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Le Centre culturel suisse de Paris sous tutelle

Keystone Archive

Pro Helvetia a réitéré sa confiance à Michel Ritter, directeur du Centre culturel suisse (CCS) de Paris depuis l'automne dernier.

Mais la Fondation reconnaît les carences de gestionnaire de Michel Ritter. Elle l’engage à remplir pleinement son mandat et à faire des concessions.

Après plusieurs mois de dissensions entre Michel Ritter et ses collaborateurs, le comité directeur de Pro Helvetia a enfin rendu sa décision.

Michel Ritter restera en poste à l’hôtel Poussepin. «Je suis soulagé que mon programme artistique ne soit pas remis en cause», a été la première réaction de ce dernier à la Radio romande.

Toutefois, Pius Knüsel, le directeur exécutif de la fondation a été très clair sur un point: «Le CCSP ne doit pas être uniquement un centre d’art contemporain. Il doit rester ouvert aux autres genres artistiques, comme la danse ou le théâtre par exemple».

Et des mesures d’accompagnement ont été engagées. Un poste de coordinateur sera notamment créé pour régler les aspects techniques et de fond.

Yvette Jaggi, présidente de Pro Helvetia a par ailleurs reconnu les «réelles faiblesses de gestionnaire de Michel Ritter». C’est pourquoi le rôle de la direction administrative sera aussi rehaussé. Et les contacts entre Paris et la direction de Pro Helvetia se feront désormais sur une base mensuelle.

Mais la Vaudoise a toutefois relativisé cette déficience. Et de mettre en cause le refus de collaborer de l’équipe en place qui aurait dû le seconder dans la gestion du centre.

Et les collaborateurs?

Le comité de direction de Pro Helvetia a pris sa décision en suivant l’avis de la présidente Yvette Jaggi, contre celui de Pius Knüsel, qui estimait qu’il fallait choisir entre l’équipe et Michel Ritter.

Quant à la poursuite des rapports de travail entre les deux parties, tous deux ont reconnu qu’elle allait être difficile. D’autant que l’équipe en place ne s’est pas gênée de critiquer publiquement son directeur.

«Soit la collaboration recommence à zéro, je ne parle même pas de la poursuivre. Soit elle s’arrête», affirme Yvette Jaggi. Elle regrette par ailleurs qu’un tel blocage ait eu lieu, «inimaginable» pour cette habituée des milieux culturels.

Toutefois, aucune décision globale n’a été prise concernant le personnel. Pro Helvetia examinera individuellement le cas de ceux qui ne souhaiteraient pas continuer à travailler avec Michel Ritter.

Lourdeur institutionelle

Il faut dire que cette crise et les rumeurs qui l’ont accompagnée ont fait couler pas mal d’encre. Au point que les milieux artsitiques se sont mobilisés. Deux pétitions, l’une contre, l’autre pour Michel Ritter sont parvenues à Pro Helvetia.

Du côté des contres, on est évidemment consternés par l’issue qui lui est donnée . «C’est un exemple de psychologie institutionnelle, quand la direction d’une institution a de la peine à se désavouer. Surtout si le désaveu vient des employés, donc du bas de l’échelle», lance Alain Botarelli, distributeur de film et fondateur de l’Agence suisse du court-métrage.

Ce dernier est l’initiateur de la pétition signée par 120 cinéastes et auteurs, envoyée lundi à Pro Helvetia. Elle apporte son soutien à l’équipe du CCCSP Paris et demandait à l’institution de changer de politique.

Du pain béni pour la droite dure

Alain Botarelli craint aussi les conséquences politiques de cette crise. Il estime que l’image du Centre culturel suisse, des artistes et de la culture en général en a pris un coup.

«La droite va se ruer dans la brèche et stigmatiser la direction chaotique de Pro Helvetia». Il n’est d’ailleurs pas le seul à craindre qu’elle n’en profite pour justifier la diminution de subventions au CCSP.

Pierre Keller, le directeur de l’ECAL, l’Ecole cantonale d’arts de Lausanne va même plus loin. Il demande carrément la tête d’Yvette Jaggi et Pius Knüsel. Qui ont, à ses yeux, été incapables de gérer cette crise «lamentable».

«C’est indigne de la part de patrons de la culture. Et quand la culture gère mal ses affaires, les politiques ne donnent plus d’argent!»

Il fustige également le manque de cohérence de la direction de Pro Helvetia qui a nommé Michel Ritter en connaissance de cause et à l’unanimité. Précisément pour sa vision originale de la mission d’un centre culturel à l’étranger. «Il faut lui laisser faire ses preuves».

Manipulations politiques

Yvette Jaggi reconnaît que la décision fut longue à prendre. Si le blocage entre les parties n’avait été si fort, le processus aurait pu être écourté de trois semaines au maximum.

Elle regrette par contre la violence des attaques clairement dirigées envers Pro Helvetia à travers la crise du CCSP. Elle n’hésite pas à parler de manipulation de la part de certains milieux qui aimeraient bien voir la culture perdre une bonne partie de ses subventions..

Le Parlement ainsi que le gouvernement sont en effet en discussion sur les budgets de la Confédération pour la période 2005 à 2008. Et cherchent par tous les moyens à faire des économies.

«Mais dans le fond, cette crise aura au moins eu le mérite d’ouvrir la discussion sur le rôle des centre culturels suisses à l’étranger», conclut Yvette Jaggi.

swissinfo, Anne Rubin

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