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On s’attend à une avalanche de demandes

Le CRT est notamment subordonné aux représentants de la justice américaine, dont Paul Volcker. Keystone

C'est un tribunal arbitral établi à Zurich qui devra se prononcer sur les requêtes liées à la troisième liste de comptes, publiée ce lundi. Il va donc devoir décider de la répartition de 800 millions de dollars. Une tâche qui s'annonce colossale.

Le Claims Resolution Tribunal (CRT) – c’est le nom anglais de ce Tribunal arbitral pour les comptes en déshérence – existe depuis 1997. Il a déjà statué sur plus de 9000 requêtes, déposées sur la base des deux listes précédemment publiées par les banques suisses. Son travail a débouché sur l’attribution de 55 millions de francs suisses.

Mais les 17 arbitres et les employés du Tribunal, qui représentent 12 nationalités différentes, vont désormais devoir passer la vitesse supérieure. Ils s’attendent en effet à une avalanche de requêtes suite à la publication, ce lundi par les banques suisses, de 21 000 nouveaux comptes datant de la période où les Nazis étaient au pouvoir.

«Il pourrait y avoir 100 000 requêtes», précise ainsi Alexander Jolles, le Secrétaire-général du CRT. Soit dix fois plus de dossiers que ceux que le Tribunal a eu à traiter en trois ans. La procédure va donc devoir être standardisée, informatisée. Mais c’est en fait tout le travail du Tribunal qui se réoriente.

Tout d’abord, le CRT va désormais s’occuper uniquement de comptes pour lesquels il existe une présomption qu’ils aient appartenu à des victimes de l’Holocauste. Il aura pour outil de travail les 21 000 noms publiés ce lundi, mais aussi une seconde liste confidentielle de 15 000 comptes.

Enfin, sous certaines conditions, qui ont donné lieu à un marchandage de dernière minute entre Suisses et Américains, le CRT aura accès à la liste de plus de 4 millions de compte détenue par les banques.

En outre, la grande majorité des comptes en question ont été clôturés depuis longtemps. Souvent, beaucoup d’informations manquent et notamment les montants déposés. Le CRT va donc donc devoir statuer artificiellement, sur la base de moyennes. Ainsi, la valeur d’un carnet d’épargne est fixée à 830 francs de 1945.

Une fois ce montant déterminé, on lui ajoutera la valeur des frais et l’on multipliera le tout par dix, pour le payement des intérêts. De manière à ne pas dépasser les 800 millions de dollars prévus par l’Accord global, le règlement se fera en deux étapes. Ceux dont la demande aura été acceptée ne recevront donc, dans un premier temps, que 35 % de ce qui leur est dû.

Enfin, il faut relever un basculement du pouvoir au sein du CRT, qui est désormais subordonné aux représentants spéciaux du juge new-yorkais Edward Korman: Paul Volcker et Michael Bradfield, tous deux citoyens américains.

Ainsi, même si le Tribunal est établi à Zurich, même si son président est un Suisse, le professeur de droit Hans Michael Riemer, c’est bien la justice des Etats-Unis qui le contrôle.

Ce n’est pas l’aspect le moins surprenant de ce tribunal hors du commun. Une caractéristique qui a forcé le CRT à demander une autorisation spéciale de la Confédération, sous peine d’enfreindre le Code pénal suisse, qui réglemente les actions effectuées pour le compte d’un Etat étranger. Une autorisation délivrée par la responsable du Département fédéral de justice et police, Ruth Metzler, il y a une dizaine de jours.

Pierre Gobet, Zurich

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