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La famille d’Adeline décrit sa vie brisée après le drame

Le compagnon d'Adeline a critiqué les failles de la Pâquerette lors de son audition jeudi par le Tribunal criminel de Genève. KEYSTONE/SALVATORE DI NOLFI sda-ats

(Keystone-ATS) Les parents et le compagnon d’Adeline ont pu raconter jeudi devant le Tribunal criminel de Genève toute l’horreur provoquée par son assassinat sauvage en 2013 par Fabrice A. La maman a demandé un internement à vie.

Le compagnon d’Adeline, qui était aussi son collègue à la Pâquerette, a expliqué comment sa fille, 8 mois au moment des faits, doit se construire sans sa maman. Il a évoqué toutes ses premières fois sans sa mère: premier anniversaire, premiers pas, premier jour à la crèche. Le regard des autres sur “la fille de l’égorgée” est très lourd.

Il a aussi évoqué leur projet d’un deuxième enfant, remis à plus tard juste avant le drame. “Heureusement”, relève-t-il. “Vous imaginez si elle avait été enceinte?”. Après avoir voulu rejoindre sa compagne, il articule sa vie autour de sa fille. En dépression et épuisé par la procédure, il a dû diminuer son temps de travail.

Les failles

Le compagnon a aussi sévèrement critiqué les failles du système qui ont mené à ce drame. La Pâquerette manquait de cadre et de structure, a-t-il relevé. On aidait simplement les détenus à mieux supporter la prison, mais sans thérapie, selon lui. Ils touchaient 500 francs par mois pour un suivi psychologique, s’est-il offusqué.

Il avait remarqué des dysfonctionnements dans ce centre qui a été fermé depuis. Il avait d’ailleurs annoncé sa démission. Pétri de culpabilité, il se demande si les choses auraient été différentes s’il avait alerté les autorités.

Fabrice A. a traqué Adeline pendant un an comme une bête, a relevé le compagnon. Il était collant et manifestait une attitude amoureuse. Le prévenu l’avait provoqué juste avant la sortie en demandant à Adeline “Tu as pris les sous, chérie?”.

Sa joie de vivre

En ce quatrième jour du procès, qui a été jusqu’à présent marqué par la froideur de Fabrice A., c’est la personnalité lumineuse d’Adeline qui est ressortie. Très appréciée, elle amenait de la joie de vivre à La Pâquerette, a relevé son compagnon.

Sa maman a décrit une fille joyeuse, à l’écoute et aimée des autres, empathique, intelligente et bienveillante. Elève studieuse, qui jouait merveilleusement bien du piano, elle avait suivi des études de psychologie et de criminologie.

Elle était heureuse d’aider les criminels à se réinsérer, a-t-elle rappelé. Elle a eu tort de croire qu’il y avait une étincelle à l’intérieur de chaque détenu, relève la maman qui avait préparé une note écrite pour ce témoignage lu dans un silence de plomb. Adeline avait toutefois déchanté et voulait quitter la Pâquerette pour travailler auprès des victimes.

Des questions

Sa fille a subi le “paroxysme du mal”. Tout son entourage a été anéanti. La mère a demandé un internement à vie pour que l’assassin ne sorte jamais.

Le papa a évoqué, des sanglots dans la voix, la dernière image de sa fille: sa silhouette par l’entrebâillement de la porte. Il veut savoir comment Fabrice A. a pu préparer son projet machiavélique en détention et pourquoi le détenu, vu son passé de violeur multirécidiviste, a pu être admis à La Pâquerette.

Bertrand Levrat, le directeur des HUG, qui chapeautait la structure de sociothérapie à l’époque, a exprimé ses regrets et ses excuses par rapport aux failles qui ont mené à ce “crime abominable”. Fabrice A. avait égorgé Adeline, sa sociothérapeute âgée de 34 ans lors d’une sortie accompagnée en septembre 2013.

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