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L’Arménie au centre du débat turco-suisse

Micheline Calmy-Rey et son homologue turc Abdullah Gül. Keystone

La question arménienne a figuré en bonne place lors des entretiens entre Micheline Calmy-Rey et son homologue turc Abdullah Gül mardi à Ankara.

Les deux ministres des Affaires étrangères ont reconnu leurs divergences sur ce sujet mais se sont mis d’accord sur la nécessité d’un travail historique.

«J’ai longuement raconté à Mme Calmy-Rey notre point de vue sur la question arménienne et l’évolution historique de ce problème», a indiqué le ministre turc des Affaires étrangères devant la presse. «Les positions de la Suisse et la Turquie sont différentes», a-t-il ajouté.

Selon lui, la décision du Grand conseil (parlement) vaudois de reconnaître le génocide arménien en 2003, qui avait provoqué l’annulation d’une précédente visite de Micheline Calmy-Rey, était «inadéquate». Il a en outre estimé que la version des faits propagée par la diaspora arménienne était à l’origine des malentendus sur ce sujet.

«La Suisse pense qu’il appartient à chaque pays de se pencher sur son histoire et de se réconcilier avec elle», a répondu la responsable du Département fédéral (ministère) des affaires étrangères (DFAE). A cet égard, elle a salué la volonté de M. Gül de mettre sur pied une commission internationale d’historiens chargés de faire la lumière sur ce «sujet difficile de l’histoire».

Mme Calmy-Rey a encore comparé le travail de cette instance avec la démarche accomplie en Suisse par la Commission Bergier, chargée d’enquêter sur les fonds en déshérence.

Démocratie appliquée

Les deux ministres ont en outre abordé la question des droits de l’Homme. La responsable du DFAE a félicité son homologue pour «les réformes et les efforts accomplis». Evoquant la manifestation de femmes violemment réprimée le 7 mars dernier à Istanbul, Micheline Calmy-Rey a toutefois souhaité que «la volonté politique se traduise par des réalisations sur le terrain».

L’entretien a aussi porté sur les relations économiques entre les deux pays «qui peuvent être améliorées», selon Mme Calmy-Rey. Elle a notamment évoqué la possibilité de conclure un accord de double imposition entre Berne et Ankara.

Enfin, les deux ministres ont évoqué l’intégration européenne de la Turquie que Berne «juge positivement», selon Mme Calmy-Rey. Si Ankara rejoint l’Union européenne (UE), l’économie helvétique bénéficiera d’un marché élargi, avait-elle souligné en décembre dernier.

En cas d’adhésion, la Turquie pourrait être soumise à des dérogations ou à des règlements d’exception permanents, a par ailleurs relevé Mme Calmy-Rey dans une interview parue mardi dans le journal turc «Türkiye». Un modèle de participation «partiel ou restreint» à l’UE qui pourrait intéresser la Suisse, a-t-elle ajouté.

Hommage à Atatürk



Plus tôt dans la journée, Micheline Calmy-Rey s’est rendue au mausolée d’Atatürk, fondateur de l’Etat turc et du concept de «turcité». Arrivée par une allée bordée de lions en pierre, elle a déposé une gerbe aux couleurs blanches et rouges des drapeaux suisse et turc sur la tombe de Mustafa Kemal.

Tout de noir vêtue, elle a respecté une minute de silence, avant de signer le livre d’or. Elle y a «salué la dépouille de ce grand homme qu’a été Atatürk». «Il a fondé la Turquie moderne», a-t-elle encore inscrit, souhaitant «à ce pays paix et prospérité».

A son arrivée à Ankara, elle avait rendu une courte visite de courtoisie au président turc Ahmet Necdet Sezer. Mercredi, Micheline Calmy-Rey se rendra dans le sud-est kurde du pays, à Diyarbakir, avant de rejoindre jeudi la capitale économique, Istanbul.

swissinfo et les agences

Entre 1915 et 1918, de 800’000 à 1,8 million d’Arméniens sont tués ou déportés par l’Empire ottoman.
La Turquie continue jusqu’à aujourd’hui à nier ce génocide.
Le 24 juillet 1923, c’est à Lausanne qu’est signé le traité qui marque la naissance de la Turquie moderne.

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