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La troisième voie Lausanne Genève toujours dans l’incertitude

Quel chemin prendre pour réaliser la troisième voie ferroviaire entre Genève et Lausanne? Keystone

La Suisse romande compte bien rattraper son retard sur la Suisse alémanique en matière de transport ferroviaire, comme en témoigne sa mobilisation pour une troisième voie entre Lausanne et Genève.

Mais ce projet est incertain, tout comme le réseau qui relie l’ensemble du plateau, dont l’urbanisation est toujours mal perçue en Suisse.

Malgré le signal favorable donné le 18 octobre dernier par le gouvernement fédéral, tout ou presque reste à faire pour réaliser rapidement le projet de troisième voie ferroviaire entre Genève et Lausanne.

«Comme nouveau parlementaire, je vais porter à Berne la voix de Genève et de la Suisse romande concernant une série de projets d’infrastructures, dont le projet de RER (réseau express régional) de l’agglomération franco-valdo-genevoise (Genève et sa région) et la troisième voie entre Genève Lausanne», lance Robert Cramer.

Nouvel élu à la Chambre haute du Parlement, il souligne ainsi la continuité de ce nouveau mandat avec son poste actuel de chef du département du territoire du canton de Genève.

Un projet urgent

De fait, il n’y a pas de temps à perdre: le tronçon Genève-Lausanne est le deuxième plus chargé de Suisse. En 2005, le trafic y a augmenté de près de 30% (moyenne suisse 18%). Résultat: aux heures de pointe, il n’y a plus de places assises dans les trains.

«Nous ne pouvons pas attendre la fin du programme des transversales alpines», ajoute le nouvel élu vert.

Le Conseil fédéral (gouvernement) a bien décidé pour les 15 ou 20 prochaines années d’allouer une enveloppe budgétaire aux infrastructures ferroviaires, qui comprend le raccordement du réseau suisse au réseau à grande vitesse européen, le trafic ferroviaire du plateau et les nouvelles lignes ferroviaires à travers les Alpes (NLFA).

«Mais si l’un de ces chantiers dépense plus que prévu, il faudra faire des économies sur le reste», regrette Robert Cramer, pointant les surcoûts du tunnel du Gothard qui se chiffrent en milliards de francs.

Un financement séparé

Raison pour laquelle Robert Cramer défendra avec d’autres parlementaires l’idée d’un financement séparé pour les surcoûts du Gothard.

Une option qui a de bonnes chances de passer. «Le Conseil fédéral reconnaît que ce projet de troisième voie est prioritaire, ce qui est nouveau. Et dans ce combat pour les lignes ferroviaires de plaine, Vaud et Genève ne partent pas seuls», souligne le responsable genevois.

Une mobilisation que relève Jacques Lévy, professeur à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne: «En Suisse romande, les choses commencent effectivement à bouger.»

Une vision décalée

«Mais la troisième voie est un projet ambigu, ajoute le géographe. Genève et Lausanne sont toujours considérées comme deux villes distinctes, alors qu’il s’agit déjà d’une métropole lémanique où se déplacent non seulement les pendulaires pour leur travail, mais également ses habitants pour leurs loisirs ou leurs besoins extra-professionnels.»

Selon le géographe, c’est donc un RER qu’il faut entre Lausanne et Genève.

«Or, la logique des CFF est toujours interurbaine », estime Jacques Lévy. Le géographe pense également que – pour être en phase avec les projets de liaisons rapides en Europe – la Suisse devrait se doter de ligne de type TGV entre ses principales métropoles.

Un avis que conteste Robert Cramer: «Toute la philosophie de mise en place du réseau ferroviaire par les CFF va dans le bon sens. Les CFF résonnent comme si c’était un grand réseau de transport public urbain, avec un cadencement (tous les quarts, demi-heures) des horaires, ce qui sera encore accentué ces prochaines années.»

«L’avantage du système suisse, poursuit Robert Cramer, est aussi l’immense démocratisation de l’accès au ferroviaire. Et ce contrairement aux TGV qui sont réservés à certaines villes. De plus, l’intégration dans le réseau européen se met en place depuis Genève, Lausanne, Zurich, Bâle.»

L’avance de la Suisse alémanique

Mais ça n’est pas tout. Jacques Lévy pointe du doigt les grandes différences entre la Suisse romande et la Suisse alémanique.

«Les grandes villes de Suisse alémanique sont en avance. Zurich, Bâle et Berne assument le fait d’être en expansion et que cela a des conséquences sur les systèmes de mobilité qu’il faut donc anticiper. »

Et d’enfoncer le clou : «Les S-Bahn (RER) de ces trois villes témoignent d’une logique métropolitaine et même inter-métropolitaine, puisqu’elles se rapprochent de plus en plus en termes de temps de transport. Et elles ont réussi à faire cela, alors que l’essentiel des ressources allait aux tunnels transalpins. »

Ce que réfute en partie Robert Cramer: «Le complément de réseau entre Genève et Lausanne et les projets de réseaux RER (40 km de rayon) autour de Lausanne et de Genève sont totalement en phase avec le développement métropolitain de l’arc lémanique.»

swissinfo, Frédéric Burnand à Genève

La Suisse compte 5 grandes agglomérations en croissance:

La métropole lémanique constituée de 2 pôles: l’agglomération franco-valdo-genevoise (plus de 8 fois le canton de Genève) et l’agglomération Lausanne-Morges.

L’agglomération Berne-Fribourg, la métropole zurichoise, celle transfrontalière de Bâle, tout comme l’agglomération qui se dessine au Tessin à la frontière italienne.

Le territoire de la Suisse (environ 40’000 km2 ) est équivalent à la région Rhône-Alpes en France.

«Il y a en Suisse une barrière mentale à l’encontre des villes et de leur importance. La Suisse a vécu très longtemps dans une sorte de fiction d’un pays de montagnards au milieu de leurs vaches. Ce n’était pas la réalité du pays. Mais une bonne partie de la législation fédérale est conçue selon cette représentation.

Mais cette vision des choses est en train d’être remise en cause. Le projet d’agglomération tel qu’il est demandé aux régions par la Confédération – sans tenir compte des frontières communales, cantonales, voire nationales – est une reconnaissance – certes très nouvelle du fait urbain.»

La troisième voie ferroviaire entre Genève et Lausanne

Le tunnel du Zimmerberg dans la région de Zurich

Le tunnel du Wisenberg entre Bâle et Olten

Le doublement du Lötschberg en Valais

La ligne du pied du Jura dans la région de Bienne

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