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Mandat d’arrêt pour un ex-ministre iranien

L'ex-ministre Ali Fallahijan accompagné d'un garde du corps. Keystone Archive

Seize ans après l'assassinat de Kazem Radjavi, un juge suisse lance un mandat d'arrêt international contre le ministre iranien des renseignements d'alors.

Selon «Le Matin dimanche», Ali Fallahijan est soupçonné d’avoir commandité l’élimination de l’opposant iranien près de Genève.

L’information est révélée par le journal édité à Lausanne. Ce dernier reproduit un extrait du document rédigé par le juge d’instruction du canton de Vaud Jacques Antenen, qui a hérité du dossier en 1997.

Le juge aurait signé le mandat international visant l’ex-ministre iranien le 20 mars et l’aurait transmis à l’Office fédéral de la justice (OFJ), selon le journal.

Le même journal indique que le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) a également été averti, «dans la mesure où on ne saurait exclure que ma décision ait des conséquences sur les relations extérieures de notre pays.»

A ce jour, les autorités iraniennes n’ont pas réagi officiellement à la procédure lancée à l’encontre d’Ali Fallahijan, indique Lars Knuchel, porte-parole du DFAE.

Cette affaire «est toujours à l’ordre du jour des relations bilatérales (entre Berne et Téhéran) depuis 1990», précise Lars Knuchel.

Il y a seize ans

Dimanche, le juge d’instruction était injoignable et l’OFJ a refusé de confirmer l’existence de ce texte en raison du caractère confidentiel de ce type de document.

En revanche, le fils du militant des droits de l’homme assassiné, Stéphane Radjavi, confirme que le document a bien été signé le 20 mars par le juge Antenen. Et ensuite transmis à l’OFJ pour «diffusion mondiale».

Le texte vise «l’ancien ministre de l’intelligence et de la sécurité de la République islamique d’Iran» né en «1949», rapporte «Le Matin dimanche».

Dans l’exposé des faits du document, le juge indique qu’Ali Fallahijan «a décidé et ordonné l’exécution de Kazem Radjavi» en 1982 ou 1983.

Kazem Radjavi avait été assassiné (neuf balles) au volant de sa voiture le 24 avril 1990 près de Coppet, dans le Canton de Vaud (sud-ouest du pays, à deux pas de Genève). Il avait obtenu l’asile politique en Suisse.

Une affaire délicate

A l’époque, les soupçons de la justice suisse s’étaient rapidement portés vers des diplomates iraniens qui avaient rapidement quitté le pays après l’assassinat.

L’Iran a toujours démenti être à l’origine de cet acte. En juin 1997, le juge d’instruction vaudois Roland Châtelain, alors en charge du dossier, s’était pourtant dit convaincu que l’ordre venait de Téhéran, probablement du ministère des Renseignements.

Le juge disposait d’informations sur l’identité de treize suspects recherchés en Suisse. Mais il n’avait pas délivré de mandat d’arrêt contre Ali Fallahian, contrairement au Parquet fédéral allemand.

Cette affaire avait donné lieu à des tensions entre la Suisse et l’Iran. Mais aussi entre la Suisse et la France, qui avait expulsé fin 1993 vers Téhéran deux suspects arrêtés sur sol français, alors que la justice suisse réclamait leurs extraditions.

swissinfo et les agences

– L’opposant iranien et ancien ambassadeur Kazem Radjavi a été assassiné le 24 avril 1990 près de son domicile. La justice suisse a rapidement identifié treize suspects iraniens protégés par des passeports de chargés de mission. Téhéran n’a pas donné pas suite.

– Deux suspects ont été arrêtés à Paris en 1992. Mais la France les a expulsés un an plus tard alors que la Suisse réclamait leur extradition.

– Le juge d’instruction de l’époque a renoncé à poursuivre l’ex-ministre iranien Ali Fallahijan pour, apparemment, éviter de causer du tord à la Suisse.

– Genève a honoré la mémoire de Kazem Radjavi à l’aide d’une plaque commémorative l’an dernier. Une rue pourrait bientôt porter le nom de ce défenseur des droits de l’homme.

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