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John Fogerty à Montreux: «Proud Mary» en v.o.

John Fogerty, duel rock à Montreux.

Une légende du rock était jeudi à Montreux. L'Américain John Fogerty, qui fut le leader du groupe «Creedence Clearwater Revival». Flamboyant. Auparavant, Status Quo a efficacement débité son rock au kilo.

Il y a exactement quarante ans, «Creedence Clearwater Revival», CCR pour les fans, jouait au festival de Woodstock. Creedence, le groupe le plus populaire de la fin des sixties aux Etats-Unis.

Mais le leader du groupe, le chanteur-guitariste-auteur-compositeur John Fogerty, ne souhaita pas que la prestation de son groupe figure sur les produits dérivés de la manifestation, album et film.

Erreur de jugement peut-être, au vu de la dimension «mythique» que prirent la plupart des artistes ayant participé à ce festival de tous les superlatifs, de Carlos Santana à Jimi Hendrix en passant par les Who ou Joe Cocker.

John Fogerty a signé des chansons que tout le monde connaît… sans pour autant que chacun, en Europe en tout cas, connaisse son nom. Un seul exemple? «Proud Mary», qui participa notamment à la gloire de Tina Turner, c’est lui. Une des chansons qui doit figurer parmi les plus reprises au monde…

Référence ultime: les compositions de Fogerty ont fait dire à Bruce Springsteen: «Creedence n’était pas le groupe le plus branché du monde, il était LE meilleur groupe». Voir John Fogerty, ‘en vrai’, pour la première fois de sa vie n’est donc pas anodin… Mais d’abord, on passe par la case Status Quo.

«Rockin’ All Over the World»

La soirée s’intitule logiquement «Rockin’ All Over the World». Nom d’un célèbre tube de Status Quo? Oui, un tube créé par… John Fogerty, bravo. Et que chacun reprendra ce soir à sa propre sauce, sans se croiser pour autant.

Status Quo démarre devant un Auditorium Stravinsky plein à craquer avec «Caroline», telle qu’en elle-même, c’est-à-dire musclée. Et que dire de la suite? La principale nouvelle, c’est peut-être que Francis Rossi a coupé son légendaire catogan. Et que tout le show est mené par les deux piliers historiques du groupe, Rossi le déjà cité, charmeur et rigolard, et Rick Parfitt, le second guitariste-chanteur.

Ce soir, Status Quo enregistre un DVD à Montreux. Et le concert va embrasser l’ensemble du parcours du groupe. Y compris «Pictures of Matchstick Men», bizarrerie psychédélique millésimée 1966, soit avant que le groupe anglais ne se métamorphose en machine boogie-rock indéboulonnable, et «In The Army Now», qui fit craquer les ados des eighties.

Sinon, une enfilade de titres balancés avec un sens certain de l’efficacité… et de la répétition. Si on ne reste évidemment pas indifférent à l’écoute de «Down Down» ou de «Whatever You Want», ce ne sera pas sans être passé par des moments relevant du sympathique tunnel musical.

Joyeux coup de poing

Exit les Quo, comme on disait à l’époque des pattes d’eph’. Et 45 minutes plus tard, John Fogerty peut entrer en scène, précédé d’un gang de musiciens qui laisse d’abord mûrir la tension…

John Fogerty ne porte plus de chemise à carreau. Son répertoire solo parfois très country, ses 64 ans et ses cheveux trop bruns pour être tout à fait honnêtes pouvaient laisser présager un concert plutôt pépère, pour amateurs d’une Amérique un peu lisse.

Et bien ceux-là seront déçus. Première constatation: John Fogerty reste un «shouter» invraisemblable. Ses derniers albums le confirmaient déjà, et c’est encore plus flagrant en live. Mais où va-t-il chercher cette voix?

Deuxième constatation: le Californien – et non, il n’est pas né dans le bayou – sait toujours mettre le feu à sa Gibson. Ou plutôt à ses Gibson, sa collection de Les Paul semblant particulièrement remarquable. Solos rythmiques façon rock sudiste, picking country, hurlements woodstockiens…

C’est un concert en forme de joyeux coup de poing que donnent Fogerty et sa bande: Kenny Aronoff dans le rôle du batteur-tueur, Hunter Perrin à la basse, Billy Burnette à la guitare, Matt Nolen au Hammond, et Dan Hochhalter aux volutes de violon country.

Un concert qui commence par «Hey Tonight» pour s’achever, évidemment, par «Rockin’ All Over the World» et un monumental «Proud Mary». Entre deux, une vingtaine de titres mêlant le répertoire de CCR et celui de Fogerty solo. Pas de différence majeure entre les deux, puisque presque toutes les chansons de Creedence étaient signées par lui.

«Green River», «Big Train», «Midnight Special», le tout récent «Don’t You Wish It Was True», le magique «Have You Ever Seen The Rain?», «Born in the Bayou», «Down on the Corner», et un énorme «Fortunate Son», pour ne citer que quelques titres…

Un son compact, musclé, et une énergie, comment dire… springsteenienne! Tiens, à propos, Fogerty s’apprête à publier, 36 ans après «The Blue Ridge Rangers», un album de reprises, une suite intitulée «The Blue Ridge Rangers Rides Again». Parmi les invités, un certain Bruce Springsteen. Ainsi que les deux Eagles Don Henley et Timothy B. Schmit.

Moi, je me réjouis. Mais vous faites comme vous voulez, hein?

Bernard Léchot, Montreux, swissinfo.ch

JCF. John Cameron Fogerty est né en 1945 à Berkeley, Californie.

CCR. Il va connaître la célébrité avec le groupe «Creedence Clearwater Revival», né, dont il est le chanteur, guitariste, auteur, compositeur.

Epices. Le style de CCR mélangeait habilement rock, rhythm and blues, blues, country, gospel et musique du bayou.

Classiques. De 1967 à 1972, ce groupe va créer quelques classiques de l’histoire du rock: «Proud Mary», «Have You Ever Seen The Rain?» et publier des reprises célèbres, de «Suzie Q» à «I Heard It Through The Grapevine».

Solo. A la séparation du groupe, John Fogerty entame un parcours solo, country d’abord. Mais sa carrière ne redécolle pas. Il lui faudra attendre 1985 pour connaître à nouveau un succès avec l’album «Centerfield».

Retour. Depuis la fin des années 90, John Fogerty connaît un retour progressif de reconnaissance, au fil de ses albums. «Déjà vu – All Over Again» (2004), «Revival» (2007).

Prochain CD. On annonce pour 2009 un album de reprises avec la participation de Bruce Springsteen ainsi que de Don Henley et Timothy B. Schmit (Eagles).

Politique. John Fogerty a fait en 2004, une série de concerts de soutien au candidat démocratique John Kerry et soutenait Barack Obama lors des dernières présidentielles.

Lycéens. Crée en 1962 dans la banlieue sud de Londres, par trois lycéens, Francis Rossi, Alan Lancaster et Alan Key, le groupe ne trouvera son nom définitif que quelques années plus tard.

Psychédélique. Premier hit en 1966 avec «Pictures of Matchstick Men».

Boogie-Rock. Réorienté boogie-rock dès les seventies, Status Quo vendra des millions de disques en Europe, tout en restant en général boudé par les Etats-Unis.

Seventies. Parmi les albums «historiques»:
– «Piledriver» (1972)
– «Hello!» (1973)
– «Quo» (1974)
– «On The Level» (1974)
– «1+9+8+2 (1982)

Tube. «In The Army Now» fera un tube géant en 1986-87 et sera repris par les Enfoirés en 2009 sous le titre Ici les Enfoirés.

Rossi & Parfitt. Actuellement, seuls les guitaristes Francis Rossi et Rick Parfitt représentent encore dans Status Quo les historiques seventies du groupe.

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