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Les profs romands tentés par le choix répressif de St-Gall

Pour les Romands, il faut résoudre l'incivilité par l'éducation à la citoyenneté. Keystone

En Suisse romande, les milieux politiques et institutionnels jugent les mesures adoptées à Saint-Gall excessives. Désemparés face aux élèves agressifs ou aux parents démissionnaires, les enseignants, eux, sont souvent tentés par ces solutions radicales.

«L’internat pour des élèves particulièrement agressifs, des amendes pour les parents qui ne répondent pas aux convocations des profs? Oui. Tout de suite. C’est probablement la seule issue», commente un enseignant neuchâtelois.

Il n’est pas le seul en Suisse romande à être séduit par les mesures adoptées récemment dans le canton de Saint-Gall. Les enseignants sont de plus en plus souvent confrontés à des élèves agressifs ou des parents démissionnaires. Désemparés, ils saluent des solutions plus radicales. Mais de là à le crier haut et fort…

Il faut dire que le projet saint-gallois est particulièrement extrême. Politiquement peu correct. Et d’ailleurs les milieux politiques et institutionnels romands le condamnent sévèrement. «La tolérance zéro n’est pas une solution», lance Cilette Cretton, rédactrice en chef de la revue du Syndicat des enseignants romands.

«Je suis également enseignante et je comprends les inquiétudes de mes collègues. Mais si on crée un internat, mon grand souci est qu’on ait ensuite envie de le remplir, poursuit Cilette Cretton. On a supprimé les maisons de redressement parce qu’elles ne menaient à rien, pourquoi les réintroduire aujourd’hui».

«Il faut éviter d’ajouter l’exclusion à l’exclusion», ajoute Georges Schürch, directeur général du cycle d’orientation genevois. «Les élèves qui commettent ce genre d’indisciplines sont en général des enfants déjà exclus du contexte social. Des mesures comme l’internat les excluraient plus encore».

En Suisse romande, la loi donne déjà plusieurs outils aux enseignants. S’ils n’envoient pas leurs enfants à l’école obligatoire, les parents peuvent être punis. Le cas d’un élève, régulièrement absent, s’est présenté récemment à Neuchâtel. Le père a été condamné par la justice à cinq jours d’arrêt ferme. Une première dans le canton.

Par contre, pas de sanction – comme le prévoit Saint-Gall – si les parents ne répondent pas aux convocations des professeurs ou s’ils ne participent pas aux réunions de parents d’élèves. Et l’internat à la mode saint-galloise n’est pas non plus près de voir le jour en Suisse romande.

A Fribourg, la suspension temporaire est appliquée dans de rares cas. «Mais cette mesure n’est pas idéale. Souvent, c’est ce qu’ils cherchent: quitter l’école», explique Christiane Brülhart, cheffe du service fribourgeois de l’enseignement du cycle d’orientation. Un groupe de travail planche donc sur un projet de remplacement.

A Neuchâtel, la commission scolaire peut prendre des sanctions qui vont jusqu’au placement ou à l’exclusion. «C’est exceptionnel, précise Claude Zweiacker, chef du service neuchâtelois de l’enseignement obligatoire. Et une telle sanction est accompagnée de mesures sociales. L’élève est placé dans une institution, en accord avec les parents et l’enfant lui-même».

Même principe dans le canton de Vaud qui développe actuellement un concept d’éducation à la citoyenneté. «C’est une nouvelle approche de la prévention, précise Fabien Loi Zedda, secrétaire général du département vaudois de la formation et de la jeunesse. Pour faire face à la violence et au mal-être croissant des enfants ou des adolescents».

La Conférence des chefs de l’instruction publique de Suisse romande et du Tessin va d’ailleurs aborder la question la semaine prochaine. La question de ce qu’on appelle aujourd’hui l’incivilité et – son nouveau remède – l’éducation à la citoyenneté.

Alexandra Richard

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