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Les combats gênent la coopération suisse au Népal

La police anti-émeute patrouille dans les rues de Kathmandou. Keystone Archive

Les coopérants suisses au Népal luttent pour poursuivre leurs projets alors que le pays est la proie d’une nouvelle explosion de violence.

Des émeutes ont éclaté la semaine dernière, après l’exécution de douze travailleurs népalais en Irak. Les affrontements ont causé la mort d’au moins deux personnes.

La Direction suisse du développement et de la coopération (DDC) est constamment en butte avec la guérilla maoïste, active dans le royaume himalayen depuis une dizaine d’années.

La DDC mène plusieurs projets dans le pays, notamment dans le développement rural, la construction de routes et de ponts ainsi que la formation professionnelle.

Au lendemain de l’annonce de l’exécution d’un groupe de travailleurs népalais par un mouvement islamiste irakien, des attaques ont été lancées contre une mosquée et d’autres institutions islamiques.

Peur et anarchie

Au bureau de la DDC à Kathmandou, Jörg Frieden raconte que les employés ont été paniqués. Le bureau a dû être fermé temporairement quand un couvre-feu a été instauré.

«Pour la première fois depuis que je suis au Népal, j’ai eu l’impression de courir un réel danger, parce que cette violence anarchique échappait à tout contrôle, raconte-t-il à swissinfo. Les autorités ont tout simplement disparu pendant au moins quelques heures.»

La population de Kathmandou s’est également montrée très critique à l’égard des forces de l’ordre. Elle a notamment exprimé son incompréhension face au fait que les émeutiers n’ont pas pu être stoppés.

«La police se contentait de regarder la mise à sac des magasins et des maisons», raconte à swissinfo un témoin, qui a assisté à l’attaque contre une mosquée.

La guérilla maoïste

Jörg Frieden indique que la guérilla maoïste, qui se bat pour renverser la monarchie depuis 1996, a compliqué le travail de la DDC ces dernières années.

«Nous avons dû mettre sur pied tout un système de sécurité pour que nos employés, en majorité népalais, ne courent aucun danger. En fait, c’est tout notre travail d’aide à la population qui a été ralenti», explique-t-il.

Selon les rebelles eux-mêmes, les deux tiers du Népal seraient sous leur contrôle.

Autorisation de travailler

Jörg Frieden ajoute que les rebelles imposent parfois à la DDC de leur demander l’autorisation de travailler dans certaines zones et même contre paiement.

«Nous ne pouvons pas répondre à ces demandes et lorsque c’est arrivé, nous avons dû suspendre notre travail pendant des semaines, voire des mois.»

Mais la rébellion n’a jamais forcé la DCC à abandonner complètement un projet et, après une période difficile au début de l’année, le coopérant suisse estime que la situation s’est en fait améliorée ces derniers mois.

«Cette année, trois ou quatre projets ont été entravés par des problèmes avec les maoïstes, mais j’ai l’impression que, depuis juin, la pression s’est allégée et nous avons pu reprendre nos activités presque partout.»

Le rôle du gouvernement

Selon Jörg Frieden, l’absence de soutien du gouvernement complique également le travail de la DDC.

«Ces dernières années, nous avons dû adapter nos activités, déclare-t-il. Maintenant, nous réalisons la plupart de nos projets grâce aux collectivités locales qui sont en mesure de travailler dans des zones où la présence gouvernementale est très limitée, voire totalement absente.»

La Suisse accorde son aide au Népal depuis quarante ans, dans le but de réduire la pauvreté et de promouvoir le développement. Mais la violence durera tant que la situation politique du pays ne sera pas résolue, estime Jörg Frieden.

Un sentiment de frustration

«Cette dernière explosion de violence rappelle qu’il y a ici des milliers de jeunes sans formation ni perspectives… Je pense qu’elle est due à leur sentiment de frustration.

A plusieurs reprises, la Suisse a offert son assistance au Népal et, en mars 2003, elle a accueilli à Berne des représentants du gouvernement et des rebelles pour l’ouverture de leurs premières négociations.

Les discussions ont porté sur la signature d’un cessez-le-feu, appliqué quelques semaines auparavant, avant d’être rompu en août 2003.

«La DDC essaie de faire de son mieux au niveau local, dit encore Jörg Frieden, notre programme de formation professionnelle vise justement les jeunes gens qui veulent émigrer dans l’espoir de gagner un salaire décent à l’étranger.»

«Mais, bien sûr, notre travail reste une toute petite contribution pour régler un énorme problème», conclut-il.

swissinfo, Billi Bierling à Kathmandou
(Traduction: Isabelle Eichenberger)

La DDC accorde son aide au Népal depuis 40 ans, notamment dans l’agriculture, la construction de routes et la formation professionnelle.
En 1996, les rebelles maoïstes ont entamé leur lutte pour remplacer la monarchie par une république communiste.
Quelque 9000 personnes ont perdu la vie depuis lors dans le royaume himalayen.

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