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La Corée et le fantastique ont rendez-vous à Neuchâtel

Une image du film sud-coréen «Dasepo Naughty Gils».

Le 7ème 'Neuchâtel International Fantastic Film Festival' (NIFFF) a ouvert ses portes mardi soir... dans un cinéma, puisque le ciel ne l'a pas autorisé à jouer sa carte 'open air'.

Au menu de la manifestation, 80 films environ, avec une forte représentation asiatique, notamment grâce à une rétrospective sud-coréenne.

Démarrage un peu boiteux pour le 7ème Festival du film fantastique de Neuchâtel. Avec un film d’ouverture («El Orfanato», de l’Espagnol Juan Antonio Bayona) qui n’arrivera pas… car il a été envoyé à «Genève Italie»! Et qui est remplacé au pied levé par une chose nordique, improbable et néanmoins en compétition, intitulée «You, the Living».

Et comme une déception n’arrive jamais seule, la projection a lieu dans une salle de cinéma, alors que ce 7ème bal des vampires neuchâtelois aurait dû s’ouvrir en principe sur les rives du lac, en plein air. Le ciel n’en a pas voulu ainsi, noyant le paysage dans la brume et la pluie. Ce qui à priori convient bien au genre fantastique, mais moins aux festivaliers.

Entre lac et maisons jaunes en pierre d’Hauterive, un écran et 500 sièges rouges sont disposés, attendant donc la bonne volonté de la météo. «J’appelle ça la ‘Piazza piccola’», sourit Olivier Müller, le président et fondateur du festival, en affirmant qu’après avoir souhaité ce nouvel espace pendant des années, il est prêt à attendre encore un jour ou deux.

«Le NIFFF, c’est un festival qui se distingue par un mélange d’exigence, de sérieux, mais aussi de convivialité. Ici, on peut parler avec les réalisateurs. Raison pour laquelle, dès le début, on a consacré une grosse part du budget à inviter des cinéastes qui viennent de loin. Pas pour les caser dans un coin VIP, mais pour qu’ils viennent vraiment à la rencontre du public», explique-t-il.

Ainsi, Terry Gilliam, John Landis, George A. Romero, Dario Argento (le papa d’Asia!), Phil Tippett ou Roger Corman ont-ils déjà fait le déplacement de Neuchâtel… Et cette année sont notamment présents l’Américain Mick Garris (producteur de la série ‘Masters of Horror’) ou les réalisateurs sud-coréens Park Chang-Wook et Ryoo Seung-Wan.

L’Asie en force

Chaque année, l’Asie est très présente à Neuchâtel. A travers la ‘compétition asiatique’ bien évidemment, à travers la ‘compétition internationale’ également (très diversifiée cette année, du point de vue des genres comme des origines: films américain, russe, norvégien, danois, finlandais, argentin, japonais…). Mais cette année encore davantage grâce à une rétrospective du cinéma sud-coréen.

Une cinématographie particulièrement décoiffante selon Olivier Müller, qui évoque le conservatisme qui a longtemps étouffé la Corée du Sud avant que le couvercle culturel ne se soulève, au début des années 90, et qu’un cinéma fou et néanmoins rigoureux, violent et néanmoins intelligent, n’émerge.

«Ils se servent du fantastique, du thriller, du film d’action, de combat, pour représenter les rapports sociaux, les problèmes politiques que pose une société qui était paysanne il n’y a pas longtemps et qui est en train de devenir le lieu des génies de l’Internet et des jeux vidéo», s’enthousiasme Olivier Müller.

«Un cinéma souvent très technologique et luxueux, et parfois d’une terrible brutalité», constate le patron du festival.

Made in CH

Dans un tout autre registre, le cinéma suisse est également présent à Neuchâtel à travers des courts-métrages et, c’est une première, quelques longs-métrages.

«C’est vrai qu’il n’y a pas de tradition fantastique en Suisse. Il y avait eu, dans les années 60-70, des films qui s’approchaient du registre fantastique. On peut citer Godard. Ou Fredy Murer avec ‘Swiss Made 2069’, un film de science-fiction dont HR Giger avait signé les décors. Et plus grand chose depuis».

Mais Olivier Müller constate un renouveau du genre, en Suisse alémanique en particulier. Avec «Marmorera», de Markus Fischer, qui s’inspire de légendes alpines. Comme Michael Steiner, le réalisateur de «Grounding», qui est en train de travailler à un film gros budget qui évoque l’histoire de poupées maléfiques que les paysans, toujours dans les Alpes, doivent absolument empêcher d’entrer dans les chalets….

Olivier Müller voit deux raisons à cette émergence. D’abord, une nouvelle génération de cinéastes, tendance quarantenaire, qui a été abreuvée au même biberon cinématographique que les organisateurs du NIFFF. Ensuite, la démarche de Nicolas Bideau, patron de la section cinéma de l’Office fédéral de la Culture, qui prône depuis son arrivée à cette fonction un «cinéma populaire de qualité».

A propos de Nicolas Bideau… Le dossier «festivals» trône actuellement sur son bureau, avec en perspective un «repositionnement» de la manne fédérale. Comment le NIFFF vit-il cette perspective?

«Je crois qu’on a de bons arguments et que le NIFFF correspond bien aux critères. Notamment au fait de moderniser la scène des festivals, avec une orientation à la fois vers l’industrie du cinéma et le public. ‘Cinéma populaire et de qualité’, on aurait presque pu en faire l’un de nos slogans!» répond Olivier Müller.

Quoi qu’il en soit… jusqu’au 8 juillet, zombies, vampires, esprits frappeurs et autres créatures étranges hanteront les rues de Neuchâtel. Le simple passant est prié de se munir d’un crucifix ou d’une gousse d’ail.

swissinfo, Bernard Léchot à Neuchâtel

Pour la 1ère fois, le NIFFF propose chaque soir une projection en plein air.

Sinon, le programme est composé de quatre compétitions:
– Compétition internationale
– Compétition asiatique
– Courts-métrages suisses
– Courts-métrages européens

de deux rétrospectives:
– «O-Oh», films fantastiques tournés en 3 dimensions
– La nouvelle vague sud-coréenne

de deux rencontres-débats (6.7)
– La musique et le cinéma fantastique
– Les liens entre cinéma fantastique et politique (avec notamment Nicolas Bideau)

et d’un symposium de deux jours (‘Imagine the future’) sur l’image contemporaine après 25 années d’expériences dans le domaine de la synthèse, en collaboration avec la Maion d’Ailleurs à Yverdon-les-bains et le Musée d’ethnographie de Neuchâtel.

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