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Le forcing de Carla Del Ponte

La magistrate est déterminée à mener sa tâche jusqu'au bout. Keystone Archive

Procureure du Tribunal pour l’ex-Yougoslavie, la magistrate suisse met la Communauté internationale face à ses responsabilités. Elle exige l’arrestation de trois criminels de guerre.

Récemment privée de son mandat pour le Rwanda, Carla Del Ponte ne baisse pas les bras.

Il y a huit jours, le Conseil de Sécurité de l’ONU retirait à Carla Del Ponte sa responsabilité de procureure du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR).

Selon Kofi Annan, le secrétaire général de l’ONU, cette décision visait à accroître «l’efficacité des deux institutions».

Dans les faits, elle résulte des pressions du gouvernement du président Paul Kagamé. Le Rwanda n’appréciait pas la volonté de la Suissesse de mener des enquêtes sur les massacres commis par ses troupes lors de son arrivée au pouvoir, en 1994, après le génocide de près d’un million de Tutsis.

Une équipe entièrement opérationnelle

«Attristée» mais résignée par cette décision qu’elle avait combattue, la Suissesse ne baisse pourtant pas les bras. Bien au contraire.

D’une part, Carla Del Ponte a défendu son bilan de quatre ans au Tribunal international pour le Rwanda.

«Le travail que nous avons accompli à Arusha et à Kigali facilitera la tâche de mon successeur qui trouvera une équipe entièrement opérationnelle», a-t-elle déclarée lors d’une conférence de presse.

D’autre part, Carla Del Ponte voit les avantages induits par la décision de son patron: désormais, elle aura tout le temps en tant que procureure du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) de se consacrer exclusivement à son mandat.

Trois priorités

Ses trois priorités? «Mener à bien toutes nos enquêtes en 2004, aider les juges à finir les procès en première instance en 2008 et en appel en 2010. Nous sommes d’ailleurs prêts à commencer 19 procès. Enfin, je veux obtenir le transfert à La Haye de tous les fugitifs».

Depuis des années, Carla Del Ponte réclame les arrestations des anciens leaders serbes de Bosnie, Radovan Karadzic et Ratko Mladic (accusés deux fois de génocide depuis 1995), ainsi que du général croate Gotovina (inculpé de crimes contre l’humanité pour le massacre de 150 Serbes).

Désormais, elle exige «qu’ils nous soient livrés avant la fin de l’année».

En octobre, Carla Del Ponte fera rapport au Conseil de sécurité, qui lui a officiellement notifié son obligation de se conforter à une «stratégie d’achèvement».

L’OTAN montrée du doigt



D’ores et déjà, elle prévient: «Le président du Tribunal l’a dit avant moi: pas question de fermer les portes du Tribunal sans avoir jugé ses principaux accusés», y dira en substance la procureure.

Mais Carla Del Ponte est dépendante de la volonté des Etats. «Ratko Mladic se trouve en Serbie», affirme-t-elle.

«J’attends de Belgrade qu’elle le transfère immédiatement». Karadzic, lui, se cache dans le sud est de la Bosnie. 12’000 soldats de l’OTAN sont stationnés, sous commandement américain, dans le pays.

Pour l’instant, les rares opérations visant le fugitif n’ont pas abouti. «Maintenant que j’aurai le temps de me concentrer uniquement sur l’ex-Yougoslavie, l’OTAN verra souvent cet ennuyeux procureur du TPI», plaisante Carla Del Ponte.

swissinfo, Alain Franco

– Le Conseil de sécurité des Nations Unies a séparé le double mandat confié à Carla Del Ponte, procureur général des tribunaux pour les crimes commis au Rwanda et dans l’ex-Yougoslavie.

– Depuis que le mandat pour les crimes commis au Rwanda lui a été retiré, la magistrate peut mobiliser toute son attention sur ceux qui ont été perpétrés en ex-Yougoslavie, dont le tribunal siège à La Haye.

– Carla Del Ponte vient d’être reconduite comme procureure du TPI pour un mandat de quatre ans.

– La Tessinoise exige que Radovan Karadzic, Ratko Mladic et le général croate Ante Gotovina soient livrés au tribunal d’ici la fin de l’année.

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