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Les hooligans, un creuset pour l’extrême droite

Arrestation d'un hooligan impliqué dans une bagarre. Keystone

Selon la police fédérale, les milieux d'extrême droite tentent de recruter de nouveaux membres parmi les supporters de football et de hockey.

La situation est variable selon les stades, mais pourrait évoluer en vue de l’Euro 2008.

Des contacts se nouent entre les hooligans, explique Danièle Bersier, porte-parole de l’Office fédéral de la police (fedpol.ch). Ces liens sont ensuite utilisés par les mouvements d’extrême droite pour attirer les hooligans à leurs manifestations. Premier pas vers un recrutement.

En Suisse, on compte entre 200 et 300 hooligans, estime la police de sûreté de la ville de Zurich qui possède une cellule consacrée aux «fans de type C», c’est-à-dire à forte propension à la violence. Leur nombre est en légère augmentation.

Il est difficile de déterminer combien d’entre eux font partie d’une mouvance d’extrême droite. La police se renseigne auprès des clubs. Mais les chiffres sont biaisés. Un spectateur qui assiste à plusieurs matches sera comptabiliser plusieurs fois.

Ensuite, les symboles vestimentaires des hooligans et des extrémistes de droite sont similaires. Difficile dès lors de les distinguer les uns des autres.

Unis dans la bagarre

Les hooligans sont «racistes certes, mais apolitiques», écrit fedpol.ch dans son dernier rapport sur la sécurité intérieure de la Suisse.

A Zurich, certains d’entre eux tentent même de se démarquer des milieux d’extrême droite, explique Christoph Vögeli, chef de la police de sûreté zurichoise. En revanche, à Berne ou à Lugano, des connivences existent.

Ce qui est certain, c’est que pour les skinheads, ces rendez-vous sportifs sont l’occasion d’affronter un ennemi: les supporters de l’équipe adverse et les forces de l’ordre.

Les extrémistes de droite se mêlent alors aux hooligans. Le 14 février 2004, par exemple, six extrémistes de droite ont été arrêtés à la suite d’une bagarre opposant supporters du HC Fribourg Gottéron et du CP Berne.

Propos nazis dans les tribunes

La saison dernière, 15 à 20 jeunes néo-nazis ont manifesté lors des matchs de hockey des Lions de Zurich. Ils criaient des slogans, notamment «Heil Hitler», se souvient Christoph Vögeli. Ils ont été contrôlés et menacés d’interdiction de stade en cas de récidive.

A Genève, les tribunes du FC Servette étaient occupées au début des années 90 par un groupe dénommé «Supporters 88», le «8» faisant référence à la huitième lettre de l’alphabet (H) et le «88» à «Heil Hitler».

Selon la police genevoise, ce groupe s’est disloqué en 1995-1996, mais un drapeau réapparaît encore de temps en temps.

Analyse du discours

En Angleterre, cela fait longtemps qu’un groupe néo-nazi comme «Combat 18» utilise les matchs de football pour faire passer ses messages, explique le cinéaste Daniel Schweizer, auteur de deux documentaires sur les néo-nazis.

Selon le réalisateur, les autorités, au-delà de la surveillance et de la répression en cas de violence, devraient analyser de façon plus approfondie les discours tenus par ces milieux.

Daniel Schweizer prépare actuellement un long-métrage sur le «White Power». «Ce que nous découvrons dépasse la fiction. Il y a urgence à ouvrir les yeux sur ce qui est dit».

Le discours est en train de changer, explique-t-il. Il est passé de l’idée de la supériorité de la «race blanche» à celle de sa disparition en raison du métissage de la société. La «guerre raciale» est d’ailleurs prônée dans une partie des milieux d’extrême droite.

Mesures en vue de l’Euro 2008



L’Euro 2008, qui aura lieu en Suisse et en Autriche, pourrait éventuellement servir de tribune pour ces groupes. En charge de la sécurité de l’événement, la police fédérale n’a pas encore analysé le danger de politisation.

Le gouvernement devrait tout prochainement nommer un groupe de travail «sécurité Euro 2008». Il sera formé de représentants des différents offices concernés, des polices cantonales, des villes qui accueilleront un match et des organisateurs du championnat.

Par ailleurs, une nouvelle loi, préparée par le Conseil fédéral, devrait être approuvée en vue de l’Euro 2008. Elle prévoit notamment le fichage des supporters violents.

Selon fedpol.ch, la Suisse n’a pas actuellement de bases légales qui lui permettent de lutter efficacement contre le hooliganisme. Plusieurs pays européens, dont l’Autriche, disposent déjà de législations plus poussées.

Or, à long terme, selon l’Office fédéral de la police, la collaboration internationale entre les autorités dans la lutte contre le hooliganisme s’avérera indispensable.

swissinfo et les agences

La Suisse compte entre 200 et 300 hooligans.
Difficile de savoir combien, parmi eux, font partie d’une mouvance d’extrême droite.
Fedpol.ch craint que les néo-nazis se servent de l’Euro 2008 pour recruter de nouveaux membres parmi les hooligans.

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