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Objectifs du Millénaire: on est loin du compte

Des enfants devant leur maison dans un bidonville de Sao Paolo. Keystone

Avant le sommet spécial de l'ONU sur les objectifs du Millénaire, le responsable de l'aide au développement helvétique fait le point sur la position de la Suisse.

Selon Walter Füst, chef de la Direction du développement et de la coopération (DDC), de grands progrès ont été faits mais il reste encore énormément de travail.

En adoptant la Déclaration du Millénaire et les huit objectifs du Millénaire en 2000, la Suisse ainsi que 188 autres États membres des Nations Unies se sont fixés pour tâche principale de réduire de moitié l’extrême pauvreté dans le monde d’ici à 2015.

Directeur de la DDC, Walter Fust représentera la Suisse mi-septembre à l’occasion du sommet spécial «Millenium Development Goals + 5» des Nations Unies à New York. Il sera rejoint aux USA par le président de la Confédération Samuel Schmid.

La ministre suisse des Affaires étrangères, Micheline Calmy-Rey, conduira quant à elle la délégation helvétique lors de l’Assemblée générale de l’ONU qui suivra ce sommet.

Un rapport intermédiaire de la DDC sur les objectifs du Millénaire datant de mai 2005 indique que la Suisse a conçu et mis en application des programmes adéquats pour combattre la pauvreté et aider les pays pauvres à réduire leur dette.

Cependant, Walter Fust souligne l’importance des conclusions du rapport qui laissent entendre qu’il reste encore énormément de travail à effectuer. Interview.

swissinfo: Le rapport réclame plus d’aide, mais le gouvernement helvétique a d’autres priorités telles que l’équilibre du budget ou la défense des tarifs agricoles. La Suisse peut-elle encore apporter une contribution significative pour réaliser les objectifs du millénaire?

Walter Fust: Nous nous devons d’apporter une contribution significative. Il est vrai que les politiques agricoles devront être adaptées en fonction des résultats du round de négociations de Doha.

A ce propos, les pays en voie de développement ne s’engageront à un accord que s’ils ont la confirmation que l’aide au développement sera augmentée et s’ils auront accès aux marchés des pays industrialisés sans avoir à payer de droits de douane.

La Suisse a certes augmenté son aide au développement au cours des dix dernières années. Celle-ci va cependant stagner pour les trois prochaines années en raison des contraintes budgétaires et du frein à l’endettement.

Mais la Suisse s’est engagée à l’augmenter à nouveau et nous mettrons beaucoup de force à l’intégration des pays en voie de développement sur le marché économique mondial.

swissinfo: Les Etats-Unis semblent vouloir torpiller les objectifs du Millénaire. S’ils y arrivent, quel en sera l’impact sur les efforts internationaux pour réduire la pauvreté et la faim dans le monde?

W.F.: Je ne peux pas prévoir les résultats à l’avance. Je pense néanmoins qu’il faut faire une différence entre un impact politique ou psychologique et un impact réel.

L’impact politique serait énorme et ne faciliterait sûrement pas l’établissement d’un consensus autour d’un agenda reconnu par tous les donateurs et les pays partenaires.

Psychologiquement, les USA auraient à expliquer leur position au monde entier et devraient être prêts à proposer une autre solution. Il est en effet impossible d’invoquer sans cesse la question de la sécurité sans fournir une aide concrète susceptible de réduire la pauvreté et de faire de la planète un monde plus sûr.

swissinfo: et l’impact réel?

W.F. : Nous savons tous que les USA augmentent leur aide officielle. Mais ils ne le font pas à hauteur des espérances internationales. Il n’y aura donc pas d’impact majeur puisque les autres nations vont certainement poursuivre les efforts d’aide comme elles se sont engagées à le faire.

Jusqu’ici, la Suisse et le Japon sont les seuls à avoir annoncé une augmentation substantielle de leur aide. Et le risque principal, du moins au niveau pratique, est que les Parlements des différents pays se demandent pourquoi ils devraient allouer de fortes sommes alors que des pays très importants ne le font pas.

swissinfo: Un des objectifs du millénaire est de combattre le sida, le paludisme et d’autres maladies. La DDC travaille-t-elle avec des compagnies pharmaceutiques afin d’assurer l’accès aux médicaments?

W.F.: Nous avons un bon dialogue avec l’industrie pharmaceutique suisse. Les responsables de ce secteur se rendent bien compte des dimensions de développement et nous ne coopérons pas seulement dans le domaine du sida mais également pour des médicaments contre la malaria, la tuberculose et d’autres maladies.

Je pense que l’industrie pharmaceutique se rend bien compte de la cherté des médicaments, mais nous ne pouvons pas attendre du secteur privé qu’il devienne plus philanthropique. S’il venait à réduire son engagement dans la recherche, nous n’aurions plus sur le marché de médicaments susceptibles de traiter des maladies qui affectent principalement les pays en voie de développement.

Je pense également qu’il est très important de mieux coordonner les efforts de la recherche au niveau international. Nous devrions mettre plus d’argent public dans la recherche et dans le subventionnement des médicaments afin de faire baisser leur prix.

swissinfo interview, Dale Bechtel
(Traduction de l’anglais: Mathias Froidevaux)

Le Sommet «Millenium Development Goals + 5» de l’ONU se tiendra le 14 septembre à New York.
Un record de 175 présidents, chefs d’Etat et premiers ministres sont attendus aux USA pour ce sommet qui marque également le 60ème anniversaire des Nations Unies.

Les objectifs du Millénaire:

1. Réduire l’extrême pauvreté et la faim
2. Assurer l’éducation primaire pour tous
3. Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes
4. Réduire la mortalité infantile
5. Améliorer la santé maternelle
6. Combattre le VIH/sida, le paludisme et d’autres maladies
7. Assurer un environnement durable
8. Mettre en place un partenariat mondial pour le développement

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