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Bruxelles met fin au round d’observation

Mercredi à Bruxelles, l'ambassadeur Alexander Karrer a réfuté les arguments juridiques de la Commission européenne. Keystone

Après deux «tours de chauffe» sur le différend fiscal, l'Union européenne (UE) demande à la Suisse «d'entrer dans le vif du sujet» lors de la prochaine réunion, prévue en avril.

L’objectif du dialogue n’est pas de trouver une solution commune, estime Berne qui n’exclut pas une sortie de crise grâce à «des décisions autonomes».

Depuis le début, Berne insiste: «Nous ne négocions pas avec l’Union européenne (UE) sur la fiscalité cantonale. Nous dialoguons.» Pourtant, une surprise attendait la délégation suisse venue mercredi «dialoguer» avec la Commission européenne. A l’entrée du bâtiment, trônait un beau panneau : «Négociations avec la Suisse au 1er étage» !

Dialogue d’une part, négociation de l’autre? « Cela m’est égal de savoir comme la Suisse présente la chose, l’essentiel c’est que ça avance. Nous avons conscience des échéances, et notamment du référendum du 24 février. Mais après ça, nous voulons entrer dans le vif du sujet», déclare Matthias Brinkmann, chef de la délégation européenne.

Fermeté de Barrosso

Quelques jours auparavant, son patron, le président de la Commission, enfonçait le clou devant Jacques de Watteville, le nouvel ambassadeur de la Confédération auprès de l’UE qui lui présentait ses lettres de créances: «Barroso s’est montré très ferme sur la nécessité de trouver une solution», affirme un proche.

La Commission et la délégation suisse menée par l’ambassadeur Alexander Karrer ont maintenant deux rencontres à leur actif. La première, en novembre 2007, avait été écourtée suite à un retard d’avion. La réunion du 23 janvier à Bruxelles a permis à Alexander Karrer de réfuter les arguments juridiques invoqués par la Commission, à savoir que les régimes fiscaux de certains cantons violerait des dispositions de l’accord de libre-échange de 1972.

Alexander Karrer a notamment précisé que les revenus de source suisse étaient imposés de la même manière que les revenus de source étrangère. Il a souligné une nouvelle fois que les régimes fiscaux critiqués par l’UE n’avaient pas un caractère discriminatoire.

Réponse du berger à la bergère

«Nous avons donné des exemples précis et nous avons posé des questions sur la persistance d’aides d’Etat au sein de l’Union européenne», a précisé l’ambassadeur Karrer. La réponse du berger à la bergère.

La Commission européenne a expliqué que plusieurs Etats-membres avaient modifié leurs systèmes fiscaux. Matthias Brinkmann a notamment exposé le cas de l’Irlande, qui taxait moins les sociétés étrangères que les entreprises nationales, et qui, sous la pression de ses partenaires, a adopté une seule et même assiette fiscale.

«Ce sont des exemples dont il est possible de s’inspirer», estime-t-il. «La Suisse a son propre modèle, et elle n’est pas membre de l’UE », répond Alexander Karrer. «Notre système fiscal s’est développé sur plusieurs décennies. Il est garanti par la démocratie directe qui est elle-même à la base du système fédérale», ajoute-t-il.

Imposer un parallélisme

A priori, les positions sont donc encore très éloignées. Sans le dire, les uns et les autres ont toutefois quelque espoir qu’une possible réforme de l’imposition des entreprises, déjà évoquée par le ministre des Finances Hans-Rudolf Merz, pourrait offrir une porte de sortie à l’impasse.

«Que la Suisse présente ça comme une solution autonome n’est pas important pour nous. Ce qui nous importe, c’est que ça bouge», insiste Matthias Brinkmann. Rendez vous a donc été pris pour après Pâques.

En attendant, la Commission européenne veut imposer le parallélisme entre l’avancée de la discussion sur la fiscalité cantonale et la poursuite de négociations dans d’autres domaines qui pourraient intéresser la Suisse (électricité, libre échange agricole, etc). «Le mot n’a pas été prononcé au cours de la réunion», précise toutefois Michael Reiterer, ambassadeur de l’UE à Berne. Pas besoin de charger la barque…

swissinfo, Alain Franco, Bruxelles

Septembre 2005: la Commission de l’UE proteste auprès de Berne à propos des pratiques fiscales des cantons de Zoug et Schwyz.

Juillet 2006: le président de la Commission José Manuel Barroso durcit le ton.

Novembre 2006: après l’approbation par les Suisses du milliard de cohésion pour les nouveaux membres de l’UE, le directeur général des relations extérieures de l’UE menace de faire envoyer à tous les membres de l’UE un document exigeant que la Suisse applique les règles de l’UE.

Fin avril 2007: le ministre des Finances Hans-Rudolf Merz propose une réforme fiscale diminuant l’impôts sur les bénéfices.

14 mai: les ministres des Affaires étrangères de l’UE accordent un mandat de négociation à la Commission.

16 mai: Berne se dit prête à dialoguer, mais pas à négocier.

12 novembre: passée l’échéance des élections fédérales, ce dialogue s’ouvre à Berne.

24 janvier : deuxième réunion, à Bruxelles

Rendez vous est pris pour une prochaine rencontre, «après Pâques».

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