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Le procureur général sous le feu des critiques

Un homme assis devant un micro
Le procureur général Michael Lauber s'explique sur ses rencontres informelles lors d'une conférence de presse le 10 mai. © Keystone / Peter Klaunzer

La pression s’accentue sur Michael Lauber, le procureur général de la Confédération: l’Autorité de surveillance du Ministère public a décidé d’ouvrir une enquête disciplinaire à son encontre. Sa réélection par le Parlement en juin pourrait être compromise. Que s’est-il passé?

Le Ministère public de la Confédération suisse enquête depuis 2015 sur une vaste affaire de corruption au sein de la Fédération internationale de football (FIFALien externe). Au cours de cette investigation, le procureur général Michael Lauber a eu plusieurs rencontres informelles avec le président de la FIFA Gianni Infantino. Une démarche qui fait l’objet de vives critiques.

Que reproche-t-on à Michael Lauber?

Ces rencontres informelles auraient dû être protocolées et figurer au dossier. De plus, Michael Lauber n’a mentionné que deux entretiens avec Gianni Infantino, alors qu’il y en aurait eu trois. Et lors d’une rencontre, le président de la FIFA aurait emmené avec lui une de ses connaissances. Comme il s’agit d’un tiers non-impliqué dans l’affaire, Michael Lauber aurait pu violer le secret de fonction en dévoilant le contenu des procédures.

Que dit Michael Lauber?

Le procureur général soutient que de telles rencontres informelles sont indispensables lors de procédures complexes, pour des raisons d’efficience et de coordination. Michael Lauber aurait également organisé ce type d’entretiens dans le cadre d’autres affaires, révèlent certains médias.

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Quel est le problème?

Ces rencontres sont problématiques pour plusieurs raisons: tout d’abord, le Ministère public peut par la suite être accusé de partialité dans la procédure. Un reproche qui est encore amplifié lorsque le procureur général s’entretient de manière informelle avec certaines personnes, mais pas avec d’autres. De plus, le coût de ces rencontres ne peut pas simplement être facturé à une partie sans qu’elle ne soit au courant du contenu des discussions.

Quels sont les derniers rebondissements dans cette affaire?

L’Autorité de surveillance du Ministère public (MPC) a décidé d’ouvrir une enquête disciplinaireLien externe à l’encontre de Michael Lauber pour d’éventuelles violations de ses devoirs de fonction. Cette procédure peut conduire à un avertissement, un blâme ou une réduction de salaire.

Que va-t-il se passer maintenant?

Michael Lauber a déposé une requête contre le MPC auprès des commissions de gestion du Parlement, qui l’ont entendu ce lundi. La commission judiciaire décidera mercredi soir si elle recommande ou non Michael Lauber à sa réélection. Elle pourrait aussi opter pour un report de l’élection à cet automne, une fois que l’enquête disciplinaire sera terminée.

Quel est le rôle du procureur général?

Le procureur général dirige le Ministère public de la ConfédérationLien externe, qui est chargé d’enquêter sur des délits contre la sûreté de l’État ou sur des affaires complexes liées à la corruption, au blanchiment d’argent, au crime organisé ou à la criminalité économique. L’exécution de demandes d’entraide judiciaires d’autorités étrangères relève également de la compétence du MPC, qui emploie environ 220 personnes.

Qui est le procureur général?

Le procureur général est élu par le Parlement. Depuis 2012, il s’agit de Michael LauberLien externe, 54 ans, avocat de formation. Durant sa carrière, il a travaillé comme juge d’instruction puis occupé des fonctions dirigeantes au sein de la Police judiciaire du canton de Berne et de l’Office fédéral de la police. Il a ensuite dirigé l’Unité d’intelligence financière du Liechtenstein puis l’Association des banques du Liechtenstein, avant de devenir président de l’Autorité de surveillance des marchés financiers du Liechtenstein.

Pourquoi le procureur général est-il particulièrement exposé?

Michael Lauber n’est pas le premier procureur général à se retrouver dans la tourmente. Ce poste est politiquement très exposé, car le Ministère public conduit des procédures complexes qui dépassent les frontières nationales. Ces enquêtes demandent de gros moyens, prennent du temps et sont très médiatisées, alors que les résultats ne sont souvent pas à la hauteur des attentes: les charges sont abandonnées, les prévenus sont acquittés ou les peines prononcées sont très légères. Le procureur général est donc assis sur un siège éjectable.

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Traduction de l’allemand: Marie Vuilleumier

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