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La Suisse prépare des réformes antiterroristes

Depuis quelques semaines, les arrestations des membres d'Al-Qaida se multiplient dans le monde.

Contrairement à ses voisins européens, la Suisse n’a pas démantelé de cellules terroristes. Est-elle suffisamment armée pour lutter contre le terrorisme?

«Si Oussama Ben Laden se cachait en Suisse, pourrions-nous légalement écouter ses lignes téléphoniques?», interroge, avec un ton provocateur, un membre des services secrets suisses. Selon lui, depuis une décennie, Berne est totalement démunie face aux nouvelles menaces.

Pour preuve, avant l’ouverture d’une enquête pénale, la police ne peut officiellement pas surveiller les communications ou le courrier d’un suspect. C’est tant mieux pour le respect des libertés individuelles. Mais comment traquer les terroristes?

L’Office fédéral de la police (OFP) a reçu le mandat de revoir la loi sur le maintien de la sécurité intérieure. «La grande question reste de savoir s’il faut réintroduire les moyens de contrainte préventifs qui prévalaient avant l’affaire des fiches», reconnaît Jean-Luc Vez, patron de OFP.

Les dirigeants d’Al-Taqwa

La société Al-Taqwa, rebaptisée Nada, domiciliée à Lugano, est un exemple significatif. George Bush lui-même a accusé en novembre 2001 cette entreprise de financer l’organisation terroriste d’Oussama Ben Laden.

Plus récemment, les Etats-Unis se sont félicités de la coopération avec l’Italie qui leur a permis de bloquer les comptes de 35 personnes présentées comme des «financiers de la terreur».

Parmi elles, Ahmed Idris Nasredidin et Youssef Nada, deux des principaux dirigeants d’Al-Taqwa, domiciliés à Campione, enclave italienne à l’intérieur du Tessin.

Comment expliquer que la Suisse n’a toujours pas inculpé ces deux personnages? La réponse est simple: le système juridique de la Confédération est différent. Il faut plus que des soupçons avant de livrer des noms à la vindicte populaire.

Plus de 1000 indices terroristes

«Contrairement à des voisins comme l’Allemagne ou la France, la Suisse ne véhicule pas une image de grande puissance. Elle est donc moins une cible pour les terroristes», constate Jacques Baud, auteur d’une «Encyclopédie des terroristes».

Cet officier supérieur a longtemps servi dans les services de renseignement suisses.

La mission de nos services secrets est donc plus orientée historiquement vers l’analyse que dans la recherche de renseignements, comme les pays qui doivent assurer leur sécurité.

«Nous luttons davantage contre les structures logistiques du terrorisme, notamment les circuits financiers, que contre le terrorisme lui-même», ajoute Jacques Baud.

Cela n’a tout de même pas empêché les enquêteurs suisses de recueillir depuis le 11 septembre 2001 plus de «1000 indices terroristes» dans la Confédération.

Al-Taqwa (disparue le 31 décembre 2001) n’en reste pas moins dans la ligne de mire de la police suisse, comme l’a rappelé le procureur général de la Confédération, Valentin Roschacher, à Jimmy Gurulé, sous-secrétaire d’Etat américain au Trésor.

«Cette société a opéré des transferts de fonds difficilement contrôlables», ajoute un responsable des services suisses, rappelant qu’Ahmed Idris Nasreddin, président également de Miga-Malaysian Swiss, possédait d’étranges connections avec certains islamistes indonésiens.

swissinfo/Ian Hamel

«Encyclopédie des terrorismes», par Jacques Baud, Editions Lavauzelle (Paris), 270 pages.

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