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La loi antiraciste se resserre sur les néo-nazis

Ce sont les rassemblements néo-nazis ou skinheads qui sont visés par la décision du Tribunal fédéral. Keystone

Désormais, tous les propos incitant à la haine ou à la discrimination raciales sont condamnables - sauf s'ils sont tenus dans un cercle restreint de parents ou d'amis.

Dans le collimateur du Tribunal fédéral, on trouve en particulier les rassemblements néo-nazis .

Le Tribunal fédéral (TF) renforce le champ d’application de la norme antiraciste. Désormais, tous les propos incitant à la haine raciale sont visés par le Code pénal, hormis ceux qui sont tenus dans un cercle restreint de parents ou d’amis.

L’incitation à la haine ou à la discrimination envers une personne ou un groupe de personnes est condamnable si elle est faite «publiquement». Pour déterminer si cette condition est remplie, il n’est plus nécessaire, explique le Tribunal fédéral (TF), de se référer au nombre de personnes auxquelles les propos étaient destinés.

Précédemment, le TF était moins restrictif et s’était très souvent référé à un critère quantitatif. A plusieurs reprises, il avait relevé que des propos tenus en présence de moins de dix personnes, ou dans un cercle fermé, ne pouvaient constituer une incitation «publique» à la haine ou à la discrimination envers une personne ou un groupe de personnes.

Pour justifier ce changement de jurisprudence, les juges se réfèrent au caractère inacceptable des propos ou des comportements racistes.

Une affaire de skinheads bernois

Le Tribunal fédéral donne ainsi raison au Ministère public du canton de Berne, qui avait contesté l’acquittement de l’organisateur d’une réunion d’une cinquantaine de skinheads et de l’orateur de la soirée. Ce dernier s’était exprimé sur «l’origine des SS et des Waffen SS».

Le Tribunal d’arrondissement d’Aarburg et la Cour suprême du canton de Berne avaient écarté l’application de la norme antiraciste, parce que la réunion en question, qui s’était tenue en 1999, avait eu lieu dans une cabane forestière et s’était tenue dans un cercle fermé, composé uniquement de membres de la scène skinhead.

Si les juges bernois avaient dénié à la rencontre tout caractère «public», le TF est d’un autre avis. Il admet sans réserve le caractère public des propos racistes tenus lors de cette soirée et contraint la Cour suprême à juger une nouvelle fois l’organisateur et l’orateur de la soirée skinhead.

Rassemblements néo-nazis visés

Le changement de pratique du TF vise le milieu néo-nazi et skinhead, a expliqué à l’ats le professeur de droit pénal Marcel Alexander Niggli. Il s’agit d’empêcher les extrémistes de droite de se soustraire aux sanctions en convoquant des manifestations racistes par le biais d’invitations personnelles.

Pour le professeur de l’Université de Fribourg, expert de la norme anti-racisme, la nouvelle définition du mot «publiquement» n’entraînera pas de durcissement au quotidien, mais facilitera la tâche des autorités judiciaires. Les plaisanteries racistes autour d’une table de bistrot tombaient déjà sous le coup de la loi, en certaines circonstances, rappelle-t-il.

La présidente de la Commission fédérale contre le racisme Doris Angst constate quant à elle que le TF comble ainsi une lacune juridique. L’intention du législateur n’était sûrement pas d’exclure le rassemblement incriminé de l’application de la norme anti-raciste.

De 1995 à fin 2002, ce sont 95 personnes qui ont été condamnées en première instance pour discrimination raciale, a-t-elle précisé.

swissinfo et les agences

– Le Tribunal fédéral (TF) renforce le champ d’application de la norme antiraciste.

– Désormais, tous les propos incitant à la haine raciale sont visés par le Code pénal, hormis ceux qui sont tenus dans un cercle restreint de parents ou d’amis.

– Des propos tenus lors d’une réunion skinhead ou néo-nazie, par exemple, pourront donc être pris en compte.

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