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Non à l’initiative «pour des naturalisations démocratiques»

Keystone

La Chambre basse du Parlement recommande au peuple et aux cantons de rejeter l'initiative populaire de la droite populiste (Union démocratique du centre - UDC) qui demande d'autoriser à nouveau les naturalisations par les urnes.

Les députés ont cependant estimé que le texte ne viole pas les conventions internationales déjà signées par la Suisse. Le peuple aura le dernier mot.

Le Conseil national souhaite que les citoyens optent pour un contre-projet indirect. Celui-ci autorise les naturalisations par les urnes à condition que les refus soient motivés et que les décisions négatives puissent faire l’objet de recours.

A l’issue d’un débat acharné et après l’intervention d’une quarantaine d’orateurs, la Chambre du peuple a reconnu jeudi, par 132 voix contre 49, la validité de l’initiative populaire de l’Union démocratique du centre (UDC, droite populiste).

La question de la validité a divisé le camp rose-vert, une partie doutant de la compatibilité avec le droit international. Mais aucun des juristes de l’administration fédérale et des experts consultés n’a nié la recevabilité de l’initiative, a souligné le ministre de la justice Christoph Blocher.

Craignant que la modification constitutionnelle proposée dans l’initiative de l’UDC n’ouvre la porte à l’arbitraire et à la discrimination, les députés ont décidé, par 117 voix contre 63, d’en recommander le rejet. Le Conseil fédéral s’est lui aussi rangé derrière la jurisprudence récente du Tribunal fédéral (TF).

Pour mémoire, l’UDC avait lancé son initiative suite à deux arrêts rendus en 2003. Les juges de Mon-Repos avaient jugé non-motivées et discriminatoires des refus de naturalisations décidées par le peuple dans la commune lucernoise d’Emmen et à Zurich.

Cinq heures de débat

«La naturalisation est un acte politique, mais il doit s’exercer dans les règles d’un Etat de droit qui exclut l’arbitraire et la discrimination», a notamment expliqué la démocrate-chrétienne Thérèse Meyer.

«Quand un candidat est recalé seulement à cause de son nom ou de son physique, on se trouve clairement devant une décision arbitraire et discriminatoire», a encore dénoncé la Fribourgeoise.

On va vers toujours plus de restrictions alors que la Suisse est déjà un des pays les plus sévères en matière de naturalisation, ont rappelé de leur côté plusieurs socialistes.

L’initiative de l’UDC prévoit que les communes fixent de manière autonome la procédure de naturalisation, par les urnes ou par une assemblée communale. «La décision du souverain n’a pas à être motivée et elle est sans appel», a souligné pour sa part le président de l’UDC Ueli Maurer.

Son collègue de parti Oskar Freysinger s’est lui demandé «en quoi d’obscurs fonctionnaires seraient moins arbitraires que le peuple».

Un contre-projet tout prêt

Reste que le Conseil national donne sa préférence à un projet de loi du Conseil des Etats, né d’une initiative parlementaire du radical argovien Thomas Pfisterer considérée comme un contre-projet indirect au texte de l’UDC.

Il a approuvé l’entrée en matière par 103 voix contre 74, renvoyant le texte en commission pour la discussion par articles.

Soutenue par le Conseil fédéral, cette solution permet de sauvegarder la tradition de la naturalisation par le peuple, mais avec des garde-fous.

Elle prévoit notamment l’obligation de motiver les refus et la possibilité de recourir en cas de décision négative et pourrait permettre de sortir de l’impasse.

swissinfo et les agences

Dans quelques communes suisses alémaniques – en particulier à Emmen dans le canton de Lucerne – les citoyens se sont déjà exprimés sur les naturalisations.

Cette procédure a suscité des nombreuses critique, en particulier du fait que la plupart des candidats à la naturalisation portant un nom d’origine balkanique se voyaient systématiquement refuser la demande.

En 2003, le Tribunal fédéral a déclaré que le refus d’accorder la nationalité à des candidats devait être motivé. Ce jugement de la Cour suprême rend en fait illégale la procédure de naturalisation par un vote populaire.

En opposition à cette décision, l’Union démocratique du centre a lancé une initiative qui demande de laisser le choix de la procédure aux communes.

Une demande de naturalisation peut être déposée en Suisse après douze ans de résidence. Les années passées en Suisse entre l’âge de 10 et celui de 20 ans comptent double.

La Suisse accorde la naturalisation aux candidats qui sont bien intégrés et qui connaissent le système juridique helvétique.

La naturalisation passe par les cantons et les communes. La procédure peut varier fortement d’un endroit à l’autre.

En 2004, le peuple suisse a refusé la naturalisation simplifiée aux étrangers de deuxième et troisième génération.

En 2006, 47’607 naturalisations ont été enregistrées en Suisse.

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