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Décès de l’ancien ministre Otto Stich

Otto Stich fut un ministre apprécié de la population et de ses adversaires. Keystone

L’ancien ministre des Finances Otto Stich est décédé à l’âge de 85 ans. Ce socialiste soleurois avait siégé au gouvernement de 1984 à 1995 et avait été président de la Confédération en 1988 et 1994. Il fut un ministre apprécié de la population, malgré une élection difficile.

Avec la mort à 85 ans d’Otto Stich, la Suisse perd un homme politique qui a appliqué avec ténacité ses convictions socialistes. Défendant ses choix avec opiniâtreté, il s’est souvent entendu reprocher d’avoir la «tête dure». Mais ses compétences financières ont été reconnues même par ses adversaires politiques.

Otto Stich a acquis la sympathie de l’opinion publique, alémanique surtout, par sa franchise, sa force de conviction et son bon sens teinté d’humour. En Suisse romande, son message passait moins bien, car le Soleurois ne s’exprimait pas en français.

Assainissement des finances

Comme grand argentier de la Confédération, Otto Stich a vécu la montée des problèmes financiers, qu’il avait vus venir très tôt. Après cinq ans d’excédents de recettes, les déficits se sont succédés dès 1990, avec un pic de 7,8 milliards de francs en 1993.

Pour assainir les finances fédérales, Otto Stich a misé sur une combinaison d’économies et de recettes supplémentaires. Mais cette politique a été contrecarrée par les partis bourgeois, adeptes d’une réduction massive des dépenses. Le manque de soutien parlementaire l’a finalement poussé à la démission.

En octobre 1994, sa confrontation avec une commission parlementaire à propos du budget avait conduit Otto Stich à l’hôpital à la suite d’un collapse cardio-vasculaire. Il avait alors reçu un stimulateur cardiaque.

La carrière ministérielle d’Otto Stich restera aussi marquée par d’importants succès en votations populaires: l’adhésion au Fonds monétaire international et à la Banque mondiale en 1992, la hausse des droits sur les carburants et l’instauration de la TVA en 1993.

Otto Stich a essuyé les plus graves critiques de sa carrière un an après son départ à la retraite. Une commission d’enquête parlementaire l’a désigné comme principal responsable de la débâcle de la Caisse fédérale de pension: il aurait sous-estimé ses problèmes et multiplié les fausses promesses au Parlement. L’intéressé a parlé de règlement de comptes politique.

Election mouvementée

Otto Stich avait été élu au Conseil fédéral le 7 décembre 1983. Ce fut une élection mouvementée: la majorité bourgeoise du Parlement a préféré le Soleurois à la Zurichoise Lilian Uchtenhagen, dont le Parti socialiste voulait faire la première femme à entrer au gouvernement.

Humilié, le PS a failli se retirer du gouvernement. Par la suite, Otto Stich a montré qu’il n’était nullement l’otage des partis bourgeois. Les socialistes ont fini par considérer qu’il les représentait bien au gouvernement, même s’il n’était pas toujours sur leur longueur d’ondes, notamment dans la question européenne.

Après avoir quitté le gouvernement, Otto Stich a continué d’intervenir dans la vie politique. Il s’est engagé dans plusieurs campagnes de votations et a critiqué certains projets de son successeur Kaspar Villiger ou du gouvernement, comme les Nouvelles liaisons ferroviaires alpines (NLFA) ou la Fondation Suisse solidaire, qui prévoyait de distribuer une partie des réserves d’or de la Suisse pour des projets d’aide au développement.

Réactions

Sitôt connu l’annonce du décès, les réactions ont commencé à tomber. L’une des premières émane fort logiquement du Parti socialiste suisse. Otto Stich aura été un des conseillers fédéraux «les plus crédibles de l’histoire et aussi l’un des plus proches de la population», a déclaré son président, Christian Levrat. Otto Stich était le parfait Suisse économe, a qui chacun aurait laissé son carnet d’épargne, a quant à lui déclaré Peter Bodenmann, ancien président du PS.

Le Conseil fédéral a fait part de sa douleur à l’annonce du décès de l’ancien ministre. Ce dernier restera dans les mémoires comme une «personnalité marquante et attachante», note le gouvernement dans un communiqué. Otto Stich a su rallier très rapidement «tant ses amis que les esprits critiques à son style de conduite», relève le gouvernement. Et de saluer tant sa ténacité à défendre ses idées que sa simplicité, «toujours reconnue et appréciée».

Originaire de Kleinlützel (Soleure), Otto Stich est né le 10 janvier 1927 à Dornach (Soleure), où il a fréquenté l’école primaire et secondaire. Ayant obtenu à Bâle une maturité commerciale, il a étudié à l’université de cette ville pour devenir en 1954 docteur ès sciences politiques.

Après avoir enseigné, il est devenu en 1971 chef du personnel du groupe Coop suisse, qui occupait quelque 32’000 collaborateurs. En 1980, il était nommé directeur suppléant de Coop suisse. Otto Stich était marié et père de deux enfants.

Au début de sa carrière politique, Otto Stich a assumé des fonctions dans sa commune. Membre du PS depuis 1947, il a siégé de 1970 à 1975 au comité directeur. Entré au Conseil national en 1963, il y est resté vingt ans. Comme parlementaire déjà, il s’était profilé comme un spécialiste des questions financières.

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