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Heidi 01: un mythe démonté, puis reconstruit

http://www.heidi01.ch/english/aus_strauhof_fs.htm

Heidi est de retour à l'occasion du 100ème anniversaire de la mort de son auteur, Johanna Spyri. Entre autres manifestations, une exposition, à Zurich, met en scène la petite fille devenue à la fois superstar, phénomène commercial et mythe littéraire. Une sorte, aussi, de réhabilitation.

Le bois qui craque dans la cuisine du chalet du grand-père. Le parfum du lit de paille. Les cris des bergers. La froideur et la sévérité de la chambre de la grande ville. A travers quatre tranches d’un décor qui mêle reconstitution et abstraction, c’est par les sens que l’exposition présentée au Strauhof de Zurich nous emmène dans le monde de Heidi.

Peut-on vraiment mesurer le succès mondial de la petite orpheline qui vit sur l’alpe avec son grand-père et garde les chèvres avec son ami Pierre? «Heidis Lehr- und Wanderjahre», le premier volume, paraît en 1879. L’histoire écrite par la Zurichoise Johanna Spyri a aujourd’hui été vendue à plus de 50 millions d’exemplaires, traduite en plus de 50 langues.

A cela il faut ajouter les nombreuses versions cinématographiques – de celle de Hollywood, en 1937, avec Shirley Temple, à celle de Markus Imboden, sortie cette année, en passant par celle de Luigi Comencini, en 1952 – les dessins animés, les pièces de théâtre, les BD, sans oublier l’Internet.

Mais le but de l’exposition est d’aller au-delà de l’histoire, pour faire le tour du phénomène. Elle passe ainsi en revue, avec beaucoup d’humour, l’enjeu touristique («Heidiland» est une marque déposée, exploitée dans la région de Bad-Ragaz) et les innombrables exploitations commerciales de Heidi. Celles qui jouent à fond les clichés, du fromage fondu aux boîtes à musique.

Mais celles aussi, plus récentes, qui relisent Heidi à la lumière des valeurs à la mode: nature, santé, indépendance, authenticité. C’est que, de plus, le kitsch ne semble plus faire peur. «On a découvert que l’on pouvait lire Heidi avec humour, avec ironie, mais sans la détruire», fait remarquer Elke Wurster, étudiante au Séminaire d’ethnologie de l’université de Zurich, qui est à l’origine de cette exposition.

Ses auteurs ont d’ailleurs une thèse pour expliquer l’intérêt que l’on porte encore au personnage de Heidi. Elke Wurster: «Comme à l’époque où l’histoire a été écrite, celle de l’industrialisation, on vit aujourd’hui, avec la globalisation, la digitalisation, une période de changements, d’incertitude. Heidi, elle, réconcilie la nature et la culture, la ville et le village, les pauvres et les riches, les jeunes et les vieux».

«Ainsi, quand la crise vient de l’intérieur, la société se cherche des mythes féminins, poursuit l’ethnologue. Par contre lorsque les difficultés viennent de l’extérieur, comme lors de la Seconde Guerre mondiale, on a besoin de héros masculins, combatifs, comme Guillaume Tell».

Heidi vaut en tous les cas la peine d’être redécouverte, grâce à cette exposition qui réussit, en outre, le tour de force de s’adresser tant aux adultes, qu’aux enfants. Elle sera ensuite montrée à Bad Pfäfers, puis à l’étranger. Avant de s’arrêter, l’été prochain, au château de Prangins, l’antenne romande du Musée national suisse.

Pierre Gobet, Zurich

«Heidi: mythe, marque, star médiatique», au Strauhof de Zurich, Augustinergasse 9, du 22 mai au 5 août.

Deux autres expositions lui sont associées, au siège zurichois de l’Institut suisse de littérature pour la jeunesse et au Musée Johanna Spyri, à Hirzel.

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