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Jean-Luc Godard statufié de son vivant à Tokyo

Le cinéaste suisse se veut un marginal. Cela ne l'a pas empêché de faire le voyage de Tokyo pour recevoir le «Praemium Imperiale».

Au lendemain de la remise de ce prix équivaut au Nobel pour les Arts, Jean-Luc Godard explique pourquoi il l’a accepté.

Esprit provocateur, pourfendeur de la bourgeoisie, cinéaste hors normes, Jean-Luc Godard a prouvé, à Tokyo en acceptant ce prix qu’il sait tolérer les honneurs de ceux qu’il éclaire souvent d’une lumière crue dans ses films.

Il n’a même pas su refuser une audience auprès de l’empereur Akihito et l’impératrice Michiko qui apportent leur caution à ce prix prestigieux.

L’attrait de l’argent

Considéré comme la figure la plus complexe et la plus innovante du cinéma depuis un demi-siècle, Jean-Luc Godard ne cache pas que les 190 000 francs attachés à ce prix ne manquaient pas d’attrait.

«C’est vrai, il y avait un aspect financier qui n’était pas inintéressant. Nous sommes une petite société de production de films pour laquelle il n’est pas facile de vivre», déclare Jean Luc Godard.

Et d’ajouter que s’il a accepté ce prix, «c’est aussi pour remercier les compagnies japonaises qui prennent, régulièrement, nos films au Japon. Sinon, je n’aime pas beaucoup cela».

Toutes les célébrités qui comptent au Japon mais aussi en Europe – comme l’ancien Premier ministre britannique Edward Heath – ont rendu hommage à l’auteur de «Pierrot le fou», «A bout de souffle», «la Chinoise» ainsi qu’à quatre autres lauréats dont l’architecte Norman Foster.

L’empereur du Japon n’en a pas vu un seul

Jean-Luc Godard, statufié de son vivant! Cela le laisse perplexe. «Mes films ne sont pas connus. J’ai fait 104 films depuis cinquante ans. Mais la plupart des gens ne les ont pas vus. Je suis certain que l’empereur du Japon n’en a pas vu un», observe le réalisateur suisse.

La revue de cinéma japonaise «Kinema Jumpo» a publié, il y a un an, une enquête sur les meilleurs metteurs en scène de toute l’histoire du cinéma. Les critiques japonais ont placé Jean-Luc Godard au troisième rang derrière Hitchcock et Fellini. Mais, tout de même, devant Chaplin.

Pour Hayao Shibata, le distributeur de ses films au Japon depuis trente ans, Jean-Luc Godard est «le cinéaste le plus important à suivre. Il ne déçoit pas. Il n’est pas facile à comprendre tout de suite, mais toujours innovant».

Le temps d’une conférence de presse dans un grand hôtel de Tokyo Jean-Luc Godard aura attiré plusieurs dizaines de journalistes et de critiques fascinés par ce peintre et poète de la «Nouvelle Vague» qui est toujours allé au-delà de ce que le cinéma donne à voir.

«Comme je suis un peu rebelle, j’aime bien faire ce qui ne se fait pas. Et dans le cinéma, c’est plus facile que dans la peinture et la littérature. On peut apporter une façon unique de montrer le monde réel», a souligné le réalisateur suisse après son audience au palais impérial.

swissinfo/Georges Baumgartner à Tokyo

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