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Nouveau round autour de la médecine de pointe

L'avenir de la médecine de pointe passe par une diminution des centres de compétence. Keystone

La médecine ultra-perfectionnée doit être concentrée dans deux centres au maximum à l'échelle suisse, prône une expertise commandée par le canton de Zurich.

Mais la solution en réseau n’est pas prise en considération par les auteurs, regrettent déjà les autorités de Bâle.

La conseillère d’Etat Verena Diener et le professeur zurichois Hans-Dieter Daniel ont présenté vendredi les résultats définitifs de cette expertise basée sur les avis de spécialistes de neuf pays.

Un rapport intermédiaire publié en mai concluait déjà à la nécessité d’une concentration dans un ou deux centres pour des raisons de rentabilité et de qualité des soins.

Bâle-Ville et Berne ont présenté fin novembre leur contre-expertise, qui préconise à l’inverse une répartition des spécialités entre les cinq hôpitaux universitaires.

«En raison de la petitesse de la Suisse, les deux expertises concluent à la nécessité d’une concentration de la médecine de pointe. Il faut atteindre une masse critique d’interventions chirurgicales pour en assurer la qualité», note Hans-Dieter Daniel.

«Notre étude constate que de nombreux secteurs sont interdépendants et qu’il serait faux de les disperser», poursuit le professeur.

Le rapport estime que de nombreux domaines sont dépendants d’un soutien médical et technique commun hautement spécialisé. Ils nécessitent aussi un soutien spécifique de la part d’autres disciplines ainsi qu’une recherche multidisciplinaire.

Compétitivité internationale

Pour le traitement des maladies très rares, les experts conseillent même la concentration dans un seul centre de référence européen, recommandant à la Suisse de rechercher la collaboration avec les autres pays.

De ce fait, la compétitivité internationale de la médecine de pointe en Suisse devient primordiale, constate Verena Diener.

«Il ne s’agit pas simplement d’une question de prestige, mais de concurrence pour attirer les clients et les fonds étrangers, qui sont nécessaires à la rentabilité du système», lance la Zurichoise.

Selon le professeur Daniel, l’avenir ne sera en effet pas marqué par une concurrence entre Bâle et Zurich, «mais entre Zurich et Munich ou Vienne».

«Doté du plus grand hôpital universitaire du pays, le canton de Zurich souhaite évidemment être doté d’un des futurs centres de médecine de pointe, précise Verena Diener à swissinfo. Mais il doit pouvoir prouver que cela correspond à de réels besoins en termes de nombre de cas à traiter.»

Appel à relancer un débat de fond

«Nous proposons la réalisation rapide d’un registre analysant la prévalence de chaque domaine de médecine de pointe en Suisse, afin de connaître les besoins, et la transparence en ce que concerne les coûts, note encore la ministre zurichoise. C’est un appel au pragmatisme et une offre de négociation.»

Sur la base de ces deux expertises, Verena Diener souhaite maintenant que la Conférence suisse des directeurs cantonaux de la santé (CDS) relance un débat «de fond».

La CDS comptait débattre cet automne de toutes ces expertises et proposer une nouvelle Convention intercantonale (après un premier échec en 2004).

En raison du retard de l’expertise zurichoise, elle a reporté toute décision à sa prochaine séance plénière, en mai 2007. Mais déjà, son président considère l’expertise zurichoise comme utile au dossier.

Markus Dürr estime que les deux expertises maintenant à disposition présentent beaucoup de similitudes. Sans articuler de date, il n’exclut pas que les cantons parviennent à se mettre d’accord sur une solution.

Soutien à une solution en réseau

A Bâle, le directeur cantonal de la santé reconnaît la nécessité de concentrer la médecine de pointe en Suisse. L’étude présentée par son canton et Berne prônait d’ailleurs cette approche aussi.

Mais selon Carlo Conti, une concentration des moyens n’implique pas forcément la localisation géographique en un ou deux points seulement du territoire. Cinq lieux peuvent aussi entrer en considération.

En clair, le Bâlois suggère une solution en réseau, passée sous silence par l’expertise zurichoise.

Une concentration n’a pas seulement des effets sur la médecine et son offre, elle concerne aussi la recherche et les places de travail, note Carlo Conti. «Dans un pays fédéraliste, on ne peut pas tout réunir en seul endroit.»

swissinfo et les agences

L’expertise présentée vendredi a été commandée par le canton de Zurich.

24 experts de neuf pays se sont prononcés sur les questions de l’exécutif zurichois et de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de la santé (CDS).

Ces prises de positions ont ensuite été compilées à l’Université de Zurich.

2004: les directeurs cantonaux de la santé publique se mettent d’accord sur une Convention intercantonale relative à la coordination et la concentration de la médecine hautement spécialisée (CICCM). Objectif: épargner. Cette Convention est censée entrer en vigueur en 2008.

2005: le canton de Zurich décide de ne pas y adhérer et propose une concentration de la médecine de pointe sur deux sites.

Mai 2006: Berne et Bâle décident d’exploiter conjointement dès l’automne 2007 le domaine de la chirurgie cardiaque.

Novembre 2006: présentation des conclusions d’un rapport d’experts internationaux mandatés par les cantons de Bâle et de Berne.

Décembre 2006: le canton de Zurich présente son expertise, qui prône une concentration de la médecine de pointe dans deux centres au maximum.

Mai 2007: la Conférence des directeurs cantonaux de la santé publique (CDS) va à nouveau se pencher sur la question.

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