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Le procès suisse de l’affaire Elf s’est ouvert

Le procès doit retrouver la trace de 46 millions de francs qui ont passé par la Suisse. Keystone

Cinq personnes comparaissent depuis lundi devant la cour correctionnelle de Genève pour blanchiment d’argent dans le cadre de l’affaire Elf.

Elles sont accusées d’avoir détourné 46 millions de francs pour le compte d’Alfred Sirven, ex-numéro deux du groupe pétrolier.

Les cinq suspects répondent devant la cour correctionnelle genevoise avec jury de blanchiment aggravé commis en bande et par métier et de faux dans les titres.

Ils auraient tenté de dissimuler durant quatre ans une partie des 250 millions de francs détournés par Alfred Sirven, en fuite aux Philippines dès 1997.

Les prévenus, quatre hommes et une femme liés à la société K&M Finance, risquent jusqu’à cinq ans de réclusion. Le Ministère public leur reproche d’avoir mis sur pied un système financier complexe afin de masquer l’origine douteuse des fonds qui leur avaient été confiés.

Certains d’entre eux se seraient même enrichis au passage de plusieurs millions de francs.

Après l’arrestation d’Alfred Sirven, au printemps 2001, la justice suisse avait récupéré quelque 11 millions de francs sur 46. Une cinquantaine de témoins sont cités à la barre pour ce procès qui a nécessité une enquête de quatre ans en Suisse et qui devrait durer deux semaines.

Tentative de renvoi

Le procès qui s’est ouvert lundi s’annonce laborieux. Avant même l’ouverture, la défense des cinq accusés a tenté en vain d’obtenir son renvoi. Selon elle, il n’était pas cohérent de juger les protagonistes suisses de l’affaire avant de connaître le sort définitif que réserve la justice française à Alfred Sirven.

L’ancien grand argentier d’Elf, personnage clé de l’affaire, a certes été condamné l’an dernier à Paris à cinq ans de prison ferme pour les détournements qu’il a commis. Mais ce jugement est frappé d’un appel, a rappelé Christian Luscher, l’avocat d’un des accusés. Un nouveau procès doit se tenir le mois prochain en France.

En attendant le jugement définitif, Alfred Sirven est présumé innocent, a précisé l’avocat. Il n’est donc pas possible, tant que ce procès en appel ne trouve pas d’épilogue, d’affirmer que l’argent qui aurait été blanchi en Suisse soit d’origine criminelle, a plaidé M. Luscher.

«Nous devrions renvoyer les débats jusqu’à ce que nous y voyions plus clair dans le crime en amont», a poursuivi l’avocat de la seule femme accusée, David Bitton. Il sera difficile de faire l’économie du jugement français, a renchéri le bâtonnier Marc Bonnant, qui défend dans cette affaire un ressortissant grec.

Soupçons suffisants



Cette argumentation a été combattue par le procureur général de Genève, Daniel Zappelli ainsi que par l’avocat d’Elf, Bruno de Preux. Une condamnation existe pour Alfred Sirven, a rappelé M. Zappelli. Il a qualifié cette demande de renvoi du procès en attendant le jugement en appel de «poudre au yeux».

La présidente de la Cour correctionnelle, Antoinette Stalder, a finalement suivi le raisonnement du Ministère public et de la partie civile, et a rejeté la demande de renvoi du procès.

Mais les principaux acteurs de cette tentaculaire affaire qui a secoué la France ne viendront pas témoigner à Genève. Outre Alfred Sirven, André Tarallo, le «Monsieur Afrique» d’Elf, l’ex-PDG du groupe pétrolier, Loïk Le Floch-Prigent, ne pourront pas être entendus.

swissinfo et les agences

– Alfred Sirven a été reconnu coupable de recels d’abus de biens sociaux pour quelque 250 millions de fr. par la justice française.

– Les cinq accusés auraient blanchi 46 millions de fr. pour le compte de l’ancien no 2 du groupe pétrolier français, dont 11 millions ont été retrouvés en 2001.

– L’enquête sur le volet suisse de l’affaire Elf a duré 4 ans.

– Le procès prendra deux semaines et 50 témoins seront entendus.

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