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La Suisse n’est plus au coeur de l’Europe

Dix nouveaux pays rejoindront l'Union européenne le 1er mai 2004. swissinfo.ch

Selon Micheline Calmy-Rey, l’élargissement de l’Union européenne va accentuer la marginalisation de la Suisse.

Pour la ministre helvétique des Affaires étrangères, cette ouverture à l’Est explique en bonne partie les tensions actuelles entre la Suisse et ses voisins, l’Allemagne en particulier.

«Avec l’arrivée effective de dix nouveaux membres en mai prochain, l’Union européenne voit son centre de gravité se déplacer vers l’Est.»

Autrement dit, la Suisse ne sera plus au coeur de l’Europe, a rappelé lundi à Genève la cheffe de la diplomatie helvétique devant le Club suisse de la presse qui réunit les correspondants des médias suisses et étrangers accrédités à l’ONU.

«Les problèmes que nous avons avec nos voisins prennent une ampleur nationale en Suisse, explique Micheline Calmy-Rey. Par contre, chez eux, ces mêmes problèmes sont d’ordre régional et n’entrent pas forcément dans les priorités du gouvernement.»

Et la ministre d’ajouter que c’est cette différence qui explique en bonne partie les tensions qui existent actuellement entre la Confédération et l’Allemagne.

Les conséquences d’un choix

«La plupart des contentieux avec Berlin, poursuit Micheline Calmy-Rey, concerne le sud de l’Allemagne, que cela concerne l’aéroport de Kloten ou l’exploitation de fermes allemandes par des paysans suisses.»

Berlin songe en effet à pénaliser les agriculteurs suisses qui achètent à bas prix des terres en Allemagne et écoulent ensuite leur production en Suisse sans verser de taxe à l’Etat allemand.

«La Suisse a choisi de ne pas faire partie de l’Union européenne. En conséquence, elle est traitée comme telle», souligne Micheline Calmy-Rey en faisant cette fois allusion au renforcement des contrôles aux frontières entre la Suisse et l’Allemagne.

Pour elle, cette position va engendrer des problèmes supplémentaires et nécessiter de nouvelles négociations.

«Pour l’heure, reconnaît pourtant Micheline Calmy-Rey, nous n’avons pas d’autres choix que de réagir le plus rapidement possible aux décisions européennes.»

La Suisse va donc intensifier ses relations avec ses voisins européens. Afin d’éviter au maximum les conséquences négatives des décisions qui sont prises sans elle.

Et la cheffe de la diplomatie helvétique d’insister: «Les négociations en cours avec Bruxelles – les bilatérales bis – ne règlent pas tous les problèmes. Et notre position face à une Union européenne de 25 membres sera de plus en plus vulnérable».

La Suisse est incontournable



Cela dit, la Suisse a encore de solides arguments à faire valoir face à ses voisins.

En effet, elle reste – après les Etats-Unis – le deuxième partenaire commercial de l’Union européenne. Et quelque 800’000 Européens travaillent en Suisse.

Et, concernant les questions de sécurité telles que la lutte antiterroriste, «l’Union européenne n’a pas intérêt à laisser une faille dans son dispositif».

De plus, la Suisse participe aussi à la construction européenne. Micheline Calmy-Rey cite l’exemple des nouvelles lignes ferroviaires à travers les Alpes (NLFA). Ces tunnels devisés à plus de 15 milliards de francs permettront de meilleures liaisons entre le nord et le sud de l’Europe.

La Confédération helvétique est également très engagée dans des programmes de développement en faveur de la région des Balkans. Des pays candidats à l’Union européenne.

L’agenda helvétique



Lundi à Genève, la ministre a tenu à rappeler les priorités de la Suisse à l’égard de l’Europe.

Il s’agit, en premier lieu, de la conclusion des bilatérales bis. Des négociations qui sont d’ailleurs dans leur phase finale.

Trois dossiers sont encore en suspens. La fraude douanière et la fiscalité de l’épargne, pour lesquelles Bruxelles attend des concessions de Berne. Et l’espace Schengen, que la Suisse désire intégrer.

Sur le plan intérieur, le gouvernement veut présenter aux Suisses l’ensemble des conséquences – négatives et positives – d’une éventuelle future adhésion. Un objectif que Berne n’entend pas lâcher.

Pour ce faire, le Conseil fédéral (gouvernement helvétique) va rédiger un rapport qu’il présentera avant l’échéance de 2007, année des prochaines élections législatives.

Et quand on lui parle de la nécessité d’une adhésion de la Suisse à l’Union européenne, Micheline Calmy-Rey répond: Ce serait «un pas d’une importance capitale». Mais ce pas-là devra être fait «en toute connaissance de cause».

Et la cheffe de la diplomatie helvétique de conclure à sa manière: «Les Suisses sont des gens pragmatiques».

swissinfo, Frédéric Burnand, Genève

– Entre la Suisse et l’Union européenne, plusieurs dossiers sont en suspens:

– Dans le cadre des bilatérales bis, la fiscalité de l’épargne, la fraude douanière.

– La participation helvétique à l’accord de Schengen et à la convention de Dublin, deux traités qui portent sur la coopération dans les domaines de la justice, de la police, de l’asile et de la migration.

– Au-delà des bilatérales, d’autres problèmes sont encore à régler, notamment la taxation des produits européens réexportés depuis la Suisse.

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