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Jean-Pascal Imsand, première rétrospective

«Flatiron, New York 1992», de Jean-Pascal Imsand. Fondation Jean-Pascal Imsand/Lookat

Dix ans après sa mort, Jean-Pascal Imsand est à l’honneur à la Fondation suisse pour la photographie à Winterthour.

Parallèlement, John Waters, «le pape du trash», et Arnold Odermatt, le gendarme-photographe des années 50, sont exposés au Fotomuseum.

Trois expositions qui ne pourraient pas, à première vue, être plus dissemblables: avec John Waters, Arnold Odermatt et Jean-Pascal Imsand, le Fotomuseum et la Fondation suisse pour la photographie présentent jusqu’au 22 août un trio pour le moins disparate.

Quoi de commun en effet entre les délires d’un cinéaste déjanté, les clichés d’un policier-photographe et les sombres et poétiques images d’un jeune photographe mort tragiquement à l’âge de 34 ans?

La volonté de suivre sa voie, sans égards pour le «bon goût» ou pour la norme, la quête d’un absolu inaccessible, font cependant se rejoindre ces trois démarches si différentes.

Chemins de traverse

Né en 1960 à Lausanne, Jean-Pascal Imsand, fils du photographe Marcel Imsand, a poursuivi ses rêves et ses visions en en supportant ce qui apparaît, à la vision de ses images, comme une douleur permanente.

Cette première rétrospective, dix ans après sa mort, permet d’essayer de comprendre les chemins de traverses empruntés par le jeune homme, de Lausanne à Zurich, en passant par Paris et New York.

Exemple de coproduction réussie (avec le Musée de l’Elysée à Lausanne et la Galleria Gottardo de Lugano), l’exposition voulue par la Fondation Jean-Pascal Imsand de Zurich, offre un choix très pertinent parmi les tirages soignés du photographe.

Formé comme imprimeur-typographe, Jean-Pascal Imsand maîtrisait les techniques du collage, et savait donner à ses images un souffle aussi visionnaire que dépressif.

Le «flat iron» de New York échoué sur un bord de mer, l’aigle-cathédrale planant sur le lac Léman sont saisissants de beauté. Réalisés dès 1985, ces photomontages vaudront au jeune homme le «Grand prix européen de la photographie» en 1988 à Arles.

Son épouse, Sabina Scullari, sa muse et son modèle, éclaire de sa beauté toutes les étapes du photographe. A travers un portrait, elle est aussi pratiquement la seule image joyeuse de l’exposition.

Jean-Pascal Imsand ne s’est pas contenté de rêves et de montages oniriques. Il a aussi dirigé son appareil sur des réalités autrement plus brutes, comme le travail des saisonniers ou la scène de la drogue du Letten à Zurich.

Un livre inachevé, consacré au Kreis 5 de Zurich où il vivait, est esquissé sous la forme de maquettes qui laissent entrevoir ce que cet ouvrage aurait pu devenir.

Autre monde… déjanté

En face de la Fondation, dans les locaux du Fotomuseum, deux autres expositions plongent le visiteur dans un tout autre monde.

Celui, d’abord, du cinéaste américain John Waters, surnommé le «pape du trash» par l’écrivain William Burroughs, et réalisateur notamment de «Hairspray», «Cry-Baby», «Serial Mom» et «Cecil B. DeMented».

L’homme ne recule devant aucune expression de ce qu’on appelle communément le mauvais goût, mais, surtout, il voue un amour encyclopédique à l’histoire du cinéma, à ses chefs d’œuvres comme à ses séries B, mais aussi aux affiches et à tous les objets dérivés, qu’il photographie et juxtapose.

Les thèmes de rapprochement sont aussi divers que le cri féminin, le temps des WC, ou le décolleté, avec ou sans collier, de Dorothy Malone.

L’exposition «Change of life» a été préparée par le Fotomuseum en collaboration avec le New Museum of Contemporatry Art de New York.

Du trash aux vrais accidents

Du «trash» cinématographique et coloré, le visiteur passe ensuite aux accidents réels, vus en noir et blanc.

Durant plus de quarante ans, de 1948 à 1990, le policier-photographe Arnold Odermatt s’est rendu sur les lieux de carambolages (titre de l’exposition), pour immortaliser les résultats de sorties de route et autres collisions.

Ce qui ne devait être qu’un service documentaire et factuel s’est transformé, grâce au talent et au regard de l’agent Odermatt, en instantanés d’une grande beauté – malgré les drames racontés.

Les voitures en train de s’enfoncer dans le lac des Quatre-Cantons après une chute, les carcasses renversées et les traces à la craie blanche pour reconstituer les faits pourraient même avoir été composées par un cinéaste… si toutes ces scènes n’étaient pas dramatiquement réelles.

swissinfo, Ariane Gigon Bormann, Winterthour

– Le Centre pour la photographie (Fotomuseum + Fondation suisse pour la photographie) de Winterthour présente trois expositions jusqu’au 22 août prochain.

– La Fondation propose la première rétrospective consacrée à Jean-Pascal Imsand (1960-1994), en collaboration avec le Musée de l’Elysée de Lausanne et la Galleria Gottardo de Lugano.

– Les célèbres photomontages poétiques de l’artiste sont présentés aux côtés de ses travaux de reportage et de ses portraits.

– Le Fotomuseum, de son côté, expose les collages ou séquences photographiques nés de l’imagination débridée du cinéaste américain John Waters (exposition «Change of life»).

– Enfin, l’exposition «Carambolages» montre les clichés que le policier-photographe Arnold Odermatt a réalisés dans les années 50 et qui sont des témoignages saisissants tant d’une réalité disparue que de la violence des chocs automobiles.

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