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Marché du logement: pas d’amélioration en vue

A Zurich, comme ailleurs, la pénurie de logements fait rage. picswiss.ch

Le paradoxe est criant. En Suisse, la pénurie de logements persiste, alors que le nombre de surfaces commerciales vides augmente.

Les investisseurs ont mal évalué les priorités, souligne l’auteur d’une étude réalisée pour le compte du Credit Suisse.

On attendait une reprise, elle n’est pas venue. Jeudi à Zurich, les spécialistes du Credit Suisse ont d’abord dû faire leur autocritique. Leur troisième étude sur le marché immobilier n’a pas confirmé tous les pronostics formulés l’année dernière.

Avec un taux de logements vacants de 1,13%, en moyenne nationale pour 2002, la Suisse vit sa quatrième année consécutive de diminution du nombre de logements. La pénurie est particulièrement critique dans les centres urbains comme Genève et Zurich.

Les disparités sont criantes, puisque Genève, en bas de classement, ne compte que 0,25% d’appartements vides, contre 3,05 % pour Glaris, le canton le mieux loti.

Mais ces chiffres ne sont pas nouveaux puisque l’Office fédéral des statistiques les avait publiés l’automne dernier.

Hausse de certains loyers

Plus intéressantes, dans le rapport annuel du Credit Suisse, sont les prévisions d’évolution sur le marché immobilier. Or celles-ci ne sont pas bonnes.

Le nombre de logements en construction est insuffisant pour couvrir les besoins, accrus pour des raisons démographiques. Ici se dessine une légère reprise, mais «elle arrive plutôt lentement», admet Martin Neff, un des auteurs de l’étude.

En outre, autre mauvaise nouvelle pour les locataires, les prix risquent d’augmenter. Ceux des nouveaux logements pourraient ainsi être revus à la hausse de 3%.

Quant aux logements existants, le cadre légal assure une certaine protection pour les locataires et leurs prix devraient stagner.

Besoins plus modestes

«Une baisse des taux hypothécaires n’a jamais provoqué de baisse massive des loyers, relativise Martin Neff.

La mauvaise situation économique a aussi une incidence sur le type d’appartements recherchés. Selon le Credit Suisse, les appartements de cinq pièces et plus ne seront plus aussi courus. Les consommateurs se recentrent sur des besoins plus modestes.

Le boom des maisons individuelles est quant à lui définitivement essoufflé, prédisent les analystes immobiliers. Les propriétaires en quête d’achat se rabattent toujours davantage sur la propriété par étage, «seul secteur à faire preuve d’un certain dynamisme».

Critères psychologiques

Pourtant, relèvent les analystes, les conditions de financement pour l’achat d’une maison n’ont jamais été aussi bonnes. Mais la situation économique inspire craintes et retenues.

Selon le Credit Suisse, qui a développé un outil de mesure de la «capacité à acquérir une maison», tout Suisse a en principe les moyens de devenir propriétaire. Ce sont davantage des critères psychologiques, comme la peur de s’endetter à long terme, qui retient les gens de faire le pas.

Pléthore de bureaux

Pénurie d’un côté, pléthore de l’autre: trop de nouveaux bâtiments commerciaux neufs attendent aujourd’hui d’incertains locataires. «L’élargissement exagéré de l’offre, surtout dans l’agglomération de Zurich, freinera net la hausse des prix en 2003», écrivent les analystes.

Les analystes du Credit Suisse ont avoué leur surprise: l’effondrement de la demande n’est pas aussi temporaire qu’ils le pensaient. Ils se refusent cependant à parler de «crash».

Priorités mal placées

N’y aurait-il donc pas eu quelques erreurs de planification? «On ne peut pas parler d’erreurs, rétorque Ulrich Braun, un des auteurs de l’étude, mais les priorités ont effectivement été mal évaluées.

Puisqu’il était impossible d’investir à la fois dans les locaux commerciaux et dans les surfaces résidentielles, les bureaux ont été privilégiés.»

Résultat: même si la conjoncture reprend pied fin 2003, 1,5 million de mètres carrés seront libres vers mi-2004. Genève, Zurich et Bâle, pôles économiques, seraient les plus touchées.

Cette année encore, la banque prévoit un recul des locations commerciales de l’ordre de 5%, avant d’importantes corrections de loyers.

Les analystes estiment que quelque 30 000 emplois supplémentaires seront supprimés dans le secteur des services, banques et assurances en tête. Aucune embellie pour la location de bureaux n’est à prévoir avant 2005.

swissinfo, Ariane Gigon Bormann, Zurich.

-En 2002, il y avait en Suisse 1,13% de logements vacants.
Ce taux n’était que de 0,25% dans le canton de Genève, où la pénurie est la plus grave.
En haut du tableau, Glaris affiche 3,05% d’appartements vides.
(Chiffres de l’OFS)

-Le niveau plus bas devrait être atteint cette année, indique l’étude du CS, avant un légère reprise l’an prochain.

-Sur le marché des surfaces commerciales, la demande a été surévaluée. Entre 1998 et 2001, 13 000 nouvelles places de bureau ont été créées à Zurich, 8000 à Genève et Berne, 4000 à Bâle et 3000 à Lausanne.

-Même en cas de reprise économique fin 2003, 1,5 million de mètres carrés de surfaces commerciales seront vides mi-2004. En 1989, au début du «crash immobilier», 3,5 millions de mètres carrés de bureaux étaient vides.

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