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Novartis et l’OMS ensemble contre la malaria

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Daniel Vasella, président de Novartis, et Gro Harlem Brundtland, directrice de l'OMS, ont signé à Genève un accord pour combattre le paludisme. La firme pharmaceutique fournira le médicament à prix coûtant pour les pays en développement. L'OMS se chargera de le distribuer.

D’un côté, 3000 personnes qui meurent chaque jour du paludisme. Parce qu’elles n’ont ni soins de santé, ni médicaments, ni moyens de prévention. La malaria s’en prend surtout aux enfants et aux populations les plus pauvres. En multipliant les raisons d’absence au travail ou à l’école, elle mine aussi les efforts de développement économique.

De l’autre côté, une industrie pharmaceutique mondiale qui depuis des lustres promet de combattre véritablement le fléau. Sans résultats.

Il n’y a pas si longtemps encore, les chercheurs paraissaient davantage sollicités dans la lutte contre le sida que contre la malaria. C’est que l’industrie ne se lance pas dans des recherches coûteuses quand elle n’a pas la garantie de récupérer sa mise de départ.

En ce qui concerne la malaria, il y a urgence, dit Mme Brundtland. «Le jour n’est pas loin où la chloroquine sera totalement inefficace en Afrique. La meilleure réponse au problème est d’introduire des thérapies combinées». C’est déjà la norme pour la tuberculose, la lèpre et le sida. Pourquoi pas le paludisme?

C’est ce qu’ont tenté, avec succès, Novartis et l’Institut de microbiologie et d’épidémiologie de Pékin en combinant l’arthéméther et la luméfantrine. C’est-à-dire une substance végétale utilisée par la médecine chinoise traditionnelle et un produit de synthèse. Le résultat s’appelle «Coartem», un médicament anti-malaria aux effets rapides et jugés très performants.

Une chose est d’inventer un remède, autre chose est d’en faire profiter ceux qui en ont besoin.

Comme le rappelle l’une des résolutions votées cette semaine à Genève par l’Assemblée mondiale de la santé, il faut encourager «la mise au point de médicaments contre les maladies qui affectent surtout les pays pauvres», mais il faut aussi améliorer «l’équité de l’accès aux médicaments essentiels au sein des systèmes de santé».

Ce message à peine lancé serait-il déjà compris? En tout cas, Novartis n’a pas attendu longtemps avant de diffuser cette nouvelle décision de collaboration avec l’OMS, une décision qui daterait pourtant, dit-on, de plusieurs mois. Pour redorer un blason terni? «Nous voulons montrer l’image réelle de notre industrie, répond Daniel Vasella, PDG de Novartis. Nous voulons aller au-dessus et au-delà de toute idéologie dans l’intérêt des patients. Nous ne sommes pas les monstres qu’on veut bien faire de nous».

Concrètement, Novartis va donc renoncer à ses bénéfices sur le Coartem «afin que les malades atteints de paludisme puissent être traités efficacement avec un médicament auquel ils n’auraient pas accès en temps normal». Le médicament sera livré à l’OMS au prix coûtant, soit environ 2 dollars et demi pour le traitement complet d’un adulte.

C’est encore beaucoup d’argent pour bon nombre de gens qui ne gagnent même pas une telle somme en une journée. «À un prix plus bas, nous ferions des pertes, nous dit Daniel Vasella. Ce genre d’innovation n’est possible que si l’on en tire aussi profit et que le droit des patentes est respecté».

On notera, à ce propos, que le Coartem a son frère jumeau pour pays riches. Le «Riamet» a été récemment homologué en Europe pour les voyageurs à destination de pays où le paludisme est endémique. Le prix de ce médicament curatif devrait se situer aux alentours de quarante dollars par traitement. De quoi appâter les apprentis trafiquants.

Novartis avait déjà offert gratuitement à l’OMS les médicaments contre la lèpre jusqu’à fin 2005 au moins. Aujourd’hui elle lui vend un antimalarique au prix coûtant. Mais encore? «Le prochain projet concerne la recherche, nous dit Daniel Vasella. Mais c’est encore trop tôt pour en parler. On cherche encore les bons moyens et les bons endroits pour le développer…»

Bernard Weissbrodt, Genève

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