera ses fortifications avec un regard posé sur le présent.

Dans les étoiles, les pieds sur terre

Bien qu’une exposition nationale doivent s’inspirer d’idéaux, de rêves et d’espoirs, la réalité impose néanmoins un certain pragmatisme et un sens du concret. Marco Solari, qui est aussi président du Festival international du film de Locarno le sait bien. Ainsi, le Tessinois, sensible aux prérogatives de la culture et de la créativité, ne perd pas de vue les questions budgétaires.

Un équilibre délicat, mais pas impossible, lorsque les ambitions ne supplantent pas les moyens d’y parvenir. «A travers ce projet, nous voulons adopter une stratégie modulaire, qui assure d’abord le financement de la structure de base, avant de passer graduellement au développement des contenus, ceci afin d’éviter les surcoûts», précise-t-il.

C’est donc avec les deux pieds sur terre mais la tête dans les étoiles que le Comité stratégique s’apprête à empoigner son bâton de pèlerin pour présenter prochainement son projet devant le Conseil fédéral (gouvernement national).

Et si d’aventure ce dernier n’était pas réceptif, qu’adviendrait-il de l’événement? «Une exposition nationale qui ne jouirait pas de l’appui de Berne n’a pas de raison d’exister», répond Gabriele Gendotti. «Si le pays ne veut pas d’Expo Gottardo 2020, conclut Marco Solari, cela voudrait dire qu’il n’a plus la force de croire et de réaliser des projets. Nous devrions en prendre acte car un tel refus serait lourd de sens».

Françoise Gehring, swissinfo.ch
(Traduction de l’italien: Nicole della Pietra)

Officiellement, la première exposition nationale s’était déroulée en 1883 à Zurich. Les éditions successives ont eut lieu à Genève en 1896, à Berne en 1914, à Zurich en 1939, à Lausanne en 1964, et en 2002 conjointement à Bienne, Neuchâtel, Yverdon-les-Bains et Morat.

La tradition des expositions nationales remonte à l’Exposition des beaux arts et de l’industrie, organisée à Berne en 1804 et sur laquelle s’était greffée la troisième Exposition suisse de l’artisanat et de l’industrie de 1857.

Jusque vers le milieu du 20e siècle, le consensus autour du sens et du mandat des expositions nationales était plus ou moins large. Plus tard, des controverses diverses sont apparues, en 1964 notamment. Pour les uns, l’événement était résolument trop traditionnel et élogieux, pour d’autres trop futuriste ou critique.

Le débat avait aussi jalonné les préparatifs de la sixième exposition nationale prévue en 1989, finalement renvoyée en 1991 et coïncidant ainsi avec le 700e anniversaire de la Confédération.

Un nouveau projet proposé par le Tessin en 1998 s’était révélé irréalisable. Et c’était finalement le projet dit «des trois lacs» qui avait été retenu. Il avait donné lieu à expo.02.

Etude. «Gottardo 2020, au cœur des Alpes» est un projet de faisabilité en vue de la réalisation d’une exposition nationale à l’horizon de 2020, au pied du massif du Gothard. Quatre cantons ont été impliqués dans cette phase initiale: le Tessin, le Valais, Uri et les Grisons.

Solari. Au départ, l’idée a été lancée par Marco Solari (président du Festival international du film de Locarno), lequel a proposé il y a deux ans de valoriser l’inauguration de la Nouvelle Ligne Ferroviaire Alpine (NLFA) prévue en 2018 en lui consacrant une exposition nationale.

Idée. Ce projet serait une occasion, selon l’ex-délégué du 700e anniversaire de la Confédération, de relancer la cohésion nationale et la solidarité entre les générations et les peuples.

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