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Les employées de Migros peuvent porter le voile

Pour Migros, le port du voile islamique ne pose pas de problèmes particuliers. swissinfo.ch

Au nom du respect de la liberté de religion, le géant orange n'interdira pas à ses caissières et à ses vendeuses de porter le voile islamique.

Cela dit, chaque entreprise du groupe Migros pourra décider des mesures à prendre de cas en cas et en tenant compte des sensibilités régionales.

En octobre, une caissière d’une filiale zurichoise avait exprimé le désir de porter le foulard islamique au travail, ce qui lui avait d’abord été refusé. L’affaire, relayée par le Tages-Anzeiger, avait fait grand bruit dans les médias alémaniques.

Les responsables du personnel de la Fédération des coopératives Migros se sont donc penchés sur cette épineuse question. Dans un communiqué publié jeudi, ils écrivent qu’ils ont finalement décidé de ne pas interdire le port du voile.

Liberté de religion



«La constitution fédérale nous l’interdit, car elle garantit la liberté de religion, explique Eve Pfeiffer, porte-parole de la coopérative Migros Zurich. Or le voile islamique est un symbole religieux.»

De plus, la charte de la Migros garantit le respect des différences religieuses, culturelles ou sexuelles. Autre critère: l’interdiction de discrimination par le contrat collectif de travail et la Loi sur le travail.

«Nos conditions de travail excluent toute discrimination religieuse, déclare jeudi dans les colonnes du Temps Monika Weibel, porte-parole de la Fédération des coopératives Migros à Zurich. C’est pourquoi nous souhaitons considérer le désir de nos employées de porter le voile.»

Employées déplacées



La décision de ne pas interdire le port du foulard et de ne licencier personne pour cette raison a été prise vendredi dernier déjà par les chefs du personnel des dix coopératives Migros.

Le communiqué publé jeudi la Fédération des coopératives Migros précise qu’il appartient à chaque entreprise du groupe Migros de décider en fonction des sensibilités régionales.

Quoi qu’il en soit, les caissières ou vendeuses qui seront agressées devraient être déplacées, soit dans une autre filiale, soit dans un secteur où elles ne sont pas en contact avec la clientèle.

«Dans certains endroits où la clientèle risque de très mal réagir, nous ne pouvons autoriser le port du voile», précise Urs Stolz dans les colonnes du Temps.

Et le chef du personnel de la coopérative de Zurich de poursuivre: «Si un tel cas se présente, l’employée sera déplacée dans une autre succursale où une solution sera trouvée».

«La direction est en effet tenue de protéger l’employée, dit Urs Stolz. Mais en aucun cas elle ne lui demandera de renoncer au voile.»

Le chef du personnel rappelle au passage que les réactions des clients face au cas de la caissière musulmane en octobre ont été hostiles «à 80%».

Le port d’un signe religieux ne se heurte toutefois pas systématiquement à de l’agressivité. «Des juifs et des Sri-Lankais portant la kippa ou le turban travaillent aussi chez Migros, sans problème», rappelle Urs Stolz.

«Un argument qui ne tient pas la route»



Les arguments de Migros pour autoriser le port du voile sont parfaitement clairs. Pourtant, la logique du géant orange ne convainc pas tout le monde.

L’argument ne tient pas la route, estime ainsi l’ancien président du Tribunal fédéral et avocat Claude Rouiller. Selon lui, la Migros se trompe en invoquant la liberté de religion.

Et d’expliquer que ce droit fondamental inscrit dans la Constitution s’applique au secteur public, aux rapports entre l’Etat et les citoyens, et non au secteur privé.

Dans ce dernier domaine, les rapports de travail sont dominés par la liberté contractuelle.

Ainsi les employeurs ont le droit de ne pas engager une personne parce qu’elle ne leur convient pas. ils ont aussi la possibilité d’adopter des règles de comportement dans l’intérêt de leurs entreprises.

«Il en va différemment du congé pour des raisons religieuses qui serait vraisemblablement un congé abusif», précise cependant Claude Rouiller.

Parallèlement, la loi n’interdit pas aux employés d’adopter un comportement religieux s’il n’interfère pas sur leur travail.

«Les employeurs peuvent tolérer ou ne pas tolérer», résume l’avocat, qui plaide personnellement pour la tolérance religieuse et salue «l’ouverture vers la convivialité» que représente la décision de la Migros.

swissinfo et les agences

– Les autres grands distributeurs sont aussi confrontés à la question du voile.

– La Coop règle le problème au cas par cas, mais elle estime que c’est d’abord le souci du client qui prime.

– Chez Denner, les gérants de satellites travaillent de manière autonome, la situation varie donc d’un magasin à l’autre.

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