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Le certificat Covid suisse, ce bâtisseur de murs

© Keystone / Gaetan Bally

Dès lundi, l’extension du passe Covid entrera en vigueur en Suisse. Les personnes vaccinées avec AstraZeneca, Sputnik ou Sinopharm n’obtiendront pas de certificat suisse. Une partie des touristes et des Suisses de l’étranger devront rester à l’extérieur.

La situation que des milliers de personnes craignaient se produira en Suisse dès la semaine prochaine. «Nous sommes en train de créer une société à deux classes», dénonce Franz Muheim, concerné au premier chef. Franz Muheim vit en Écosse, y a été vacciné contre la Covid-19 avec AstraZeneca et se trouve actuellement en Suisse.

Des milliers de personnes, doublement vaccinées, vivent en Suisse, mais le pays ne reconnaît pas leur vaccination. Dès lundi, leur vie quotidienne en Suisse sera massivement perturbée. Elles devront payer pour être testées si elles veulent continuer à participer à la vie publique. Restaurants, vie culturelle, fitness: sans certificat, pas question de franchir la porte d’entrée.

À court terme, cette situation affectera celles et ceux qui ont reçu les vaccins suivants:

  • AstraZeneca (utilisé dans 181 pays)
  • Sinovac (39 pays)
  • Sputnik (70 pays)
  • Sinopharm (65 pays)

Suisses de l’étranger et touristes concernés

Le problème a déjà été identifié il y a plusieurs semaines. D’une part, l’Organisation des Suisses de l’étranger (OSE) a demandé au Conseil fédéral (gouvernement) d’inclure tous les vaccins reconnus par l’OMS dans le certificat Covid suisse. D’autre part, Suisse Tourisme, le lobby des hôteliers et des restaurateurs, souligne depuis des semaines que la Suisse créerait un problème pour ses hôtes étrangers avec ce certificat.

Mais il ne s’est pratiquement rien passé de tout l’été. Cette semaine, l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) a annoncé que le certificat serait obligatoire à partir de lundi. À la fin du communiqué, on peut y lire: «Toutes les personnes ayant été vaccinées à l’étranger avec un vaccin homologué par l’Agence européenne des médicaments (EMA) et ayant leur domicile en Suisse ou entrant en Suisse doivent pouvoir demander un certificat Covid suisse.»

Concrètement, cela signifie que les personnes vaccinées avec AstraZeneca recevront probablement un certificat. Toutefois, on ne sait pas encore quand cela se produira. En tout état de cause, les cantons ont jusqu’à mardi prochain pour se prononcer. En revanche, toute personne ayant reçu un vaccin chinois ou russe sera à l’avenir traitée en Suisse comme une personne non vaccinée – avec tous les inconvénients que cela comporte. «L’accès au certificat ne doit toutefois pas être étendu à tous les vaccins reconnus par l’OMS», précise l’OFSP.

L’hôtellerie monte au front

«Cela va dans la bonne direction, mais nous n’allons pas lâcher l’affaire», affirme Ariane Rustichelli, directrice de l’OSE. Jusqu’à présent, le gouvernement n’a pas répondu à la demande du lobby des Suisses de l’étranger.

Le secteur de la gastronomie et du tourisme s’insurge de son côté contre les projets actuels. Les spécialistes du tourisme préviennent qu’à partir de lundi, les clientes et clients étrangers devront dîner dans leur chambre ou dans des pièces séparées, sous peine d’être constamment contrôlés.

Andreas Züllig, président d’Hotelleriesuisse, a déclaré au journal alémanique «Blick»: «Il y aura alors des personnes issues de marchés entiers qui n’entreront pas du tout.» Les hôtes de la Chine, des pays du Golfe et de l’Inde, qui sont très importants pour la Suisse, sont particulièrement désavantagés.

Des touristes indiens sur le Jungfraujoch. Keystone / Alessandro Della Bella

Ne pas fâcher Bruxelles

La question pourrait bientôt s’inviter dans les débats parlementaires. Conseiller national (député) libéral-radical (PLR/droite) et membre du Conseil de l’Organisation des Suisses de l’étranger, Laurent Wehrli pourrait mettre le sujet à l’agenda de la prochaine session parlementaire, qui débute la semaine prochaine. Il attend que le Conseil fédéral annonce la liste des vaccins à reconnaître mercredi prochain, «avant que je me décide à soumettre une intervention parlementaire.» 

Nicolo Paganini est président de la Fédération suisse du tourisme et également membre du Conseil national (Centre). Il s’abstient pour l’instant d’emprunter la voie parlementaire. «On perd beaucoup de temps avec une motion», dit-il à SWI swissinfo.ch, ajoutant que le problème doit être résolu plus rapidement.

Aux yeux de Nicolo Paganini, le point de friction réside dans la relation entre la Suisse et l’Union européenne. Pour la Confédération et le secteur du tourisme, la reconnaissance du certificat suisse dans l’UE est importante. «Ils ne veulent pas prendre de risque», dit-il. D’où la peur de reconnaître unilatéralement les vaccins qui ne figurent pas sur la liste de l’UE. «Néanmoins, des améliorations sont encore nécessaires», estime-t-il. La Fédération suisse du tourisme mène des discussions à cet effet.

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