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La Suisse n’oublie pas le bio-terrorisme

Des volontaires américains simulent une intervention sur l'aéroport de Tuzla. Keystone Archive

Afin de parer à une éventuelle attaque terroriste au virus de la variole, la Suisse va créer plusieurs centres de vaccination.

Une étude clinique a permis de vacciner un premier groupe de volontaires du corps médical et de tester l’ancien vaccin.

En marge de la guerre en Irak et du risque accru de terrorisme à grande échelle, voire de bio-terrorisme, la Suisse poursuit ses efforts d’anticipation.

Ces derniers mois, quelques dizaines de volontaires recrutés au sein du corps médical ont été vaccinés contre la variole.

Dans une deuxième étape, leur nombre devrait passer à quelques centaines, ce qui permettrait, le cas échéant, de procéder à la vaccination progressive de la population.

Après les attentats du 11 septembre

Ce scénario catastrophe est en fait la dernière phase des travaux de la cellule de crise créée par la Suisse une semaine après les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis.

Les experts de la «Commission B», des représentants des cantons, de l’armée, du laboratoire de Spiez et de l’Office fédéral de la santé (OFSP), planchent sur cinq scénarios.

Le premier a été, on s’en souvient, l’anthrax. Puis, «plus probable», le risque représenté par la variole s’est précisé, au point que plusieurs gouvernements ont décidé de faire vacciner leurs militaires.

C’est que le virus est très contagieux. Son taux de mortalité atteint au moins 20 à 40% des personnes non vaccinées. Les autres scénarios portent sur le botulisme, la peste et la tularémie.

Un virus en mains douteuses

«Ce qui est terrifiant, au sens de terrorisme, ce n’est pas l’arrivée hypothétique d’un virus génétiquement modifié, mais le virus sauvage de la variole», s’inquiète Pierre-Alain Raeber, responsable du service de surveillance des maladies infectieuses de l’OFSP.

Un virus conservé officiellement dans des centres en Russie et aux Etats-Unis. Mais qui, selon les services secrets américains, serait au mains d’une douzaine de pays «potentiellement terroristes».

Sur cette base, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est en train d’élaborer des scénarios qui commanderont la stratégie de vaccination.

Un vaccin oublié

En cas de menace avérée, si un ou plusieurs cas de variole humaine survenait dans le monde, tout devrait être en place pour que la vaccination soit réalisable dans les plus brefs délais pour le plus grand nombre de personnes.

La Suisse a donc acquis en 2002 – pour 11,8 millions de francs – 3 millions de doses de vaccin contre la variole produits entre 1970 et 1980 et entreposées dans la Pharmacie de l’armée à Ittigen (BE).

Ce vaccin est ancien. Puisque la maladie a disparu de Suisse en 1932. La vaccination a été interrompue à la fin des années 1970. Depuis lors, seul le Centre de médecine sociale et préventive de Zurich était en mesure de traiter les scientifiques amenés à travailler avec la vaccine de la variole.

«C’est à partir de ce centre qu’on s’est mis à réapprendre à vacciner. Car ce vaccin est très délicat, il se fait par scarification de la peau», explique Pierre-Alain Raeber.

Le centre de vaccination de l’Hôpital de Genève est maintenant opérationnel. Il s’agira ensuite de créer d’autres centres susceptibles de procéder à une vaccination de masse.

«Parallèlement, nous avons cherché à mesurer l’efficacité et la sécurité de l’ancien vaccin» précise Pierre-Alain Raeber. Les volontaires de l’étude clinique genevoise ont bien réagi. Des dilutions du vaccin ont même été testées, afin de réduire les effets secondaires.

Scénario catastrophe

Aujourd’hui, les 3 millions de doses dont dispose la Suisse peuvent être divisées en trois sans problème. Mais il s’agit bien de vacciner le moins de personnes possible en «évitant le piège des effets secondaires où le remède ferait plus de mal que de bien», selon Pierre-Alain Raeber.

Les données historiques montrent en effet qu’une personne vaccinée sur mille peut souffrir d’effets secondaires. Des effets qui seront fatals à une voire deux personnes sur un million.

Ainsi, vacciner les 7 millions de Suisses provoquerait la mort d’une dizaine de personnes. En outre, chaque personne nouvellement vaccinée est susceptible de contaminer son entourage. Il est des décisions bien difficiles à prendre.

swissinfo, Isabelle Eichenberger

Une semaine après les attentats du 11 septembre 2001, la Suisse a créé la «Commission B» avec des experts des cantons, de l’armée, du laboratoire de Spiez et de l’OFSP.
Son but est de réunir, trier et diffuser l’information sur les dangers du bioterrorisme.
La Commission B travaille sur 5 scénarios bioterroristes: l’anthrax, la variole, la peste, le botulisme et la tularémie.

– Le virus de la variole est très contagieux. Son taux de mortalité atteint 20 à 40% des non-vaccinés.

– La vaccination est risquée, mortelle dans un ou deux cas sur un million.

– La Suisse a stocké 3 millions de doses de vaccin, chacune pouvant être divisée par 3.

– Le stock de vaccins représente 11,8 millions de francs.

– Le dernier cas de variole a été recensé en Suisse en 1932.

– Les vaccinations ont cessé à la fin des années 1970.

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