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La fête est finie pour les 0900

Internet à cinq francs la minute, c'est bientôt fini. swissinfo.ch

L'Office fédéral de la communication vole au secours du public, qui ignore souvent les conséquences d'un appel sur les numéros commençant par 0900.

Pour limiter les abus, l’OFCOM va interdire les logiciels qui établissent une connexion Internet via un de ces numéros, à des prix souvent exorbitants.

«L’ouverture du marché des télécommunications a entraîné beaucoup d’innovations, mais elle a malheureusement également attiré de nombreux escrocs», lâche Marc Furrer, directeur de l’Office fédéral de la communication (OFCOM).

En cause, les services dits «à valeur ajoutée», soit les numéros commençant par 0900, 0901 ou 0906, dont la consommation par trop fréquente peut facilement faire exploser une facture de téléphone.

L’an dernier, l’OFCOM a enregistré plus de 2000 plaintes relatives à ces numéros. 117 d’entre eux ont d’ailleurs été révoqués.

A partir du 1er avril 2004, la Suisse sera donc un des premiers pays au monde à sévir, en prononçant rien moins que l’interdiction de ce que l’on nomme «PC-dialers», «webdialers» ou simplement «dialers».

L’Internet à 5 francs la minute

Car l’arnaque à la minute de communication ne fleurit pas qu’au téléphone. En fait, plus de la moitié (55%) des plaintes reçues par l’OFCOM concernent l’accès à Internet.

N’importe qui peut se faire avoir. En visitant une page payante, l’internaute se voit proposer un logiciel de connexion à télécharger. Or, celui-ci passe par un 0900, ou par un numéro international commençant par 00.

Du coup, la minute de connexion peut coûter un, deux, trois ou cinq francs, quand ce n’est pas davantage. Les associations de protection des consommateurs ont même relevé des cas où 20 secondes sur la toile sont facturées jusqu’à 300 francs!

A noter que seuls les internautes connectés via un modem classique sont concernés. Les «PC-dialers» ne peuvent pas fonctionner sur le câble, ni sur l’ADSL.

Les associations de consommateurs se félicitent de ce que les autorités aient enfin pris conscience des abus qu’elle dénoncent depuis longtemps. Mais l’interdiction de ce mode de connexion à Internet ne fait pas que des heureux.

Au siège suisse de Beate Uhse, la multinationale allemande de l’érotisme, le son de cloche est, on s’en doute, fort différent.

«Cette décision risque de nous faire perdre 80% de notre chiffre d’affaires sur Internet», regrette Jan Brönnimann. Le chef du marketing pour la Suisse de Beate Uhse ajoute qu’il serait «faux d’interdire toutes les automobiles parce que certaines roulent trop vite».

A l’opposé, la Fédération romande des consommateurs (FRC) salue l’interdiction. Mais regrette qu’il ne soit pas possible d’aller plus loin. Car il reste bien sûr le volet téléphonique de l’escroquerie, et là, les pouvoirs publics sont passablement désarmés.

«Aujourd’hui, une communication de quelques minutes peut coûter des centaines de francs», rappelle Marianne Meyer, de la FRC.

Des prix plafond

En Suisse, la loi ne fixe aucune limite pour les tarifs des communications téléphoniques.

Lassés des réclamations de leurs clients, les trois grands opérateurs – Swisscom, Sunrise et Orange – ont passé le mois dernier une convention pour fixer des prix plafond.

«Nous refusons les services qui coûtent plus de 10 francs la minute ou plus de 600 francs par appel», explique Christian Neuhaus, porte-parole de Swisscom.

Et de préciser que si ce dernier chiffre peut paraître exorbitant, il ne faut pas oublier que certaines entreprises offrent également des biens ou des services très réels. C’est le cas de la respectable Loterie Romande, qui vend ses billets par téléphone et reporte leur coût sur le prix de l’appel.

Globalement d’ailleurs, l’OFCOM tient à souligner que dans leur immense majorité, les sociétés atteignables via un 0900 respectent les règles en vigueur.

«Je t’attends ce soir…»

«Hello, je suis une nana super canon, je t’attends ce soir». Pour rester dans la sobriété, voici le type de SMS que n’importe qui est susceptible de recevoir sur son portable.

Et la belle donne même son numéro de téléphone, qui comme par hasard commence par 0906. Normalement, ce type de message devrait mentionner le prix de la communication, qui mettra le plus souvent le pigeon en contact avec un répondeur.

Et à écouter une voix suave sur fond de musique douce, le temps passe très vite. Le compteur, lui, n’oublie pas de tourner.

A partir de juin prochain, les consommateurs devraient être mieux protégés contre ce genre d’abus. L’Ordonnance révisée sur l’indication des prix obligera les fournisseurs de ces services à indiquer clairement leurs tarifs.

Et si la taxe fixe excède dix francs ou le prix à la minute cinq francs, le client devra confirmer son acceptation par un signal spécifique.

L’OFCOM a également édité un dossier d’information sur les numéros 0900. Très didactique et simple d’accès, il peut être consulté gratuitement sur son site internet.

Et toujours sur le site de l’OFCOM, on trouve désormais un moteur de recherche qui permet de savoir qui se cache derrière les numéros 0900 (liens ci-dessus).

swissinfo et les agences

A fin 2003, on trouvait en Suisse:
22’910 numéros érotiques (0906),
16’471 numéros de jeux et de divertissement (0901),
12’217 services commerciaux ou de marketing (0900)

– Selon l’OFCOM, les numéros dits «à valeur ajoutée» répondent à un besoin. Ils permettent d’accéder à certaines prestations avec un mode de paiement simple: directement via la facture téléphonique.

– On peut ainsi par exemple acheter un billet de train, trouver la solution à un problème informatique ou consulter son horoscope. Mais on y trouve également toute la gamme des services érotiques.

– Dans la plupart des cas, les exploitants de ces services respectent les normes en vigueur. Mais le consommateur doit rester vigilant, car certains tarifs sont nettement abusifs.

– L’an dernier, les Suisses ont passé globalement 162 millions de minutes en conversation avec un 0900 (ce qui équivaut à plus de trois siècles!), ce qui leur a coûté quelque 61 millions de francs.

– La fréquentation de ces numéros accuse toutefois une baisse de près de 14% entre 2002 et 2003. Parallèlement, depuis 2002, le nombre de numéros disponibles n’augmente plus.

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