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La sévérité plébiscitée face à la violence des jeunes

La violence des jeunes augmente, du moins la majorité des Suisses le pense-t-elle. Keystone

Une majorité de Suisses estiment que les jeunes sont plus agressifs qu'il y a vingt ans, selon un sondage publié dans trois journaux dimanche.

Les sondés font porter le chapeau aux parents et préconisent le retour à une éducation plus stricte. Une approche que conteste le professeur zurichois Jürgen Oelkers.

Selon ce sondage publié dans le «Matin dimanche», le «SonntagsBlick» et «Il Caffè», 82% des personnes interrogées estiment que l’éducation est plus difficile à mener qu’il y a vingt ans.

Sept personnes sur dix pensent que les jeunes sont plus indisciplinés et presque 8 sur dix les trouvent plus agressifs. Constat: le sujet ne suscite aucun clivage entre Suisse alémanique et latine.

Toujours selon ce sondage, 62% des personnes interrogées confient avoir peur au moment d’envoyer leur adolescent à l’école.

Pour la majorité des sondés (77%), c’est moins la société (70%) que les parents qui portent la responsabilité d’une violence qui tend à faire les gros titres ces derniers mois en Suisse.

Face à cette situation, les sondés sont favorables à un retour à une éducation plus sévère. Pour 68% d’entre eux, le recours à la gifle ou la fessée est légitime. 30% y sont opposés.

Plusieurs propositions

A trois mois des élections fédérales, cette question de la violence des jeunes fait débat sur le plan politique. Et plusieurs propositions ont fleurit ces derniers jours.

Huit sondés sur dix appuient ainsi l’idée de la ministre de l’éduction du canton de Zurich, Regina Aeppli. La socialiste propose de contraindre les parents d’enfants violents à fréquenter des cours.

Les avis sont plus partagés en ce qui concerne le renvoi des jeunes délinquants étrangers avec leurs parents. Une idée prônée par l’Union démocratique du centre (UDC / droite nationaliste). 55% des sondés soutiennent cette solution drastique et 40% ne lui accordent aucun crédit.

La proposition de Chantal Galladé trouve moins d’appuis encore. La socialiste zurichoise propose un recours à la prison pour les jeunes de moins de quinze. 54% des sondés trouve la solution mauvaise, 40% l’appuient.

Question de perception

La «NZZ am Sonntag» apporte un autre éclairage. Selon le discours dominant, la criminalité des jeunes augmente, estime dans ce journal le professeur de pédagogie zurichois Jürgen Oelkers.

Mais la question reste ouverte de savoir si les cas augmentent en chiffre absolu ou si les cas sont plus souvent annoncés à la police.

«La perception de la menace augmente, oui. Mais on doit différencier ce que les statistiques peuvent dire et comment les gens les comprennent», poursuit le professeur dans cet entretien.

Jürgen Oelkers ne pense pas que le retour aux bonne vieilles méthodes est la solution. «Pendant des siècles, les enfants ont été mis au coin avec un bonnet d’âne. Et la dureté des mesures disciplinaires peut aller jusqu’à bloquer le processus d’apprentissage.»

Si la discipline à l’ancienne avait si bien fonctionné, pourquoi l’école a-t-elle voulu changer sa façon d’enseigner, se demande aussi le pédagogue.

Des attentes plus fortes

«Les attentes face à l’éducation ont aussi énormément augmenté», selon le spécialiste. Auparavant, l’éducation n’avait pas la valeur existentielle qu’on lui donne aujourd’hui.

Les parents pensent que l’éducation devrait se dérouler sans difficulté. «L’éducation est idéalisée et les conflits sont analysés comme des échecs». Cette perception de l’éducation est basée sur la négation de l’opposition. Et selon Jürgen Oelkers, elle mène tout droit à l’alarmisme.

Dans les faits, 98% des enfants et des adolescents ne sont pas des délinquants, a du reste rappelé le Conseil suisse des activités de jeunesse (CSAJ) la semaine dernière. A ses yeux, la violence des jeunes est instrumentalisée par les partis à la veille des élections fédérales.

Certains partis et politiciens noircissent le tableau et présentent des mesures démagogiques, selon le CSAJ, qui demande aux politiciens de ne pas mener leur campagne sur le dos des jeunes.

swissinfo et les agences

Ce sondage a été réalisé par l’Institut Isopublic.
Il a été réalisé entre le 11 et le 14 juillet.
1100 personnes de toute la Suisse ont été interrogées.

En 2005, on a dénombré plus de 14’000 jugements contre des mineurs, selon l’Office fédéral de la statistique, contre 12’000 en 1999, lorsque cette statistique a été établie.

79,3% des jugements concernaient des adolescents et 62,7% des Suisses.

Depuis 1999, on voit augmenter les jugements d’infractions routières et d’atteintes à l’intégrité physique, au patrimoine et à la liberté.

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