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Le prix Grüninger honore un héros rwandais

La Fondation Paul Grüninger récompense un Rwandais pour le courage dont il a fait preuve pendant le génocide de 1994.

Damas Gisimba est le deuxième lauréat du prix créé à la mémoire du commandant de police saint-gallois, qui avait sauvé des réfugiés à la fin des années 30.

La Fondation Paul Grüninger rend hommage, ce vendredi à Saint-Gall, «à la détermination et au courage inestimables» de Damas Mutezintare Gisimba pendant le génocide rwandais, il y a presque dix ans.

Au printemps 1994, quelque 800’000 personnes – surtout des Tutsis – ont été massacrées dans le génocide au Rwanda. Toute personne s’opposant à la meute des assassins risquait sa propre vie.

Et pourtant, Damas Gisimba, directeur d’un orphelinat créé par son père à Nyamirambo, à Kigali, protégea ses orphelins et résista à la propagande de la haine.

Sans considération de son origine ethnique hutue cet homme, alors âgé de 32 ans, marié à une femme tutsie, a caché et protégé plus de 80 adultes et environ 300 enfants contre les assassins.

La Fondation précise: «Il les a hébergés et nourris malgré les pires difficultés. A de nombreuses reprises, au péril de sa propre vie, il s’est opposé au fait de livrer des gens aux criminels qui exigeaient qu’il les leur remette».

Le prix de la réhabilitation

Le Prix Paul Grüninger est décerné par la Fondation du même nom, créée en 1998 en hommage à Paul Grüninger, ancien commandant de la police cantonale saint-galloise. Lequel, malgré les interdictions, a laissé entrer en Suisse des centaines de réfugiés, en grande partie juifs, de 1938 à 1939.

Licencié avec effet immédiat en 1939, Paul Grüninger est mort en 1972 dans la misère et l’indifférence générale. Il a fallu attendre 1993 pour que le monde politique le réhabilite, une décision confirmée par la justice en 1995.

Avec la somme de 1,3 million de francs finalement versée par le canton de Saint-Gall à titre de dédommagement aux descendants de Paul Grüninger, la Fondation a été créée en 1998 pour rendre hommage «aux personnes et aux organisations qui ont fait preuve d’humanité, de courage et d’indépendance d’esprit particuliers».

Sur proposition de Human Rights Africa, organisation africaine de défense des droits humains, le conseil de la Fondation Paul Grüninger a donc décidé d’accorder son prix 2004, le deuxième de son histoire, à Damas Gisimba.

Ce prix de 50’000 francs est décerné depuis 2001 tous les trois ans. La première fois, il avait été octroyé à une Afghane, la doctoresse en médecine Sima Samar. Pour le second prix, en 2004, plus de 40 candidatures en provenance de quatre continents, ont été déposées.

Un héros modeste

S’exprimant face à la presse venue l’accueillir jeudi à l’aéroport de Zurich Kloten, Damas Gisimba a notamment déclaré: «Je voyais que tout le monde était en danger. Je me suis dit que, s’il faut mourir, autant mourir après avoir fait quelque chose».

Et le Rwandais de préciser avec modestie qu’il n’a pas été le seul à aider des victimes au Rwanda.

De son côté, Human Rights Africa, l’organisation non gouvernementale qui a présenté sa candidature, cite de nombreux témoignages, dont celui d’une réfugiée de l’orphelinat: «Il n’attendait pas de récompense de la part de ceux qu’il a protégés puisqu’il ne savait pas s’il allait survivre.»

Il est resté dans «son» orphelinat, comme ses voisins hutus qui, il y a dix ans, avaient fait la chasse aux Tutsis. Le Centre Mémorial Gisimba (du nom de son père) compte aujourd’hui quelque 160 enfants, dont certains déjà présents il y a dix ans.

swissinfo

Le Prix 2004 est décerné à Damas Gisimba, directeur d’un orphelinat, parmi 40 candidatures de quatre continents.
Il est venu en personne en Suisse pour recevoir le prix à Saint-Gall, au siège de la Fondation.
Le Prix 2001 avait été attribué à Sima Samar, doctoresse afghane, pour son travail auprès des réfugiés.

– La Fondation Paul Grüninger a été créée en 1998 en hommage à l’ex-commandant de la police cantonale de St-Gall qui, bravant les interdictions, a sauvé des réfugiés, notamment juifs, en 1938/39.

– Il est mort dans la misère et l’oubli en 1972 et n’a été réhabilité définitivement qu’en 1995.

– Décerné pour la première fois en 2001, la Fondation est dotée des 1,3 million de francs versés par St-Gall en dédommagement aux descendants de Paul Grüninger.

– Le Prix, d’un montant de 50’000 francs, est décerné tous les trois ans «pour humanité et courage particuliers».

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