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La politique climatique suisse intéresse la Chine

A Thalwil, près de Zurich, on utilise la chaleur résiduelle de la station d’épuration des eaux pour produire du courant, épargnant ainsi à l’atmosphère environ mille tonnes de CO2 par an. Keystone

La coopération sino-suisse sur le changement climatique a culminé cette semaine par le voyage d’une délégation chinoise en Suisse. Le géant asiatique veut s’inspirer de la législation helvète. Au programme: de nombreuses visites et discussions.

«Nous aimerions nous aider mutuellement à construire des institutions qui luttent contre le changement climatique». Chang Jiwen, professeur à l’Institut pour le droit de l’environnement de l’Académie chinoise des sciences sociales (CASS) a ainsi résumé, mercredi à Zurich, le but de la visite de sa délégation, du 14 au 21 août en Suisse. Le CASS est l’une des institutions à qui le gouvernement a demandé de préparer un projet de loi sur la protection du climat. Or la Suisse, dotée d’un arsenal législatif conséquent, l’intéresse au premier plan.

La petite Helvétie ne se voit pas pour autant comme une donneuse de leçons. Roger Nordmann, conseiller national socialiste vaudois, a rencontré des membres de la délégation ce vendredi. «Les Chinois sont très avancés technologiquement, explique-t-il. Même s’ils n’ont pas les mêmes priorités que nous, je vais à cette rencontre avec un état d’esprit ouvert. Peut-être pouvons-nous aussi apprendre quelque chose.»

«La demande d’information est venue de leur côté et je pense que ce type d’échanges est très utile, insiste-t-il. La Chine est très intéressée par les énergies renouvelables. Si elle ne fait pas le virage de la politique climatique, la situation mondiale ne peut que s’aggraver, puisqu’un humain sur cinq est chinois.»

Le dialogue sur la politique climatique a commencé en 2009 entre les deux pays, sous l’égide de la Direction du développement et de la coopération (DDC). Un premier Forum sino-suisse sur la législation sur le changement climatique a eu lieu en Chine en octobre de cette année-là avec 46 experts des deux pays.

«En 2007, la Chine a dépassé les Etats-Unis en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre, rappelle Anton Hilber, co-directeur du Programme global Changement climatique, qui a organisé le voyage d’étude de la délégation chinoise. Ne pas agir n’est pas une option.»

 

Chercheurs et militants

Emmenée par les responsables de plusieurs comités chinois de recherche environnementale, la délégation a visité des institutions comme l’Office fédéral de l’environnement ou l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne et des entreprises comme le cimentier Holcim. Elle a rencontré de nombreux acteurs de la politique du climat, y compris le WWF.

«Nous nous intéressons aux expériences suisses mais aussi à la législation européenne», a précisé Ma Aimin, directeur du Ministère pour la coordination de la politique chinoise du climat et de la législation dans ce domaine (NDRC), qui représente son pays dans les négociations internationales. «Mais nous ne pouvons pas simplement copier une loi, car nos émissions de CO2 n’ont pas les mêmes sources que chez vous», a-t-il ajouté.

Outre, entre autres, des programmes de reforestation, la Chine a, depuis 1985, une loi sur le contrôle de l’air. La 3e révision est en cours. «Nous devons coordonner ce travail avec la préparation de la nouvelle loi sur la protection climatique, c’est très complexe», note Ma Aimin.

La délégation se dit aussi très intéressée par les programmes volontaires de l’économie suisse pour réduire les émissions. «Nous voulons savoir si cela fonctionne», a sobrement commenté le directeur du NDRC.

Si les participants ont rappelé les objectifs environnementaux de la Chine – notamment une diminution de 42 à 45% des émissions de CO2 par unité de PIB jusqu’en 2020, ce qui peut revenir à une stabilisation, selon la croissance économique – il n’a pas été possible d’entendre des détails concrets sur les projets du gouvernement chinois. Les membres de la délégation ont rappelé «qu’il est bon que la communauté internationale adopte des accords», mais que «la Chine a pris un engagement pour elle-même et que cet engagement est inconditionnel.»

 

Processus internationaux

Figurant également parmi les parlementaires invités à rencontrer la délégation chinoise, le conseiller national libéral-radical zurichois Ruedi Noser souligne la nécessité de voir la Chine rejoindre les processus internationaux. «Si elle ne faisait rien, beaucoup d’autres pays abandonneraient tout effort.»

Pour Roger Nordmann, la Chine «exige de pouvoir continuer à polluer pour poursuivre sa croissance, tout en développant les énergies renouvelables. D’un point point de vue de justice historique – par rapport à l’Occident, qui a émis l’essentiel du CO2 excédentaire dans l’atmosphère – c’est compréhensible, mais du point de vue de la finalité, c’est faux.»

Autres thèmes abordés par les délégués, les technologies à faibles émissions nocives, le commerce des certificats entre entreprises polluantes, l’énergie solaire, le cleantech et l’économie verte.

Interrogés sur l’énergie nucléaire pendant la conférence de presse à Zurich, Suisses et Chinois ont préféré ne pas dévier du thème premier, celui de la loi sur la protection du climat. Les conséquences de Fukushima sur la politique énergétique suisse figuraient néanmoins au programme de la semaine.

«Cette semaine est un premier jalon majeur dans la coopération sino-suisse», indique le Programme «changement climatique» de la DDC. Une délégation suisse devrait se rendre en Chine d’ici la fin 2011.

Avec 24% des émissions mondiales, la Chine est aujourd’hui le principal émetteur de dioxyde de carbone de la planète.

Le pays tire les deux tiers de son électricité du charbon et est devenu en 2008 le premier marché automobile mondial.

Sa croissance a fait tripler le niveau de ses émissions de CO2 entre 1990 et 2007.

En deux ans, la Chine a massivement investi dans l’efficacité énergétique et doublé sa capacité en matière d’énergies renouvelables.

«La Chine construit une nouvelle turbine éolienne toutes les deux heures en moyenne», selon Greenpeace.

La Chine s’est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre par unité de Produit Intérieur Brut (PIB) de 40 à 45% d’ici 2020, par rapport à 2005. En clair, ses émissions devraient continuer d’augmenter, mais à un rythme moins rapide.

(Source: Geo)

Le Programme global «Changement climatique» est une section opérationnelle de la Direction du développement et de la coopération (DDC).

La section finance des programmes menés en faveur du développement durable dans les domaines de l’énergie et de l’occupation des sols.

Elle prend une part active aux négociations concernant les accords multilatéraux relatifs au climat et s’engage en faveur de solutions équilibrées dans le dialogue politique national et international.

(Source: DDC)

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