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La santé au centre de la lutte contre le CO2

La malaria est un fléau, par exemple en Zambie. Keystone

Réduire les émissions de gaz à effet de serre, c’est améliorer sa santé. Tel est le message que cherchait à faire passer à Copenhague notamment l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Les explications de Maria Neira, directrice de son Département santé publique et environnement.

Selon l’OMS, les faits sont là. La planète se réchauffe rapidement en raison principalement des émissions de gaz à effet de serre causées par l’activité humaine.

Si les modèles actuels d’utilisation des énergies fossiles, de développement et de croissance de la population se maintiennent, la conséquence sera la poursuite du changement climatique, avec des effets sérieux sur l’environnement et, par conséquent sur les vies humaines et la santé.

C’est pourquoi l’agence onusienne veut mettre la santé au centre de la thématique du changement climatique, autant pour favoriser le développement de politiques efficaces que pour mobiliser le public.

swissinfo.ch: Quels sont les impacts du changement climatique sur la santé humaine?

Maria Neira: Ce que l’on voit déjà, ce sont les impacts relatifs au fait que le changement climatique va affecter la production des aliments. Un impact donc sur la malnutrition, qui cause déjà 3,5 millions de morts par année. Certaines maladies sont très sensibles au climat, comme la malaria ou les maladies diarrhéiques. On s’attend là aussi à un impact.

En dehors de ça, la pollution atmosphérique dans les villes est en train de tuer chaque année 1,2 million de personnes. Si on parvient à réduire les émissions de gaz à effet de serre, on va dans le même temps réduire l’utilisation des énergies responsables de ces émissions.

swissinfo.ch: Qui est touché dans sa santé par le changement climatique?

M.N.: On le sait tous, ou on devrait le savoir: les pays les plus pauvres sont les plus vulnérables et seront les plus affectés. Mais il ne faut pas croire qu’ils seront les seuls. Les citoyens suisses, européens, avec des niveaux de vie beaucoup plus élevés, sont aussi à risque, car la pollution atmosphérique est responsable de nombreuses maladies respiratoires chroniques. Il faut que les gens comprennent qu’il y a un lien avec le changement climatique – la lutte contre le réchauffement va contribuer à la lutte contre les maladies respiratoires chroniques.

swissinfo.ch: Où voyez-vous les principaux défis pour l’OMS en lien avec la question climatique?

M.N.: Il s’agit pour nous de continuer à apporter les fondements scientifiques, comme jusqu’ici, mais également de poursuivre la sensibilisation. Il faut que les gens comprennent que réduire les émissions de CO2, c’est améliorer leur santé. Le jour où ils l’auront compris, ils additionneront les petites mesures personnelles, en continuant à faire pression sur les décideurs politiques afin qu’ils prennent des décisions favorisant la réduction des émissions.

swissinfo.ch: L’objectif communément admis est de tout faire pour limiter la hausse des températures à 2°C. Certains pays comme Tuvalu exigent une limite à 1,5°C. Qu’elle est la hausse de température acceptable pour l’OMS?

M.N.: Pour nous, il n’y a pas de hausse de température acceptable. Face à ce qui ce passe déjà, il faut des mesures d’adaptation le plus vite possible, ils nous faut des fonds rapidement pour pouvoir soutenir les systèmes de santé et les renforcer, dans les pays les plus pauvres surtout. Nous devons renforcer les systèmes de contrôles vectoriels, les systèmes d’accès à l’eau potable, la réduction des substances polluantes dans l’air.

swissinfo.ch: La santé est-elle suffisamment prise en compte dans les négociations climatiques actuelles?

M.N.: Non, bien sûr. Obtenir qu’il y soit fait mention a pris énormément de temps. Je crois qu’on va y arriver. Nous faisons passer ici à Copenhague un message de bon sens: en prenant des décisions pour réduire les émissions de CO2, vous ne le faites pas seulement pour les ours polaires et l’environnement, mais aussi pour vous, pour la santé de vos enfants. Jusqu’ici, je ne pense pas que ce lien ait suffisamment été fait. Mais nous nous battons dans ce sens.

On a pu voir des signes positifs dernièrement. Les 193 ministres de la santé ont signé une résolution à l’OMS pour dire: il faut travailler sur le changement climatique. Et l’administratrice de l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) a déclaré la semaine dernière que les émissions de gaz à effet de serre sont une menace pour la santé. Et qu’il faut légiférer au nom de la santé. Une excellente nouvelle à nos yeux!

Pierre-François Besson, Copenhague, swissinfo.ch

Selon les climatologues, il reste entre 10 et 20 ans pour inverser la hausse des émissions de gaz à effet de serre. Sans quoi il deviendrait difficile aux humains de s’adapter à la déstabilisation induite du climat.

L’objectif repris pour le conférence de Copenhague était de réduire les émissions de CO2 de manière à ce que la hausse globale des températures ne dépasse pas 2°C par rapport à l’ère préindustrielle.

Le Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) juge nécessaire une réduction de 25% à 40% des émissions des pays industrialisés d’ici 2020 par rapport aux niveaux de 1990.

Il invite les pays riches à émettre de 80% à 95% de CO2 en moins d’ici 2050. Et les pays en développement à réduire leurs émissions de 50%.

Cette organisation basée à Genève est l’autorité directrice et coordonatrice, dans le domaine de la santé au sein de l’ONU.

Elle dirige l’action sanitaire mondiale, définit les programmes de recherche, fixe des normes et présente des options politiques.

Elle fournit un soutien technique aux pays mais aussi suit et apprécie les tendances.

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