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Il reste beaucoup à faire pour le Darfour

Micheline Calmy-Rey lors de sa visite à El Fasher, dans la région du Darfour. Keystone

De retour d’une visite de cinq jours au Soudan, la cheffe de la diplomatie suisse s'est réjouie des efforts qui ont été entrepris pour améliorer l'aide aux victimes du Darfour.

Pour autant, estime Micheline Calmy-Rey, la réponse reste très insuffisante.

En visitant les camps de déplacés au Darfour, la ministre suisse des Affaires étrangères a été témoin du manque de capacité de l’aide humanitaire.

«Dans plusieurs camps, nous avons vu des cas de malnutrition et le sort de centaines de femmes devenues subitement cheffe de famille», raconte Micheline-Calmy Rey, tout juste de retour du Soudan.

La directrice du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) a aussi constaté l’incapacité du gouvernement à protéger les habitants restés dans leur ville ou village. Ceux-ci sont toujours victimes des milices rebelles ce qui décourage toute idée de retour pour les déplacés.

Le Darfour est déchiré depuis février 2003 par une guerre civile qui a fait environ 10 000 morts et un million de réfugiés, selon l’ONU. Les ONG craignent une famine de grande ampleur.

Khartoum admet la crise



Lors des entretiens, samedi, avec le président soudanais Omar al-Béchir, la délégation suisse s’est réjouie que le gouvernement ait reconnu les problèmes de sécurité et ait pris des mesures d’une part en faveur des populations déplacées et d’autre part pour mettre fin aux activités des milices.

«C’est sans doute le résultat de l’énorme pression internationale sur Khartoum», relève Micheline Calmy-Rey. Mardi, le secrétaire d’Etat américain Colin Powell devait d’ailleurs se rendre au Darfour. Il sera suivi mercredi par le secrétaire général des Nations unies Kofi Annan.

Si l’aide humanitaire reste indispensable pour le court terme, Micheline Calmy-Rey a insisté sur la nécessité de chercher une solution politique pour la région, «un processus qui vient seulement de commencer».

Lors des entretiens avec le gouvernement et les autorités locales, elle a suggéré que l’accord provisoire trouvé pour le Sud-Soudan serve de modèle au Darfour.

Le sujet reviendra à coup sûr lors de la conférence qui réunira des centaines de chefs de tribu et les représentants de Khartoum fin juillet à Nairobi. Les autorités de la province se plaignent d’être lésées par cet accord qui prévoit le partage des ressources pétrolières entre le nord et le sud.

Aide suisse au Sud-Soudan



Le Sud-Soudan, où la Suisse a joué le rôle de «facilitateur», était également au menu du voyage de la directrice du DFAE. Lundi, elle s’est entretenue durant plus de trois heures avec le chef du SPLM (Mouvement de libération du Sud-Soudan), John Garang.

Les discussions ont porté sur l’aide que pourrait apporter la Suisse à la reconstruction de cette région. Berne s’est notamment profilée pour la mise sur pied d’institutions politiques. Des projets de développement seront également nécessaires dans cette région dépourvue d’infrastructures.

L’accord provisoire, signé le 5 juin au Kenya, prévoit notamment que le SPLM gardera son armée, qu’il bénéficiera de 50% des revenus du pétrole et qu’il recevra une part des impôts.

Une commission internationale sera chargée de superviser l’accord de paix, qui devrait être signé en août. Depuis trois ans, 230 000 personnes sont rentrées au Sud-Soudan.

Des situations très différentes



Au plan politique, la Suisse s’est beaucoup investie depuis dix ans pour trouver une issue à la crise. «La contribution suisse a surtout consisté à amener les partis en présence à s’approcher d’une idée de fédéralisme asymétrique», explique l’ambassadeur Josef Bucher, conseiller spécial pour la gestion des conflits.

La Suisse a également contribué à un rapprochement entre le gouvernement de Khartoum et les rebelles du Sud sur la question du partage des richesses pétrolières.

Mais les mêmes recettes ne peuvent pas être appliquées telles quelles pour le Darfour. Le Sud du Soudan et le Darfour représentent en effet des situations très différentes. Le Sud possède par exemple sa propre armée et a les moyens d’imposer sa quasi-indépendance.

Rien de tel pour les trois conflits régionaux qui se déroulent au Nord du Soudan – dont celui du Darfour. «Pour deux de ces conflits, on a trouvé une solution consistant en une autonomie à l’intérieur du Nord», rappelle l’ambassadeur.

«Au Darfour non plus, on ne parle pas de séparation, ajoute-t-il. On pourrait donc aussi y appliquer le même modèle d’autonomie que dans les deux autres régions du Nord.»

swissinfo et les agences

– Les ONG affirment que le Soudan soutient les tribus arabes qui mènent une épuration ethnique contre les populations noires dans la région du Darfour.

– La crise a déjà fait quelque 10.000 morts et un million de réfugiés.

– La Suisse a déjà débloqué 6,4 millions de francs en faveur des victimes. Il entend verser 10 autres millions.

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