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Haro sur la volaille chinoise

Sur une demande totale de 66 000 tonnes de produits à base de poulet, 13 000 tonnes proviennent de Chine. Keystone

L'Union suisse des paysans exige une interdiction des importations de volailles chinoises et un alignement sur la politique européenne.

Redoutant un nouveau scandale alimentaire, l’Union suisse des paysans (USP) a exigé lundi que la Suisse adopte les mêmes restrictions que celles appliquées aux fournisseurs mis à l’index par l’Union européenne.

En janvier, ayant décelé deux lots douteux de volaille chinoise, Bruxelles avait en effet décrété une interdiction générale, qui devrait entrer en vigueur le 15 mars.

Intensification des contrôles

Du coup, Berne a intensifié ses contrôles et, la semaine dernière, le laboratoire cantonal de Bâle-Ville a décelé pour la première fois des teneurs en antibiotique trop élevées dans deux produits importés par Coop.

La chaîne n’avait plus qu’à retirer de la vente tous les produits à base de poulet chinois. Ce qu’elle a fait. De son côté, Migros maintient ces denrées dans ses magasins mais va renforcer les contrôles.

Explications de Roland Dousse, chef du département viande et hygiène de la Migros: «Nos producteurs sont sous contrôle permanents et les vétérinaires de frontières n’ont rien trouvé dans nos arrivages. Nous n’avons donc aucune raison de stopper les importations de Chine.»

Plus de transparence

Roland Furrer, porte-parole de l’USP, ne cache pas son inquiétude: «Nous exigeons que l’Office vétérinaire fédéral (OVF) et l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) interdisent toute importation jusqu’à ce que tout risque pour la santé des consommateurs soit exclu. Nous ne comprenons pas que Berne ne prenne pas les mesures qui s’imposent et ne coordonne pas son travail avec Bruxelles.»

L’USP dénonce surtout le manque de transparence de Berne. Il y a deux semaines, l’OVF avait annoncé que deux fournisseurs chinois (sur huit) ne répondaient pas à ses exigences sanitaires. Mais ces analyses avaient été faites en automne déjà et c’est sous la pression des médias que l’Office a fait cette annonce.

Pour Roland Furrer, «ce manque de transparence est inacceptable. Nous ne savons pas dans quelles conditions se font les tests, ni quels sont leurs résultats.»

A Berne, pas d’affolement

A l’OVF, Urs Zimmerli rétorque: «Outre les analyses faites par les laboratoires douaniers, nous procédons régulièrement à des tests au hasard et c’est tombé sur la Chine. Mais de là à soupçonner toutes les denrées alimentaires chinoises, y compris les crevettes, c’est une décision impossible à prendre. Il nous faut des éléments plus spécifiques que ça.»

A l’OFSP, Roland Charrière, est tout aussi dubitatif: «Nous sommes en train d’effectuer de nouvelles analyses cette semaine et si nous trouvons de nouveaux échantillons positifs, nous prendrons des mesures. Mais il est exclu d’interdire toute importation de Chine sans des résultats très parlants.»

Roland Charrière n’en dit pas plus. De son côté, la Fédération romande des consommateurs juge ces mesures insuffisantes. La FRC estime, elle aussi, que la Suisse devrait se montrer aussi rigoureuse que l’Union européenne à l’égard de la volaille chinoise aux antibiotiques.

La politique n’est pas loin…

De son côté, l’USP veut «à tout prix éviter un nouveau scandale alimentaire qui, inévitablement, toucherait également la production de volailles indigènes».

Car l’enjeu est de taille. Sur une demande totale de 66 000 tonnes de produits à base de poulet, 13 000 tonnes proviennent de Chine. «Les produits chinois sont aussi bons que les suisses, estime Roland Dousse, et les choses sont plus compliquées que cela.»

Et c’est là que l’on rejoint la politique. Pékin a d’ores et déjà déposé une plainte contre l’UE auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour ériger des barrières techniques au libre-échange.

Selon certaines sources, l’UE a pris une mesure de rétorsion contre la Chine, laquelle a interrompu les importations de porc européen en raison de la peste porcine.

Les tractations battent leur plein et, jusqu’au 15 mars, les importations continuent vers l’Europe. Une fois de plus, le consommateur est aussi impuissant… qu’un poulet de batterie.

Isabelle Eichenberger

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