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L’Emmental veut aussi son AOC

La recette de l'Emmental n'a pas changé depuis plus de cent ans. Keystone

L'Emmental est le fromage suisse le plus connu. Mais il est boudé par les Helvètes. Et il est souvent copié à l'étranger. Une AOC ne suffira pas à le sauver.

Après le fromage de l’Etivaz, le Gruyère, la Tête de moine, le Formaggio d’alpe ticinese et le Sbrinz, c’est au tour de l’Emmental.

L’interprofession de l’Emmental a, en effet, déposé une demande officielle d’enregistrement d’appellation d’origine contrôlée (AOC) auprès de l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG).

Un fromage à gros trous

Ce fromage est caractérisé par sa pâte dure et grasse, son goût légèrement sucré et surtout ses gros trous.

Il doit son goût caractéristique à l’alimentation des vaches sans ensilage, à la transformation du lait cru à l’état naturel et à l’utilisation de cultures traditionnelles de bactéries d’acide propionique.

L’affinage du vrai Emmental dure au moins quatre mois. Après le saumurage, il mûrit d’abord dans une cave chaude (où se forment les fameux trous) et ensuite dans la cave d’affinage plus fraîche.

Le véritable Emmental bernois

A l’origine, il était produit dans le canton de Berne, dans la vallée de l’Emme. Mais, aujourd’hui, on en fait également dans d’autres cantons (Lucerne, Glaris, Schwytz, Soleure, Saint Gall, Thurgovie, Zoug, Zurich) et même dans les districts fribourgeois du Lac et de la Singine.

Pire, plusieurs pays de l’Union européenne (UE) fabriquent leur propre Emmental. Trois appellations sont même protégées, dont l’Emmental de Savoie.

«L’AOC, explique Jacques Chavaz, vice directeur de l’OFAG, l’AOC, c’est une forme de reconnaissance pour un produit artisanal, de haute qualité.»

Et d’ajouter: «c’est, surtout, le seul moyen de le distinguer de la production industrielle, qu’elle soit helvétique ou étrangère.»

Une dénomination générique

Certes. Mais, même si l’Emmental décroche son AOC, la Suisse ne sera pas en mesure d’interdire la fabrication de copies en France, aux Pays-Bas ou en Finlande.

D’ailleurs, plusieurs pays membres de l’Union européenne font des pressions pour que l’Emmental soit inscrit sur la liste des dénominations génériques.

Dans ce cas, n’importe quel fromage ressemblant de près ou de loin aux fameux Emmental suisse pourrait être vendu sous cette appellation.

Les producteurs alémaniques sont aux abois. D’autant que, depuis le 1er mai 1999, ils ont de la peine à digérer la nouvelle politique agricole helvétique.

Les Suisses boudent l’Emmental

En clair, ils font difficilement face à la libéralisation du marché. Et ils souffrent des effets de la loi de l’offre et de la demande.

Les Suisses boudent leur célèbre fromage à gros trous, au profit du gruyère, du fromage à raclette et surtout de… la mozarella (le fromage actuellement le plus consommé en Suisse).

L’Emmental représente le 50% des exportations de fromages suisses vers Europe. Mais, il subit la forte concurrence de ses rivaux européens.

Le marché est saturé. On parle même d’une surproduction de quelque 5000 tonnes pour l’année 2002.

Résultat, sur le marché européen, l’Emmental suisse est très souvent vendu à perte. C’est-à-dire à un prix inférieur à son coût de production.

swissinfo/Jean-Louis Thomas

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