Des perspectives suisses en 10 langues

Les médecins suisses dans la rue

C'est la première fois que des médecins manifestent en Suisse. Keystone

Plus de 10'000 généralistes et sympathisants ont manifesté samedi sur la Place fédérale à Berne. Ils ont déposé une pétition avec plus de 300'000 signatures.

Les manifestants ont dénoncé le démantèlement de leurs conditions de travail et la pénurie flagrante qui menace leur profession.

Cette manifestation est la première jamais organisée par des médecins en Suisse. Les milliers de généralistes – dont beaucoup en blouse blanche – ont exprimé leur profond malaise.

«Menacé de mort», «à quand notre grounding» ou «pas de croissance en vue», pouvait-on lire sur les innombrables banderoles déployées devant le Palais fédéral et débordant dans les rues adjacentes.

A l’issue du rassemblement, une pétition portée sur des brancards et munie de plus de 300’000 signatures a été déposée au Palais fédéral.

«Il est important que les politiciens, les assurances maladie et la population se rendent comptent qu’il y a un patient très malade qui se nomme médecin de famille», a expliqué Hansueli Späth, président de la Société suisse de médecine générale (SSMG).

Les raisons du malaise

Les raisons qui nourrissent l’insatisfaction des médecins généralistes sont multiples. Ces derniers déplorent des durées de travail très longues, de nombreuses heures de présence, ainsi que de nouvelles limites aux compétences et à la manière de diriger un cabinet.

Les médecins de premier recours regrettent aussi l’accroissement du travail administratif, des injustices tarifaires manifestes avec le système Tarmed et une pression continuelle des assureurs.

Mais ce sont les décisions du gouvernement de novembre dernier qui ont eu un rôle déclencheur dans l’organisation de la manifestation.

Le ministre suisse de la santé Pascal Couchepin avait présenté différentes mesures censées économiser au moins 86 millions de francs par an, dont près des deux tiers grâce à la baisse des tarifs de laboratoire. La mesure touche les généralistes qui effectuent des analyses à leur cabinet.

Plus de soutien

Les médecins généralistes demandent par ailleurs d’être plus impliqués dans tous les processus de décision concernant la politique de la santé. Ils dénoncent encore le manque de soutien flagrant des autorités concernant la relève.

«La situation est critique car plus de 60% des médecins généralistes qui exercent à l’heure actuelle ont 53 ans et plus», explique Jacques de Haller à swissinfo.

Et le président de la FMH de poursuivre: «Cela signifie que d’ici 12 à 15 ans ils seront à la retraite. Or la formation de nouveaux médecins généralistes prend également 12 à 15 ans. Nous devons obligatoirement entreprendre quelque chose aujourd’hui afin que cela prenne effet au moment voulu. Si nous ne faisons rien, il sera trop tard».

Un modèle plus libéral

Interviewé vendredi par la «Neue Zürcher Zeitung», le ministre suisse de la santé Pascal Couchepin a cependant d’ores et déjà annoncé que les médecins ne bénéficieront pas de plus de soutien étatique.

Selon lui, la solution au problème passe par davantage de concurrence. Pour Pascal Couchepin la fin de l’obligation de contracter est le modèle plus libéral qui permettra de remettre en valeur la profession.

Dans une interview accordée au «Bund», le directeur de l’Office fédéral de la santé publique, Thomas Zeltner, abonde dans le même sens. Selon lui, la position des médecins de famille serait effectivement renforcée par la fin de l’obligation de contracter car les médecins pourraient négocier des tarifs plus élevés avec les caisses maladie.

Les deux hommes sont également d’accord avec les revendications des médecins de famille concernant la formation. La médecine de premier recours doit être revalorisée dans les facultés et la formation en cabinet améliorée.

swissinfo et les agences

Il y a entre 8500 et 9000 médecins généralistes en Suisse
En tout, le pays compte 28’000 praticiens et assistants
80% des cas de maladie et d’accidents sont traités par les médecins généralistes
Selon une étude récente, les étudiants en médecine ne sont que 10% à se destiner à une carrière de médecin généraliste
Le nombre de médecins spécialisés a augmenté de 11% lors des quatre dernières années.

La manifestation des médecins de famille s’est déroulée samedi à Berne devant le Palais fédéral. Elle a réuni plus de 10’000 personnes. Cette manifestation est la première jamais organisée par des médecins en Suisse.

Une pétition «contre l’affaiblissement de la médecine de famille et la menace d’une pénurie de médecins» a été déposée au Palais fédéral munie de plus de 300’000 signatures.

Le ministre suisse de la santé a baissé de 10% les tarifs de laboratoire depuis le 1er janvier 2006.

A l’heure actuelle, tous les médecins sont remboursés par les caisses maladies pour les prestations qu’ils fournissent. L’abandon de l’obligation de contracter – les caisses pourraient alors ne rembourser que certains médecins – est discuté au plan politique.

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision