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Meret Oppenheim, magicienne sans fourrure

La légendaire tasse en fourrure ainsi que près de 200 oeuvres de l'artiste au Musée des beaux arts de Berne. Keystone

Le Kunstmuseum de Berne rend hommage à Meret Oppenheim qui lui avait légué un ensemble important de son travail.

Grande dame du surréalisme, l’artiste laisse une œuvre abondante réalisée souvent dans le doute.

Figure incontournable du surréalisme et de la représentation féminine au sein de ce mouvement, Meret Oppenheim n’en est pas moins restée discrète, comme à l’écart, tout au long de sa carrière qui s’est prolongée jusqu’en 1985, date de sa mort.

Peut-être parce qu’après une période d’échanges artistiques intenses, à Paris dans les années trente dans l’entourage d’André Breton, elle est revenue en Suisse, à Berne notamment, où elle aura passé trente ans de sa vie.

Une tasse en fourrure

Née en 1913, elle s’était intéressée très tôt aux théories de C.G. Jung, et désintéressée de l’école. Partie à Paris en 1932, avec une amie peintre et danseuse, elle y avait réalisé, en 1936, le fameux «Déjeuner en fourrure», œuvre-objet qui remporta aussitôt les suffrages des surréalistes.

La seule ombre au tableau fut que cette pièce projeta sur son auteur même, dont le travail ultérieur n’atteignit jamais, aux yeux de certains, ni à ses propres yeux durant quelques années, la grâce manifestée dans la simple association d’une tasse de porcelaine et d’un morceau de fourrure de gazelle.

Cette pièce, conservée au MoMA à New York, est naturellement exposée en bonne place, sous vitrine, dans l’exposition bernoise.

A corps perdu

Donc, Meret Oppenheim, se sentant transformée en «Femme de pierre», titre de l’une de ses peintures, arrêta de créer ou détruisit ses œuvres, jusque dans les années cinquante, où la confiance retrouvée lui permit de se lancer à nouveau, à corps perdu, comme pour rattraper les années, dans la peinture, la sculpture et cette chose mixte qu’est l’objet.

Un peu de ready-made, beaucoup de transformation, ont engendré des pièces telles que «Le vieux Serpent nature», en 1970, «La Reine des termites», en 1975, ainsi que de nombreux, très nombreux, dessins et peintures.

Un songe

Les thèmes, qui déterminent l’accrochage? Des nuages, patiemment rendus au crayon, tracés à l’huile, moulés dans le bronze. Des lambeaux de brume, qui s’étirent sur la toile ou le papier. Des serpents et des sorcières. Des êtres masqués. Des planètes et des étoiles.

Bref, les éléments d’un songe, d’un songe très long, à rebondissements, qui aura duré toute une vie.

swissinfo, Laurence Chauvy

La rétrospective Meret Oppenheim au Kunstmuseum de Berne dure jusqu’au 8 octobre 2006.

– Meret Oppenheim est née en 1913 d’un père hambougeois et d’une mère suisse.
– Elle a grandi à Bâle, à Delémont et au Tessin.
– Départ à Paris en 1932, où elle fréquente Alberto Giacometti, Hans Arp, André Breton. Elle apparaît nue sur les photographies de Man Ray.
– En 1936, elle réalise son chef-d’œuvre: «Déjeuner en fourrure» qui devient l’un des emblèmes du surréalisme.
– Après 18 ans d’inactivité, elle se remet au travail en 1954.
– Deux ans plus tard, elle dessine les costumes et les masques pour la pièce de Picasso «Le Désir attrapé par la queue».
– En 1959, elle organise à Berne la «Fête du printemps», présentée sur le corps d’une femme nue.
– Elle meurt en 1985 à Berne, en pleine controverse suscitée par la fontaine commandée par la Ville de Berne, qui ne plaît pas à tout le monde.

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